Le président Poutine qui cède son poste, le 7 mai, à son successeur élu, Dmitri Medvedev, a accepté la charge de responsable du parti au pouvoir. Sortir pour mieux revenir. C'est la gageure que vient de réussir le président sortant russe, Vladimir Poutine, qui s'est vu introniser, hier, à la tête de «Russie unie», à l'occasion du IXe congrès du parti au pouvoir. M.Poutine, qui sera également installé au poste de Premier ministre, le 8 mai prochain - au lendemain de la prise de pouvoir de son successeur élu, Dmitri Medvedev - contourne de la sorte la loi fondamentale russe qui ne lui permet pas de conserver le pouvoir au-delà des deux mandats légaux. De fait, l'unique enjeu du congrès de Russie unie - convoqué à la va-vite - était de ménager un poste sur mesure au désormais ex-chef du Kremlin, lui assurant la main-mise sur les affaires du pays. D'ailleurs, le président du parti, Boris Gryzlov - en même temps président de la Douma (chambre basse du Parlement ou «Russie unie» dispose de la majorité) - n'a pas caché que la présidence du parti devait revenir à Vladimir Poutine. Lundi, à l'ouverture du congrès M.Gryzlov, qui fait ainsi offrande de son poste au président sortant, a déclaré: «Aujourd'hui, nous parlons des fonctions concrètes que nous sommes prêts à proposer à Vladimir Poutine. Il s'agit de celles de président du parti». Prenant hier la parole, Vladimir Poutine, d'emblée a accepté avec «gratitude» cette nouvelle charge, indiquant devant le congrès du parti: «J'accepte avec gratitude la proposition des membres du parti et de leur direction (...) Je suis prêt à prendre cette responsabilité supplémentaire et à diriger Russie unie.» Cette nouvelle donne du champ politique russe est l'aboutissement de plusieurs mois de travail et de campagne, pour permettre à M.Poutine de conserver des prérogatives politiques et rester le «numéro1» après l'achèvement de sa mission à la tête du Kremlin. Mais, avant d'en arriver là, le parti a dû amender son règlement intérieur, séparant, notamment, les fonctions de chef du parti de celle de président du Conseil suprême du parti - charges jusqu'ici assumées par le seul Boris Gryzlov - organiser une campagne soutenue en faveur du président sortant. De fait, l'ascension à la tête du parti, «Russie unie», a été préparée de longue main pour permettre à Vladimir Poutine, ancien colonel du KGB (service de renseignements soviétique) de rester dans la périphérie du pouvoir, sans doute surtout, de le contrôler. Pour ce faire, une longue campagne a été initiée tout au long de l'année écoulée pour que le président, qui achevait son deuxième mandat de quatre ans, conserve son leadership national. Rester dans les arcanes du pouvoir c'est encore diriger le parti le plus puissant en Russie, «Russie unie» considéré comme le véritable «héritier» du PC soviétique. C'est la voie qu'a choisie Poutine, plutôt que d'amender la Constitution - chose qui aurait été mal comprise par les observateurs et vue comme une entorse à l'alternance de pouvoir - a joué avec intelligence sur les «reliquats» de l'ère soviétique, encore prégnants, de «l'homme fort». Lors des législatives de décembre 2007, Vladimir Poutine, qui n'était pas membre du parti, dirigeait néanmoins la liste de «Russie unie». Il fallait donc concrétiser «l'idée de leader national» de M.Poutine comme cela a été résumé par une source proche de «Russie unie». La direction du parti était la première étape, formalisée hier. Reste la seconde étape qui verra l'installation de Vladimir Poutine à la tête du gouvernement. A ce propos, Boris Gryzlov, président de la Douma déclarait, le mois dernier: «Nous garantissons que nous choisirons Vladimir Poutine pour qu'il puisse exercer les fonctions de chef du gouvernement; le 7 mai cette proposition sera adressée à la Douma et le 8 nous allons l'adopter.» La boucle sera donc bouclée le 8 mai avec l'installation de M.Poutine en tant que Premier ministre, lequel se voit ouvrir une voie royale pour pérenniser son pouvoir. Le nouveau président, Dmitri Medvedev, qui sera installé le 7 mai dans ses nouvelles fonctions, observe un profil bas et estime «prématuré» son adhésion au parti, déclarant, en marge du congrès de Russie unie: «Je considère que mon adhésion au parti serait pour l'instant prématurée» soulignant au passage que «Russie unie était un parti de personnes qui partagent les mêmes idées (que lui)». M.Medvedev ajoute: «Je suis convaincu qu'après mon élection au poste de chef de l'Etat, il serait correct de rester en dehors de toute appartenance directe à un parti politique.» Il a estimé cependant «logique et opportun» que Vladimir Poutine accepte de prendre la tête du parti.