Jadis, le marché hebdomadaire tenait une place indéniable dans la tradition de la région. Le marché était pour les riverains, l'unique forme de communication de masse. Le marché hebdomadaire de la commune de Boudjima, est en train de disparaître. Son espace se voit, chaque année, se rétrécir comme une peau de chagrin, laissant place, peu à peu, au béton. Ce lieu où se rendaient les populations de la région du nord du Sébaou, depuis des siècles, pour commercer, a été choisi pour l'implantation d'une zone urbaine. Les autorités locales qui ont prévu de le déplacer vers une autre assiette réservée dans la localité de Yafadjen, distante de deux kilomètres de son actuel emplacement, ne semblent plus en faire une priorité. Tout au début, les raisons invoquées, quant à ce retard, tenaient de la vocation sportive de l'assiette en question, réservée à un stade de football. Puis, ne voulant pas amputer la jeunesse de leur propriété, les élus locaux se sont rabattus sur l'ancienne brigade de gendarmerie. C'était encore une fois, peine perdue, car ce lieu ne pouvait point servir à d'autres fins. Et, enfin, à l'Assemblée communale sortante d'échouer dans sa tentative de son déplacement. Prévoyant de l'installer dans un terrain avoisinant la nouvelle zone urbaine de Boudjima, la parcelle fut squattée par les propriétaires des véhicules de transport de voyageurs. Entre-temps, l'urbanisation continuait d'escamoter des parcelles entières. La vaste étendue qui voyait venir, depuis des siècles, des marchands de tout le pays, se rétrécissait au point de ne pouvoir contenir, aujourd'hui, que quelques marchands de fruits et légumes. Jadis, ce marché qui est indéniablement un pan de la tradition rurale, grouillait de monde tous les jeudis. Les maréchaux-ferrants et les marchands de dattes venus du sud du pays côtoyaient les éleveurs de bétail de l'ouest algérien. Les villageois de la région, de leur côté, y vendaient les produits de leur maigre agriculture. Ce lieu tenait une place indéniable dans la tradition de la région. Le marché, était pour les riverains, l'unique forme de communication de masse. En effet, selon les anciens, c'était dans les marchés que les gens s'informaient des dates importantes et des fêtes religieuses. Ce lieu de rencontre tenait une place importante dans le quotidien des gens. Dans ces montagnes dépourvues de moyens de communication, les gens ont fait de ce lieu un segment indispensable dans leurs relations. Pour préserver la place qui lui était donnée, il était également devenu coutumier d'emmener les enfants au marché et de leur acheter, à l'occasion, une tête de boeuf. Cette journée était fêtée par la famille, et dans le village elle est restée gravée dans la mémoire des habitants. Actuellement, ce lieu ne trouve pas d'assiette pour l'accueillir. La nécessaire urbanisation, la modernisation des moyens de communication et le développement de l'activité commerciale peuvent-ils justifier la disparition d'un patrimoine ancestral?