Une page s'est tournée dimanche pour le Conseil français du culte musulman (Cfcm), après les élections de renouvellement de ses instances en France. En effet, la Grande Mosquée de Paris (GMP), présidée par le président sortant du Cfcm, Dalil Boubekeur, s'est abstenue de participer au scrutin contestant les règles de désignation du corps électoral en fonction de la surface cultuelle. N'occupant que 15% de celle ci, la GMP s'est vue directement disqualifiée au profit du Rassemblement des musulmans de France (RMF), institution directement soutenue par le Maroc et à la tête des élections, occupant à elle seule 40% de la surface. La Fédération nationale de la Grande Mosquée de Paris (Fngmp) a considéré à ce sujet que «ce mode d'évaluation réduit injustement la représentativité de la première communauté de France liée historiquement et culturellement à la longue histoire de la France avec l'Algérie (...) cette communauté se voit considérablement réduite au profit de lieux de culte récemment édifiés, en périphérie urbaine, voire dans les campagnes, qui ont des surfaces plus importantes leur permettant d'exploiter à leur avantage le critère électif unique du mettre carré cultuel». Autre raison qui a poussé la GMP à ne pas prendre part à ces élections, la non-considération du nombre de fidèles qu'elle compte dans ses rangs et qui est largement supérieur à celui du RMF. La France qui compte environ 5 millions de personnes de culture arabo-musulmane, compte 1,5 million d'Algériens, et seulement 1 million de Marocains. Ces chiffes devraient, logiquement et normalement, donner la primeur à la Grande Mosquée de Paris dans la course à l'élection. Les résultats de ce vote sans équivoque, ont permis au Rassemblement des musulmans de France (RMF) directement soutenu par Rabat, de se hisser en tête des élections avec 43% des voix. Ces derniers viennent mettre en exergue les rivalités entre les groupes religieux de différentes sensibilités composés, notamment de la Fédération nationale de la Grande Mosquée de Paris et du Rassemblement des musulmans de France. En effet, les diverses difficultés qu'a connues la Fngmp ces dernières années, ont conduit à son éclatement et surtout à la perte de beaucoup de ses membres, «marocains» pour la plupart au profit du RMF. C'est d'ailleurs l'ex-vice-président de cette dernière, Mohammed Moussaoui, qui se présente candidat à la présidence du Conseil du culte musulman. En outre, il est à signaler que derrière ses élections, s'insinuent en réalité des luttes de pouvoir entre nationalités, et le fait d'introduire ce nouveau mode de scrutin jouerait ainsi un rôle moteur dans la division des musulmans de France. La Fngmp a considéré dans ce contexte que «ce type de scrutin aboutissant inévitablement au ressentiment et à la rancoeur (...), est un facteur de division et ne peut qu'exacerber les antagonismes et les rivalités». Selon cette même instance, designer des électeurs, en mesurant les surfaces cultuelles, représente une insulte à la dignité, l'intelligence mais aussi à l'esprit de consultation des membres de cette communauté, «ce critère a favorisé l'émergence d'une représentativité qui ne reflète en rien la sociologie de l'Islam en France et l'évaluation de cette représentativité au mètre carré frustre les musulmans de France qui ne comprennent pas que la foi puisse se mesurer au mettre carré constituant ainsi une injure à l'état religieux des musulmans de France». Le second tour de ces élections aura lieu le 22 juin, avec l'élection du bureau exécutif du Cfcm et de son président.