En donnant le feu vert à la reprise des constructions dans les colonies juives, le Premier ministre israélien remet en question tout ce qui a été fait pour la paix. En fait, la question qui se pose et doit être posée est de savoir si, effectivement, Israël veut réellement la paix quand la seule chose qui semble intéresser l'Etat hébreu, ce sont les territoires et la sécurité. Donc, non seulement Israël refuse le principe qui fonde le processus de paix israélo-palestinien, la terre contre la paix, il entend en plus, modifier la démographie et la géographie des territoires palestiniens occupés en procédant à leur dépeçage. Sur quelle logique se fonde Israël qui, d'une part, affirme vouloir la paix avec les Palestiniens, et agit, d'autre part, dans le sens de rendre une paix entre les deux peuples impossible et inopérante? La décision d'autoriser à nouveau la construction de centaines de logements dans les colonies juives de Cisjordanie, outre de constituer un obstacle à la paix, est aussi un défi à l'entendement sachant que ces implantations coloniales rendent peu vraisemblable un Etat palestinien et vaine sa création. En donnant son feu vert à la reprise des constructions de logements dans la colonie juive de Givat Zeev, dans la périphérie de Jérusalem-Est, le Premier ministre israélien, Ehud Olmert, outre d'ouvrir la voie à l'expansion des autres colonies juives, a, en fait, tourné ostensiblement le dos à la paix, tout en montrant le peu de cas qu'Israël fait de ses vis-à-vis palestiniens. Aussi, il appartient maintenant à la communauté internationale de se déterminer par rapport à la réalité qui est celle du terrain, lorsque c'est l'Etat hébreu lui-même qui entrave le processus de paix en multipliant les obstacles à son avancée. On ne peut, dans le même temps, prétendre travailler pour la paix et faire en sorte que son avènement ne puisse jamais devenir une réalité et cela par le dépècement de ce qui reste des territoires palestiniens occupés. La bande de Ghaza, sur laquelle règne depuis juin dernier le Hamas, ne représente plus que le sixième de ce qu'elle était au moment du partage de 1947, tout comme la Cisjordanie dont plus du tiers est aujourd'hui occupé par les colonies juives. C'est cette vérité qui entrave le processus de paix que la communauté internationale se doit de prendre en compte. Qu'en est-il, dès lors, de la «Feuille de route», un plan international de paix lancé en 2003, qui prévoit, notamment, le gel de la colonisation, sur laquelle reposent tous les efforts fournis jusqu'ici pour faire redémarrer le processus de paix, et confirmée par la conférence d'Annapolis (Etats-Unis) le 27 novembre dernier? Evidemment, la décision d'Israël de reprendre la colonisation embarrasse les amis et soutiens de l'Etat hébreu, mais les faits sont là: l'Etat hébreu fait peu cas des «conseils» de ses amis lorsque ceux-là ne vont dans le sens d'un soutien sans réserve à l'Etat hébreu, même lorsque, manifestement, il a tort et fait obstacle au processus de paix. Ainsi, les Etats-Unis ont mollement déploré la reprise des constructions, sans pour autant condamner une décision qui va à l'encontre des efforts que Washington fournit pour parvenir à la paix entre les deux peuples israélien et palestinien. Qualifiant «d'inopportune» la relance des constructions, le porte-parole du département d'Etat, Sean McCormack, s'interrogeait lundi, déclarant «l'annonce du gouvernement israélien est-elle utile au processus de paix israélo-palestinien?» «Non, elle est inopportune» a-t-il dit, sans aller cependant jusqu'à condamner une décision qui n'est pas «utile» au processus de paix. La «communauté internationale» a sans doute critiqué la décision israélienne, mais sans pour autant condamner ce qui s'apparente à un nouveau gel du processus de paix. C'est encore le mouvement anticolonisation israélien «la Paix Maintenant» qui eut la réaction la plus vigoureuse par son directeur, Yariv Oppenheimer, qui a condamné ce qu'il a estimé de «scandaleux», déclarant «c'est une nouvelle décision scandaleuse (...) Elle va affecter encore plus les négociations avec les Palestiniens». Mais de quelle négociation s'agit-il lorsque le ministre israélien des Infrastructures, Binyamin Ben Eliezer, justifie, en ces termes, cette décision en indiquant: «Cette décision ne nuit pas au processus engagé en novembre à Annapolis (...) Il y a beaucoup de chantiers qui ont été lancés depuis 6 ou 7 ans et qui ont été stoppés, puis relancés dans des secteurs qui resteront de toute façon entre nos mains.» Ainsi, Israël est juge et partie et sait ce qui convient aux Palestiniens. Or, cela veut surtout dire qu'Israël refusera de céder Jérusalem-Est. Peut-il y avoir la paix sans Jérusalem-Est, capitale du futur Etat palestinien? Les Palestiniens accepteront-ils de créer leur Etat sur des parcelles de territoires qui ne permettront pas à cet Etat d'être viable et fiable? Réagissant au nouveau développement dans les territoires occupés, le principal négociateur palestinien avec Israël, Ahmed Qoreï, a déclaré, hier, que «la poursuite de la colonisation est une gifle au processus de paix et aux efforts déployés pour le rendre crédible.» «Israël envoie un très mauvais message qui montre son mépris des négociations», a encore dit M.Qoreï. Israël doit maintenant choisir: ou il veut la paix, et doit agir en conséquence- en restituant les terres aux Palestiniens- ou poursuivre l'occupation qui suscite la résistance que l'Etat hébreu qualifie alors de terrorisme. L'option de la paix est plus que jamais entre les mains d'Israël: que veut-il? la paix ou la guerre? C'est-à-dire l'échange de la terre contre la paix. Il lui est impossible de prétendre avoir la paix et les territoires. Les soixante dernières années, qui ont vu perdurer le conflit, le montrent amplement.