«Les victimes de violences font répercuter la violence à l'âge adulte. L'enfant abusé devient agresseur à son tour», a expliqué une psychologue. «Que diront mes camarades de classe si je reprends le chemin de l'école?», s'est interrogée Linda, une fille native d'Alger, victime d'une sauvage agression sexuelle de son...cousin. La nouvelle fait le tour du quartier, comme si un décès était annoncé. L'omerta est brisée: «Linda, à son 16e printemps, a été violée par Walid!», a-t-on appris lors de notre déplacement sur les lieux. Affalée, les yeux hagards scrutant le ciel, la belle fille de Bab El Oued ne sait plus à quel saint se vouer. Celui qui aurait pu être son futur époux, comme elle l'a toujours souhaité et n'a cessé de le voir dans ses rêves, a commis l'irréparable sur elle. Il l'a surprise, toute seule, dans un jardin familial où Linda aimait passer son temps au milieu des bouquets de fleurs odorantes. Esquissant un large sourire, Linda attend que son cousin lui fasse la fameuse déclaration d'amour pour être désormais sur un nuage et la plus heureuse des filles...de la planète. Ce prologue imaginé s'est transformé en drame. Walid, pourtant de nature réservée et timide comme en témoigne son entourage, se jette sur elle pour assouvir ses bas instincts. Depuis, il ne donne plus signe de vie. La douce et gentille fille que Linda a toujours été craint, quant à elle, que le regard du monde change envers elle. Le vocable «fille déshonorée?» Elle ne veut même pas en parler. Lasse, les yeux baissés, Linda veut s'abstraire du temps, fermer les paupières et dormir pour toujours. «Pourquoi a-t-il commis cet acte ignoble? Pourquoi toute cette sauvagerie à l'égard de celle qui l'estimait et qui lui vouait un grand respect. Que faire si demain je portais dans mon ventre un foetus né hors mariage...un bébé illégitime?», ne cesse-t-elle de répéter abattue. Gesticulant nerveusement, criant et pleurant, et demeurant prostrée, Linda a fini par accepter de dialoguer avec nous. Etre montrée du doigt la terrifie. «Désormais, je serai traitée de fille de rue...», lâche-t-elle en sanglots. En sus du regard d'autrui, que craint la fille de Bab El Oued? «Mon père, mon père, mon père...», crie-t-elle à tue-tête avant de se rendre précipitamment dans sa chambre. La revanche a eu lieu Le père, Ahmed, fonctionnaire dans une entreprise au Grand Sud, rejoindra sa famille dans une semaine, pour y rester un mois. «Il peut la tuer...», redoute la maman, la gorge nouée. Le quartier où habite Linda, connu pour son calme plat, risque de se transformer en arène de gladiateurs. Le moment redouté est venu. Le père Ahmed arrive à son domicile après un voyage de douze heures. Il était midi passé. A ce moment, il n'était au courant de rien. Ni de l'agresseur ni de sa fille violée, cloîtrée et ne voulant parler à personne. Certes, fatigué par le «périple» qui l'a conduit du fin fond du désert jusqu'aux étroites ruelles de Bab El Oued. A cet instant, les coeurs battent la chamade. La question: «Que fera ce père de famille, désormais montré du doigt», hante les esprits. Assistera-t-il sa fille en lui apportant tout le soutien psychologique dont elle a tant besoin afin d'oublier les souffrances qu'elle a vécues? Obligera-t-il son agresseur à l'épouser, comme le murmurent certains voisins rencontrés? Après une légère sieste, il s'est réveillé en sursaut. Les aiguilles de la montre indiquent 14 heures précises. Le pire est à venir. Le téléphone personnel d'Ahmed sonne, comme sonne le glas. Un appel inconnu, une voix qui ne lui était pas étrangère mais qu'il n'arrivait pas à reconnaître. «Es-tu au courant, toi l'étranger dans son pays, du viol subi par ta fille Linda?» «Quoi? Qui êtes-vous?»...et autant de questions sans réponse. Les explications fournies par son épouse ne lui ont pas été utiles. Les supplications de ses amis n'avaient qu'un effet éphémère. Car, au moment où les voisins ont cru à une éventuelle réconciliation, le «drame» est survenu. Ahmed prend son couteau et se dirige à toute allure vers le domicile de Walid. Le concerné étant absent, le père de Linda se venge sur le parent de l'agresseur, Aâmi Mouloud. Il le tue en lui assénant plusieurs coups de poignard dans le dos...et il file comme une comète. Un malheur, des regrets et des interrogations. «Je suis pour la peine de mort» «Je suis personnellement pour le rétablissement de la peine capitale pour les crimes majeurs, tels que le détournement de l'argent de l'Etat, les violences contre les enfants, les enlèvements et le trafic de drogues», a déclaré Ahmed Ouyahia, chef du gouvernement, lors de la conférence de presse qu'il a tenue au terme des travaux du 3e congrès ordinaire du RND. De 3 à 20 ans de prison Les articles 269, 270, 171 et 314 du Code pénal prévoient les peines variant entre 3 et 20 ans d'emprisonnement pour le cas de kidnapping suivi d'abus sexuels et la perpétuité pour le kidnapping suivi d'assassinat.