Quatre journées d'intenses négociations, ont culminé lors de tractations entre sept grandes puissances qui représentent 80% du commerce mondial. Le risque d'un échec se profilait hier à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), où aucune percée ne se dessinait entre Nord et Sud au cinquième jour de négociations ministérielles sur l'avenir des échanges mondiaux. «Les prochaines heures seront décisives. Nous sommes à un moment crucial où tout peut basculer entre échec et réussite», a averti le directeur général de l'OMC, Pascal Lamy, en s'adressant aux 153 pays membres de l'OMC. Quatre journées d'intenses négociations, qui ont culminé lors de tractations entre sept grandes puissances qui représentent 80% du commerce mondial (Australie, Brésil, Chine, Etats-Unis, Inde, Japon, UE), n'ont permis de dégager que «quelques points de convergence», a reconnu M.Lamy, déplorant des progrès «affreusement lents». Le patron de l'OMC, qui s'est à nouveau enfermé hier (en milieu de matinée) avec les sept principaux acteurs de la négociation, a appelé les participants à réagir «non pas dans une semaine, non pas dans un mois, mais dans les prochaines heures». Pascal Lamy a convoqué les ministres cette semaine à Genève dans l'espoir de susciter enfin un accord sur l'agriculture et les produits industriels, les deux points au coeur du cycle de négociations de Doha, lancé fin 2001 dans la capitale du Qatar. Un échec cette semaine risquerait de signifier un long report, voire un abandon définitif, du cycle qui aurait déjà dû aboutir à la fin de 2004. Mais aucune percée ne s'est encore dessinée entre les pays en développement, qui veulent le démantèlement des politiques agricoles des pays riches, et ces derniers qui demandent en échange aux pays émergents d'abaisser leurs droits de douane sur les produits industriels. «Rien n'a vraiment bougé. Le grand point d'interrogation, c'est l'Inde», a déclaré un fonctionnaire européen, sous couvert de l'anonymat. «On se demande si les Indiens veulent vraiment conclure le cycle». A son arrivée au siège de l'OMC, le commissaire européen au Commerce, Peter Mandelson, a souligné que «si certains négociateurs ne font preuve d'aucune souplesse, l'ensemble de la négociation est prise en otage». «Le risque d'un blocage et d'un échec est très réel», a-t-il observé sur son blog. Une scission semblait se dessiner dans le camp des pays en développement, dont plusieurs ont contesté la position de l'Inde et du Brésil, qui mènent le combat au nom du Sud dans les discussions à sept. «Défendre nos lignes rouges jusqu'au bout entraînera l'échec des négociations», a averti jeudi soir le ministre du Commerce du Costa Rica, Marco Vinicio Ruiz. «Ne sortez pas de cette pièce en justifiant vos décisions au nom de l'intérêt supérieur des autres pays en développement». Dans l'oeil du cyclone, le ministre indien du Commerce, Kamal Nath, a assuré que son pays faisait preuve de souplesse dans la négociation. «Mais ce que je ne peux accepter ni négocier, ce sont les moyens de subsistance des paysans indiens» a-t-il lancé. Selon des sources diplomatiques, la Colombie, soutenue par le Pérou et le Chili, a demandé à M.Lamy de soumettre aux pays membres un projet d'accord afin de sortir de l'impasse. M.Lamy a rejeté cette possibilité, contestée par d'autres pays comme Cuba, la Bolivie et le Venezuela, selon la même source. Si les positions n'évoluent pas dans les toutes prochaines heures, «l'accord que vous êtes tous venus chercher n'aura pas lieu, avec toutes les conséquences que cela comporte», a averti M.Lamy.