La musique l'a bercé depuis son enfance jusqu'à le subjuguer à jamais. La salle Aïssa Messaoudi de la Radio nationale a frémi, durant toute la soirée de mercredi, au rythme de la musique arabo-andalouse et du châabi à l'occasion d'un hommage rendu par la Radio nationale et retransmis en direct sur les ondes de la Chaîne 1, à Zerrouk Mokdad, le digne héritier de Dahmane Benachour et de Abdelkrim Dali. Référence par excellence dans ce genre musical. Soliste de l'Ensemble national, chef de l'orchestre de la Radio et dirigeant de l'Orchestre national de chaâbi. La soirée, à laquelle ont assisté, notamment de nombreux invités, des membres de la famille de l'artiste ainsi que ses amis de parcours, en l'occurrence Cheikh Nordine et Si Mustapha El Bahar. Issu d'une famille où l'éclat des hauts faits s'exprimait par son attachement aux valeurs traditionnelles, Zerrouk Mokdad, non sans inclination pour les décorums ancestraux, va lui-même perpétuer, car investi de la noble mission de promouvoir l'immense héritage de la musique arabo-andalouse, un art qui l'a bercé depuis son enfance jusqu'à le subjuguer à jamais. Référence incontournable dans la lignée des grands maîtres de la musique andalouse, Cheikh Zerrouk Mokdad est né à Blida dans une famille de mélomanes avertis. Il s'est imprégné, dès son jeune âge, des rudiments de la musique çanaâ et chaâbie. L'année 1964 marquera le début d'une longue carrière florissante par son inscription au conservatoire d'Alger dans la classe du regretté Abdelkrim Dali. Quelques mois plus tard, le jeune prodige au talent sûr adhère à l'association El-Djazaïria El-Mossilia côtoyant ainsi des personnages charismatiques de cette musique tels Abdelkrim Mehamsadji, Mohamed Bensemman, Zoubir Kakachi, Aziouz Hammachi, Omar Bensemman et Hamidou Djaïdir. Sa maîtrise du répertoire et de l'alto lui ouvre, en 1968, les portes de l'orchestre de la RTA dirigé par l'érudit Abderezzak Fakhardji qui vit en lui la relève sûre et légitime. La soif inextinguible de savoir et de connaissance l'amène à nouer, dès 1972, une relation de quasi filiation avec le maître du genre en la personne de Si Mustapha Bahar. Il sera nommé chef d'orchestre à la Radio algérienne en 1992 et ce, jusqu'à 2006, après dix-sept ans de contributions fécondes aux côtés de l'illustre Mustapha Skandrani. En 2003, le maître est nommé chef d'orchestre de l'ensemble régional de musique andalouse d'Alger avec lequel il effectuera plusieurs tournées régionales à l'instar de celles entreprises à la tête de l'ensemble national de chaâbi dont il assure la direction en succession au regretté Hadj Hachemi Guerrouabi. Cet inlassable travail de sauvegarde et vulgarisation de ce pan du patrimoine culturel national, Cheikh Zerrouk Mokdad le réalise à ce jour dans la plus parfaite des modesties. La soirée a débuté par l'orchestre national de musique, sous la direction de Abdelkader Razk Allah, qui a gratifié l'assistance d'une touchia dans le mode sika. Le chanteur Rachid Khali a subjugué le public, il a assuré en plus de sa voix rauque, une très belle interprétation, en imitant le grand maître, le défunt Hadj El Hachemi Guerrouabi, à l'occasion de la deuxième année de sa disparition à l'âge de 68 ans. Comme souvent dans ses chansons, l'artiste raconte des histoires, il nous monte des scénarios tragi-comiques. Rachid nous a proposé un bouquet de trois titres, de beaux textes de notre intarissable patrimoine culturel, mais aussi avec toute la finesse d'un parler très kasbadji, avec un mode musical lié à une sorte de nostalgie et de tristesse, mais associé à un ensemble d'expressions plus complexes qui varient considérablement selon la couleur, l'ambiance ou l'état d'esprit. Il termine, bien sûr, avec une certaine énergie, de la joie et de l'allégresse. Une manière de gratifier les deux maîtres. L'ambiance nostalgique s'est poursuivie avec Didine Karroum, ainsi avec l'invité d'honneur, qui n'est autre que Zerrouk Mokdad, installé en maître au milieu de l'orchestre avec son mandole pour offrir aux passionnés de cette musique populaire des extraits des grands chefs-d'oeuvre tirés des immortelles quassidate. Cette rencontre s'est terminée en beauté, avec la surprise, qui fut l'apparition sur scène de sa fille Kenza, qui veut suivre le chemin de son père et dont l'héritage du timbre de la voix et de la méthode d'interprétation demeurent confirmés. En marge de cet hommage, une pieuse pensée a été rendue à tous les artistes qui ont contribué à représenter dignement notre pays.