Comme un général de guerre, il a gagné ses galons sur le terrain. L'architecte de la stratégie du développement rural durable (Sdrd), tient à son projet comme à la prunelle de ses yeux pétillants qui sortent d'une tête complètement dégarnie. Un projet qui lui tient à coeur, le coeur sur la main et la main tendue au monde rural. C'est le début de la victoire du monde rural qui vient de récupérer son fils prodige. Le nouveau ministre de l'Agriculture et du Développement rural, le Dr Rachid Benaïssa, a vadrouillé pendant plus de 35 ans dans ce monde inerte avec les aléas du monde vivant. Il se roule dans cet espace comme on se roule sur l'herbe un jour de printemps, butte sur un tas de fumier qu'il refuse de voir en se hissant dessus pour humer les roses. Ceux qui connaissent le nouveau ministre de l'Agriculture savent qu'il maîtrise parfaitement son sujet pour avoir bâti, à partir du néant, une stratégie qui séduit les spécialistes les plus brillants et les politiques les plus aguerris. Le Président Bouteflika a été séduit par le travail remarquable de M.Benaïssa, déjà en 2006, lors de la rencontre gouvernement-walis. Rachid Benaïssa a beaucoup de défauts et un nombre intéressant de qualités. Son principal défaut c'est qu'il agace son entourage avec sa stratégie de développement rural. «Alors! l'autre (le Dr Rachid Benaïssa Ndlr), il a programmé quelque chose ce samedi?» s'interrogent, chaque mercredi soir, ses proches collaborateurs. Ils savent que les programmes de samedi c'est 4 heures du matin. Et puis, ce n'est pas pour aller dans une salle de conférences d'un hôtel mais c'est pour des rencontres en rase campagne où attendent des personnes qui n'ont jamais vu un représentant de l'Etat. C'est-à-dire des personnes qui ont des choses à dire, qu'il faut écouter et surtout convaincre. Sa principale qualité, c'est qu'il a une grande capacité d'écoute. Il peut, le matin, écouter attentivement un fellah perdu dans un coin reculé du pays lui ressasser les malheurs qu'il subit dans le monde rural et le soir animer, sans transition, une conférence-débat devant les cadres de la nation à l'Ecole nationale d'administration. Il peut déceler l'idée géniale du rédacteur de presse qui l'accompagne dans les périples interminables et remettre en question par une lecture diagonale le rapport de 500 pages que vient de lui présenter l'expert de la Banque mondiale. Son projet s'adresse aux 13 millions que compte le monde rural, et autant d'idées. Rares, vraiment rares sont les ministres de la République qui peuvent se targuer d'une pareille prouesse et d'un pareil capital de proximité. Comme un général en guerre, c'est sur le terrain que le Dr Benaïssa a gagné ses galons de ministre et non dans les salons feutrés où se tiennent, à l'abri des indiscrétions, les conciliabules qui débutent à partir de minuit. La stratégie du développement rural durable (Sdrd) a été établie sur la base des expériences passées mais aussi un inventaire complet de l'état des zones rurales. La nouvelle stratégie de développement rural s'articule autour de l'amélioration des conditions de vie des populations rurales, de l'emploi, de la diversification des activités économiques, du renforcement de la cohésion sociale et territoriale, de la protection de l'environnement et de la valorisation des patrimoines ruraux. Ce n'est que de la théorie, diront les novices. C'est une révolution tranquille qui est en train de se mener, répondront d'autres. La Commission nationale du développement rural a récemment validé le Système d'aide à la décision pour le développement rural (Saddr) et le Projet de proximité de développement rural intégré (Ppdri) en tant que démarches et outils d'intégration des interventions sectorielles au niveau d'un territoire. Le fait est qu'aujourd'hui, M.Benaïssa est le seul ministre à avoir tissé un réseau informatique capable de suivre en temps réel l'avancement des projets. Ce n'est pas de la théorie, quand on sait que la quasi-totalité de nos ministères peinent à animer un site Web au moment où le monde respire les nouvelles technologies. Mais qu'importe, il faut un début à tout et le début des nouvelles technologies nous vient du monde rural. Quelle belle leçon à ceux qui confinent ces espaces en des images réductrices! Sur ce plan, il faut dire qu'avec toute la pudeur politique qui lui est connue, Rachid Benaïssa apparaît comme le trublion tranquille du système.