La figue a presque disparu de notre alimentation. Pourtant, ce fruit à haute valeur nutritive et énergétique faisait, dans un passé récent, la fierté de la Kabylie. Qui donc, aujourd'hui, se souvient de ces unités de conditionnement qui exportaient vers l'Europe ce fruit qui, alors, rivalisait avec la figue de Smyrne pour sa chair et aussi pour son goût à nul autre pareil? Sur les marchés d'Europe, il suffisait alors de voir l'étiquette «Produce of Algéria» pour que le client achète, assuré de faire l'emplette d'un fruit excellent. Mais, aujourd'hui, les conditionneurs ne sont plus là et même les «figueraies» kabyles périclitent. Les gens, désormais, semblent avoir d'autres priorités et l'entretien des figuiers n'est plus ce qu'il était. Aussi, les fruits qui se vendent dans des sachets en plastique sont petits, rabougris et à peine si l'on peut parler de figues. Il faut dire que les récoltes se font de manière expéditive, la plupart préférant écouler sur les marchés les fruits frais; le séchage est aussi mené un peu n'importe comment, les claies en roseaux sont rares et les figues sont laissées à sécher sur des supports qui ne respectent guère le fruit. Ainsi, l'entretien des «figueraies» négligées, récolte expéditive et sans ménagement blessant souvent le fruit, séchage ne respectant pas les normes et aussi emmagasinement empirique etc. Tout cela ne favorise guère une éventuelle reprise de cette spéculation agricole. Comment un figuier jamais labouré, encore moins taillé peut-il réellement produire de beaux fruits? Et comment une «figueraie» vieillie et avec des arbres rabougris jamais remplacés, peut-elle donner de bonnes récoltes. Ce n'est certes, pas en poursuivant pareille démarche que le pays pourrait reprendre pied sur les marchés européens qui, pourtant, ne demandent que des fruits comme on savait en produire. Taranimt, Tameriout, Alekake et autres Azendjar périclitent; les cols de dames ne sont cultivés que pour les besoins immédiats. Pourra-t-on revoir un jour les conditionneurs reprendre leur travail et essayer d'exporter la figue? Tout dépend en effet d'une solide campagne d'intéressement que seuls les pouvoirs publics sont à même de mener. En attendant, les vrais fellahs pleurent la disparition lente et inexorable des «figueraies».