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Un monument s'en est allé
MOHAMED MERZOUGUI
Publié dans L'Expression le 19 - 04 - 2008

Dors en paix, tu as accompli ta mission, bravement, sincèrement.
Le chapelet s'égrène doucement, assurément, pareil à cette horloge qui nous compte les heures et les retire invariablement de notre existence. Ainsi, comme l'éternel sablier de notre vie, qui est retourné toujours à nouveau, la mort, une vérité incontournable et une leçon continue de la nature, nous apprend chaque jour, chaque instant que fait le Créateur, la disparition d'un des nôtres. Ce jour-là, ce fut encore une triste nouvelle qui nous venait avec une grande charge d'émotion, nous informant que Si Mohamed Merzougui, ce généreux affidé de la cause nationale, a rejoint le Seigneur.
En effet, en ce jour du samedi 12 avril 2008, par une belle journée printanière, la nouvelle nous arriva comme une trainée de poudre, non sans embaumer le ciel d'un parfum suave de la révolution, la glorieuse, celle qui prit naissance en cette nuit du 1er Novembre et qui devait embraser toute l'Algérie. Oui, un parfum suave, parce que la disparition de cet autre membre du «Groupe des 22»..., même cruelle, marquée par un sentiment de tristesse, nous rappelle constamment que la liste des chouhada n'est pas encore close et que le vaste Paradis du Firdaous attend toujours d'heureux élus, à l'image de Si Mohamed Merzougui qui nous a quittés, humblement, silencieusement, sereinement, comme il a vécu parmi les siens, dans ce pays qu'il aimait tant. Y a-t-il mieux qu'une offrande pareille pour se rapprocher de Dieu, Clément et Miséricordieux?
Un juste qui aimait le vrai
Il était onze heures et quart ce samedi matin quand, entouré de sa famille, pieuse et consentante de l'effet du destin concernant l'époux, le père et le grand-père, il rendit son dernier soupir, paisiblement, en bon fidèle, celui qui croyait profondément en Dieu, aux idées fortes, et qui a expiré dans cette voie, car c'est en cela sûrement que consiste le vrai. Ce jour-là, venait de s'achever une vie, plus encore, venait de se tourner une page d'Histoire, glorieuse et noble, celle qui a ce goût de mettre le peuple en appétit, parce que résolu à être libre...Ce jour-là venait de s'éteindre une autre étoile parmi celles qui ont éclairé notre voie, et donné le mot juste pour entamer la longue et pénible épopée qu'allait saisir le peuple, sous la bannière du FLN, pour en faire une lutte victorieuse contre le colonialisme.
Oui, en ce 12 avril de l'année 2008, s'éteignit Si Mohamed Merzougui, un des valeureux combattants de l'Algérie, ce pays qu'il avait constamment dans le coeur, dans les tripes, comme on dit dans le langage viril des nationalistes...Il tira sa révérence après plus de 54 ans de sacrifice, de militantisme, et de combat loyal et sincère pour l'essor et le développement de ce pays qu'il a tant et tant aimé. Il tira sa révérence en ce jour où ses amis, faits de la même pâte, façonnés dans le moule de l'authenticité et de la fidélité, aimant le juste, appréciant le vrai, disaient déjà non sans chagrin, en l'évoquant avec ce plein d'amour des intimes, s'inspirant de Blaise Pascal: «Mohamed, en Homme juste, agissait par sa foi dans les moindres choses...»
Revisitons l'Histoire pour dire aux jeunes -qui ne le connaissent pas, certainement, et ce n'est pas de leur faute- qu'il ne fut pas cet homme ordinaire qui se préoccupait à passer le temps...Il fut un militant assidu, un patriote convaincu, un responsable digne, un dirigeant courageux, un altruiste sincère, un homme sage, enfin un citoyen dévoué et honnête, qui dépensait chaque instant de sa vie dans le bien, la bonne parole et la bonne action. Disons-leur que Si Mohamed Merzougui était, avec les Mohamed Boudiaf, Zoubir Bouadjadj, Othmane Bélouizdad, Rabah Bitat, et d'autres, un des principaux organisateurs de cette rencontre historique du «Groupe des 22» à El Madania, qui décida de passer à l'action concrète, balayant du revers de la main ces pénibles atermoiements de partis politiques qui avaient montré, en cette période, leur impuissance à juguler le mal. En effet, il était parmi ce groupe de jeunes nationalistes qui ont créé le FLN à qui était confiée la mission de libérer notre pays. Il était aussi à la tête de ce groupe de choc qui a pris les armes et qui était désigné pour cette opération contre la «Radio d'Alger», à minuit, ce 1er Novembre, comme d'autres groupes l'étaient à travers l'ensemble du territoire national, pour faire entendre aux colonisateurs ce dont ils étaient capables.
Cela nous amène à dire brièvement que fut Si Mohamed Merzougui, dans l'impétuosité de la bataille pour le recouvrement de la souveraineté nationale. Eh bien, avant 1954, comme tous les jeunes de sa trempe, il fut un fervent militant du mouvement national et des organisations scoutes et de jeunesses. Il était parmi ceux qui demandaient avec insistance, à l'instar des nationalistes, pressés de recouvrer leurs droits, à rentrer dans le concret, plutôt que de «pédaler dans la semoule», une belle expression qu'il employait souvent. Il était parmi ceux-là, «partisan de la mise sur pied d'une organisation armée destinée à passer rapidement à l'action». Si Mohamed Merzougui, à travers sa participation à l'élaboration de la plate-forme de Novembre, que dis-je à travers sa responsabilité pleine et entière avec les membres du Crua, ne voulait plus être vaincu et rejeté dans le statut colonial. Son engagement total dans la lutte, démontrait que ce n'était pas seulement ou, simplement, un mouvement insurrectionnel qui allait en s'amplifiant à toutes les régions, mais une politique de décolonisation qui poussait ses vigoureuses racines..., une politique soigneusement préparée, mûrement réfléchie et qui sera consciemment menée par le moyen d'un combat légitime.
Ainsi, aujourd'hui, commenter les exploits de cet homme, humble, modeste, arborant dans son calme olympien ce magnifique sourire désarmant de sincérité, c'est revivre ces moments mémorables où avec d'autres qu'on appelle les «Historiques» -l'expression est dignement à sa place- il a pris en charge l'organisation du déclenchement de la glorieuse révolution dans les zones qui partageaient le territoire national et qui sont devenues, plus tard, les principales «wilayate», avec leur commandement, leur organisation et leur propre logistique de guerre. Si Mohamed Merzougui qui n'avait que 26 ans à l'époque, ainsi que ses compagnons, qui n'étaient pas plus âgés que lui, allaient contredire, en ce mémorable 1er Novembre, les ambitions des grands chefs de la colonisation qui, depuis l'idéologue Prévost-Paradol jusqu'au ministre de l'Intérieur d'alors, François Mitterrand, se targuaient de fonder cet empire méditerranéen et d'équilibrer la «troisième nation-continent autour de la métropole».
Que puis-je dire encore de ce monument de l'Histoire, qui vivait simplement sans trop de façons ou de solennité, pendant que d'autres se pavanaient pour avoir simplement participé à la révolution, comme tout le monde, ou gratifié le pays de quelques services ou si peu de rendement? Je peux écrire des pages et des pages, racontant à la jeune génération ce que fut cet homme modeste -je ne le dirai jamais assez-, qui avait une relation intime avec le sacrifice, et qui portait son amour pour l'Algérie au-delà de la réalité et du temps. Mais je laisse à l'école de demain le soin de remplir sa mission, car celle d'aujourd'hui -qui s'enlise dans ses dissensions et sa médiocrité- n'a pu se trouver l'opportunité pour tout dire sur notre révolution à nos enfants avides de connaître leur passé pour se préparer à représenter convenablement l'avenir. Alors cette même école, réformée et structurée prochainement selon les principes fondamentaux de la modernité, et dans un bel élan d'éducation civique, apprendra aux enfants que Si Mohamed Merzougui, indépendamment de son importante participation à la préparation de l'événement qui marqua le début de notre combat libérateur, avait plus d'esprit pour vivre simplement, calmement en évitant cette maladie du siècle: la course au pouvoir, en tout cas mieux que les gens de chicane n'en ont pour produire le bien dans le respect et la droiture.
Un homme de convictions
Que puis-je dire encore de Si Mohamed Merzougui, l'ami de tous les militants, de tous ceux qui ont su répondre présent à l'appel de la patrie, mais surtout l'ami de ma famille qu'il connaissait parfaitement, «grands et petits», pour avoir vécu ensemble dans la même maison, dans ce quartier de Belcourt où se préparaient fébrilement, comme ailleurs, les moyens pour commencer la lutte du destin? Je dirai, et cela, je l'apprenais de sa bouche, bien après l'indépendance, quand réunis autour d'un café chez l'exubérant Zoubir Bouadjadj à Sidi-M'Hamed, qu'il considérait que le militantisme ou le nationalisme -deux termes identiques qui se confondent chez les anciens- n'ont pas la même «allure» pour tout le monde. Une conviction très profonde chez cet Homme, et les lecteurs me permettront de l'écrire avec un «H» majuscule, un Homme qui, de tout temps, a abhorré les branlants, les vacillants, les détracteurs et leurs partisans. Ceux-là, me disait-il, en cachant son aversion -il mettait toujours les formes quand il donnait libre cours à ses sentiments- qui sont les adeptes de l'hésitation et de l'inconstance, nagent dans les eaux troubles de l'intrigue, des drames et des mésaventures, entraînant malheureusement, quelquefois ou souvent, certaines de nos Institutions dans leur sillage.
Si Mohamed est parti un peu tôt, je pense. Mais c'est le destin et on n'y peut rien! En bons musulmans, nous acceptons le décret du Tout-Puissant. En effet, il est parti en silence, comme il a toujours vécu, laissant derrière lui l'amertume d'un pays à la croisée des chemins, dans un contexte difficile pour le peuple «d'en bas», pour lequel il a sacrifié toute une vie de volontarisme. Il est parti au moment où les militants sincères auraient apprécié un hommage bien mérité qui aurait consisté à le voir récipiendaire d'une fonction honorifique au sommet du FLN par ce «fameux» dernier Congrès, qui a été, par ailleurs, si fertile en désignations incongrues. Parce que cette proposition l'aurait touché au plus profond de lui-même et aurait rendu justice à «l'Historique», qui fut un des fondateurs du glorieux FLN originel. Mais que veut-on, «les vents ne soufflent pas toujours au gré des voiles», comme dit cet aphorisme arabe!
Enfin, malgré cela et pour les gens simples, honnêtes, mais forts de par leur caractère, la nature réussit toujours par rétablir la justice et la vérité. Car ce samedi après-midi, le monde, ce beau monde qui était au cimetière de Sidi-M'Hamed, contredisait ce qu'un jour, le Duc de La Rochefoucauld affirmait: «La pompe des enterrements regarde plus la vanité des vivants que l'honneur des morts.» Pour notre part, nous disons: non, non et non! Nous ne partageons pas cette idée, car à l'heure de la mise en terre du défunt Si Mohamed, tout le monde avait cette pieuse pensée pour le moudjahid, pour le père, pour l'ami, enfin pour l'Homme de conviction, de principes.
Les gens qui étaient dans ce cimetière, ne venaient pas pour une rencontre de palabre, «comme à l'accoutumée», ils venaient pour accompagner à sa dernière demeure un frère qui leur était cher, avec qui ils ont milité et souffert, mais avec qui ils ont eu surtout beaucoup de bonheur et de satisfaction de se savoir libres et indépendants, après tant d'années de sacrifices en de durs combats. Oui, ils étaient tous là, sans trop de pompe, justement, parce que ceux qui étaient là savent comme le savait si Mohamed Merzougui que les gens passent, que les fortunes disparaissent, mais que le souvenir de l'Homme honnête, brave et sincère demeure...
Dors en paix Si Mohamed, tu l'as bien mérité. Celui qui t'a bien connu, et que tu aimais tant, te répète ce que disait avec conviction notre saint Augustin de Taghaste (Souk-Ahras): «Ce temps est si rapidement emporté du présent au passé qu'il ne possède aucune extension de durée.»
En effet, pour toi, c'était écrit ainsi, tu devais partir ce 12 avril, il ne pourrait y avoir de concession sur le destin, il ne pourrait y avoir de retard pour rejoindre le vaste champ de la miséricorde, celui que le Tout-Puissant nous réserve pour nous accueillir, en bons croyants, auprès de Sa Majesté, dans son Eden éternel.
Dors en paix, tu as accompli ta mission, bravement, sincèrement. Tu as laissé des amis, des disciples, une famille digne, un fier passé politique, mais surtout un nom, et c'est cela ton capital devant l'Histoire, devant Dieu.
Adieu!
(*) Ancien ministre


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