Si Tahar Chikhaoui «pousse» les stagiaires à savoir bien imager leur sujet, Jean-Pierre Marillon arrive à «tirer» d'eux un meilleur scénario.... Ambiance assidue dans un des «laboratoires» de la Maison de la culture Taos-Amrouche de Béjaïa. Petit retour en arrière. Du 28 mai au 2 juin dernier s'y est tenue la 6e édition des Rencontres cinématographiques, qu'organise annuellement l'Association Project'heurs. Parallèlement aux projections quotidiennes de films, ce rendez-vous cinématographique de Béjaïa était agrémenté d'ateliers d'initiation aux techniques du 7e art. Un des ateliers qui a retenu notre attention, est celui dénommé Côté court. Un atelier de réécriture de scénario de court métrage de fiction destiné aux jeunes auteurs-réalisateurs désireux d'être accompagnés dans la réécriture de leur scénario. Cet atelier était encadré par deux professionnels: Tahar Chikhaoui, critique, enseignant (Tunisie) et Jean-Pierre Morillon, directeur littéraire, enseignant (France). L'un apporte son savoir «culturel», l'autre «technique» et se définissant comme un spécialiste en «haute couture» de scénario. Il travaille aussi pour différentes chaînes de télévision en France et à l'étranger dont les USA. Son travail consiste à retravailler, de façon professionnelle, des scripts. Parallèlement à son activité professionnelle, il encadre des formations dans le monde en aidant des jeunes réalisateurs dans leur première ou seconde oeuvre. «Concrètement, nous avons, durant ces rencontres, travaillé sur des scénarios préalablement sélectionnés. Un appel à candidature a été lancé par Project'heurs. Mon camarade et moi, Tahar Chikhaoui, avons sélectionné quatre scénarii qui nous ont paru les plus prometteurs», nous a-t-il affirmé. Et de nous expliquer sa démarche: «Je prends le scénario et discute des intentions avec le réalisateur, sur les personnages, les séquences. On joue les rôles des personnages, on essaie de récréer des scènes, de rajouter des détails, je ne réécris pas le scénario du lauréat à sa place, mais avec lui. Mon objectif, c'est l'investissement des stagiaires, une sincérité dans ce qu'ils veulent dire. Je le fais avec la certitude que ces films soient réalisés après, sinon, cela ne m'intéresse pas. A Namur, quand je vais en Belgique, les films sont encadrés par des producteurs qui les récupèrent, j'ai mon lauréat algérien de l'an dernier qui va tourner le 27 juin, Khaled Benaïssa, pour lequel j'ai réécrit le scénario; j'ai pu obtenir l'aide nécessaire de l'Etat». M.Morillon confie être fier quand il apprend qu'un scénario a été refusé par la commission avant son atelier et accepté après. «Le scénario reste celui du réalisateur, moi je suis comme la sage-femme qui aide à accoucher, pas la femme, donc moi, je mets ce qu'il faut pour que ça prenne de l'ampleur, je fais comme le cuisinier ou le plombier, un truc du genre.». Pour sa part, Tahar Chikhaoui, qui enseigne l'histoire du cinéma et l'analyse de films à la faculté de lettres, à Manouba, nous avouera son appréhension de départ, laquelle s'est vite dissipée au regard de la sincérité des stagiaires. «Ce que j'ai remarqué, c'est le désir de faire du cinéma. La sincérité, c'est l'essentiel. Au départ, j'avais des appréhensions. Je trouvais que cela manquait d'élaboration du point de vue de l'écriture de scénario. Ce n'est pas le cas pour tout le monde. Ce sont des sujets que les candidats portent vraiment. J'ai découvert, d'un côté un désir fort de faire du cinéma et dire des choses, et de l'autre, une fraîcheur, une ouverture, une disponibilité, qui nous a facilité énormément le travail. Ce sont les deux aspects positifs que j'ai rencontrés, auxquels je ne m'attendais pas.» Ces stagiaires sont Smaïl Yahiaoui,32 ans, qui dit aimer le métier de cinéma, que ce soit devant ou derrière la caméra, réaliser, écrire ou jouer. «Mon sujet, c'est l'histoire d'un amour raté, qui a eu lieu à Béjaïa. C'est ma deuxième résidence d'écriture, après celle qui a lieu le mois de novembre dernier à Jijel, avec l'association Chrysalide que je remercie au passage. J'estime aussi que Jean- Pierre Marillon est un excellent réparateur. On a tous confiance en lui. C'est notre rêve d'ailleurs d'écrire et de voir nos films réalisés. On profite au maximum de ces ateliers.» Même son de cloche du côté de Aït Ouaret Noureddine. «Mon scénario traite de la maladie du sida... j'ai fait une petite formation de scénariste. Mais là, j'ai appris beaucoup de choses; au début je voulais faire juste scénariste, j'ai 37 ans, c'est un peu tard; par Internet, j'ai eu la chance de trouver un site payant pour suivre des cours et j'ai complété ici ma formation, grâce aussi à ce côté humain, que nous n'avons pas par Internet. C'est aussi un plaisir de travailler avec deux grands messieurs aux méthodes différentes. C'est du sérieux. Je ne pensais pas arriver à ce résultat-là, je suis très optimiste.» Impression partagée par Omar Zaâmoum, ayant déjà à son actif un court métrage assez remarqué, intitulé Renvoi d'appel. «Je suis venu ici parce que j'a su que Tahar Chikhaoui étai là. je n'ai pas regretté. Cela m'a permis d'apprendre beaucoup de choses, de mieux maîtriser mon sujet, de le voir sous d'autres angles. Et je suis sûr qu'il est à 99% fini.» Aussi, gageons qu'on entendra vite parler de ces films, du moins on l'espère vivement, tout comme Jean-Pierre Marillon.