Face à la recrudescence de la violence, notamment contre ses partisans, le chef de l'opposition a décidé de se retirer du second tour de l'élection présidentielle. Morgan Tsvangirai, chef du Mouvement démocratique pour le changement, MDC, a annoncé dimanche, après une réunion de la direction de son parti, qu'il renonçait au deuxième tour de l'élection présidentielle prévue le 27 juin prochain. Ce retrait de la course à la présidence change la donne au Zimbabwe et ouvre, certes, la voie à une réélection automatique de Robert Mugabe - qui s'estime investi d'un «pouvoir de droit divin» - à la tête de l'Etat. Ce retrait enlève en fait à cette «réélection» toute signification politique. La force et l'intimidation auront ainsi infléchi le cours normal d'une élection dans laquelle le peuple zimbabwéen sera privé de son droit constitutionnel de choisir entre les deux candidats à la magistrature suprême du pays. Après la réunion de la direction du parti, le chef du MDC, Morgan Tsvangirai a indiqué à la presse, qu'il renonçait à briguer la présidence de l'Etat déclarant: «Nous cessons de participer à ce qui est une parodie de processus électoral, entaché de violence et illégitime.» Le MDC «ne peut pas demander aux électeurs de risquer leur vie en votant le 27 juin», a encore dit M.Tsvangirai.Selon le chef du Mouvement démocratique pour le changement, «200.000 personnes ont été déplacées, plus de 86 partisans du MDC tués, plus de 20.000 maisons brûlées et plus de 10.000 personnes blessées dans une orgie de violence». La première réaction locale est venue du gouvernement zimbabwéen qui, par un communiqué du ministre adjoint de l'Information, Bright Matonga appelle M.Tsvangirai à «réfléchir à deux fois» indiquant, «ce serait regrettable que Tsvangirai décide effectivement de se retirer de cette élection. Je l'appelle, lui et son parti, à réfléchir à deux fois et à prendre part à ce processus démocratique». M Matonga ajoute: «Ce ne serait pas bon pour les habitants du Zimbabwe, ni pour ce pays». En fait, face aux intimidations des partisans de M.Mugabe et des brimades de la police contre l'opposition, les conditions ne semblaient plus réunies pour un scrutin transparent et loyal. De fait, en excluant dans une de ses interventions de campagne le fait que le pouvoir puisse changer par la voie des urnes, le président sortant Robert Mugabe a, de lui-même, plombé une élection devenue soudain sans objet. M.Mugabe a même agité la menace de la guerre civile en cas de victoire du candidat de l'opposition, arrivé en tête le 19 mars lors du premier tour de la présidentielle devant le chef de l'Etat sortant. De fait, la violence est devenue un élément majeur de la campagne de Robert Mugabe. Cité par le quotidien d'Etat The Herald de samedi, le président sortant a affirmé «Ils ont dit (les dirigeants de l'opposition) que leurs partisans étaient battus par nos soldats» et d'ajouter, «ils disent cela pour pouvoir ensuite déclarer que les élections ne sont ni libres ni équitables. Ce qui est un vrai mensonge», alors même que M.Mugabe s'estime investi «d'un pouvoir divin». Ce qui, effectivement, ne laisse pas de place à d'autres alternatives de pouvoir. Hier, la communauté internationale, tout en regrettant le retrait de M.Tsvangirai, a fait part de sa préoccupation, à l'instar du président de la Commission de l'UA, Jean Ping, et du secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon. M.Ping, dans un communiqué publié à Addis Abeba, siège de l'IA, a affirmé: «Ce développement et l'augmentation des actes de violence pendant la campagne pour le second tour de l'élection présidentielle constituent un sujet de grave inquiétude pour la Commission de l'UA.» M.Ping se limite, toutefois, à inciter les deux parties à la retenue et demande «à toutes les parties zimbabwéennes de travailler ensemble pour surmonter les défis que connaît leur pays dans cette phase cruciale de son histoire». Pour sa part, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a estimé que le retrait du chef de l'opposition du Zimbabwe à l'élection présidentielle, Morgan Tsvangirai, était un «épisode très déprimant» et un «mauvais présage» pour l'avenir du pays. Réagissant, Washington indique dans un communiqué de la Maison-Blanche: «Le régime de Mugabe renforce chaque jour son illégitimité. Les actes de violence absurdes contre l'opposition et les superviseurs de l'élection doivent cesser». Par ailleurs, la porte-parole de la Maison-Blanche, Carlton Carroll, indique que «Les Etats-Unis se préparent à aller devant le Conseil de sécurité en début de semaine pour examiner les mesures supplémentaires qui doivent être prises. Mugabe ne peut être autorisé à réprimer infiniment le peuple zimbabwéen». Le Zimbabwe semble mal parti et s'enfonce dans une crise qui ne sert pas le peuple zimbabwéen.