Chose inexistante par le passé, «la personne fautive aura le droit de garantie de défense», précise Noureddine Benissad, avocat et secrétaire général de la Laddh. La Gendarmerie nationale et la police ne pourront plus retirer le permis au conducteur ayant commis une infraction quelconque. Cette prérogative reviendra désormais aux cours de justice et aux juges d'instruction. C'est, entre autres, l'une des décisions importantes que contient le nouveau projet de loi portant circulation routière. Ce projet sera présenté aux deux chambres du Parlement au mois de septembre prochain. «Car l'actuel Code de la route contient plusieurs contradictions notamment avec la Constitution. La prérogative du retrait immédiat du permis de conduire suite à une infraction, sera une décision principale des cours de justice et des juges d'instruction», lit-on dans le nouveau projet de loi. Cette mesure prise pour palier les lacunes de l'actuel Code de la route en vigueur depuis le 10 novembre 2004, a été saluée par l'ensemble des magistrats. Contacté hier par L'Expression, Noureddine Benissad, avocat et secrétaire général de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (Laddh), a estimé que «c'est une bonne chose pour assurer plus de sécurité.» Paradoxalement à ce constat positif, l'avocat contacté par nos soins a tiré à boulets rouges sur les abus dont ont «fait preuve certains agents de l'ordre.» S'agissant toujours de la décision contenue dans le nouveau projet de loi, le responsable de la Laddh ajoute que la personne fautive peut se défendre toute seule ou en recourant à un avocat, contrairement au passé, «cette personne aura le droit de garantie de défense», poursuit notre vis à vis dans son jargon juridique. Estimant, d'autre part, que la nouvelle décision a tardé à voir le jour, Me Benissad espère que cette fois-ci, «ça va rentrer rapidement dans l'ordre.» Cette décision que les juristes défendent bec et ongles, n'a pas été rejetée par les responsables de la Gendarmerie nationale. Contacté par téléphone, le commandant Abdelhamid Kerroud, responsable de la cellule de communication de la Gendarmerie nationale, a déclaré que «la gendarmerie n'est qu'un auxiliaire de la justice.» En guise d'arguments, il enchaîne que les brigadiers verts «appliquent la loi en vigueur, ils ne la discutent pas.» Si des changements auront lieu à partir du mois de septembre prochain, notre interlocuteur estime que «la Gendarmerie nationale ne fera qu'exécuter.» Chiffres effarants et nouvelles décisions Ainsi, la Gendarmerie nationale et la police, deux corps qui ont redoublé d'efforts pour que cesse cette hécatombe routière, seront privées de la prérogative du retrait du permis. Par le passé, chaque semaine les services de la gendarmerie annoncent le retrait de milliers de permis de conduire. Les statistiques confirment que la moyenne quotidienne frôle les 250 retraits. Si les statistiques sont en perpétuelle hausse, c'est parce que le nombre des accidents est aussi alarmant. Pour illustrer ce constat, il suffit de traduire cette réalité amère en termes de chiffres et de voir où l'Algérie se positionne. Au fait, elle est classée au 4e rang mondial en termes de mortalité routière. L'année 2007, à elle seule, a connu la mort de 4000 individus qui ont péri sur nos routes. Soit, 13 morts sont enregistrés chaque jour. S'agissant des autres décisions incluses dans le nouveau projet de loi portant sécurité routière, l'on cite la volonté de l'Etat à instaurer le permis à points, appliqué par les pays voisins à l'image du Maroc et de la Tunisie. Ce permis contient, comme le stipule ce nouveau projet, 20 points. A la suite de chaque infraction routière, le conducteur voit le nombre de ses points fléchir. Une fois la totalité consommée, il se retrouve face à une situation compliquée. «Le conducteur se verra retirer son permis pour une année et il lui sera strictement interdit de conduire durant cette période», peut-on lire dans le projet de loi. Cependant, le chauffard a la possibilité de récupérer ses points via le paiement d'une amende de 2000 dinars. Cette nouvelle décision, faut-il le préciser, a été suggérée par une commission spécialisée du transport au niveau du Parlement. Ainsi, cette option remplacera le retrait direct du permis. Qu'en est-il de la récupération du précieux document qu'est le permis, le conducteur fautif doit présenter sa candidature. «Il aura un nouveau permis», est écrit dans le projet sus cité. Quant aux frais du permis de conduire, les citoyens seront mis à rude épreuve. Actuellement à 8000 DA, le permis ne sera délivré qu' à 30.000 dinars. Cette hausse de tarification se veut comme une sanction aux conducteurs recensés comme la première cause de la mortalité routière. D'un simple excès de vitesse...à un dépassement dangereux, les conséquences sont les mêmes: ce sont des vies humaines qui périssent. Riche en propositions visant à circonscrire l'hémorragie routière, le nouveau projet de loi prévoit également la création des bureaux d'études concernant la signalisation, d'une part, comme il évoque, d'autre part, la nécessité de créer une école nationale qui veille à la formation continue des formateurs et inspecteurs. Le nouveau projet de loi peut-il, par son contenu, réduire la mortalité routière? Ou l'Algérie continuera-t-elle à donner une image d'un «élève apprenti» quand il s'agit de solutions et un leader en termes de classement macabre?