En cas de récession mondiale, le prix du baril de pétrole pourrait chuter jusqu'à 50 dollars. Un tel scénario obligerait le gouvernement à revoir sa copie. Ahmed Ouyahia et son équipe doivent être sur le qui-vive. Le premier partenaire économique de l'Algérie, la France, vient d'entrer dans une phase de récession qu'elle reconnaît à demi-mot. Il faut cependant regarder la vérité bien en face. Deux mois de croissance négative ont suffi pour mettre sérieusement de nombreux indicateurs de l'économie française dans le rouge. Le constructeur automobile Renault annonce des suppressions d'emploi massives: 6000 à travers l'Europe. L'Insee prévoit une perte de 52.000 emplois pour le 2e trimestre de l'année. Le taux de chômage passera de 7,2% à 7,4%. En Algérie, pour le moment, c'est motus et bouche cousue. Alors que la crise financière avait ébranlé toutes les économies mondiales, le gouverneur de la Banque d'Algérie était intervenu au cours d'une conférence de presse tenue au mois de septembre pour rassurer tout le monde: «L'Algérie est à l'abri. Elle aurait été touchée si elle n'avait pas anticipé le remboursement de sa dette en 2004», avait déclaré M.Laksaci. Mais voilà, lorsque la crise frappe à nos portes et touche nos voisins immédiats avec lesquels se pratique l'essentiel de nos échanges commerciaux, il est bien difficile de se voiler la face. Il ne s'agit plus de crier gare. Il faut agir. A la place, qu'entend le citoyen? Des ministres qui l'abreuvent de discours rassurants auxquels il ne prête même plus l'oreille. Le ministre du Travail croit dur comme fer à son projet de création de 400.000 postes d'emploi par an à partir de l'année prochaine alors que son collègue de la Solidarité nationale tente de défendre bec et ongles le chiffre très officiel de 11% de chômeurs. Il est vrai que si les statistiques sont aussi bien régulées que les marchés des fruits et légumes, alors toutes les enchères sont permises. Il est en effet bien difficile, dans la conjoncture actuelle des marchés pétroliers et de la parité du dollar face à la monnaie unique européenne, d'annoncer des lendemains qui chantent à l'économie algérienne, elle qui est tributaire à 98% de ses exportations en hydrocarbures et dont les recettes sont libellées en devises américaines. Certes, le billet vert a repris des couleurs, dopé certainement par le plan de sauvetage promulgué par le président des Etats-Unis et adopté par la Chambre des représentants. Le Trésor américain dispose désormais de 700 milliards de dollars pour juguler la sévère crise financière qui a conduit à la faillite de la quatrième banque américaine, Lehman Brothers. Le dollar a, quant à lui, redressé la tête puisqu'il a affiché ce week-end 1,38 pour un euro. Son meilleur score depuis une année, ce qui a provoqué par ailleurs une sérieuse érosion des prix du baril de l'or noir. Il est toutefois important de signaler qu'il y a presque une année, le baril de «Light sweet crude» avait établi un record historique. Le 1er novembre 2007, il avait franchi la barre des 96 dollars. 96,24 dollars était-il coté ce jour-là. Par rapport à son cours d'il y a 12 mois, il n'aura donc perdu qu'une petite poignée de dollars (2 à 3). Ce qui reste tout de même assez faible. L'hiver qui pointe le bout de son nez pourrait changer la donne en sa faveur. Le nord des Etats-Unis, une des régions les plus froides de la planète, est réputé être un très grand consommateur de fuel domestique. Le chef du gouvernement avait averti: un baril de pétrole à 50 dollars serait catastrophique pour l'économie algérienne. Les discours du chef de l'Etat lors de sa rencontre avec les maires et celui tenu en Conseil des ministres, a maintenant une meilleure lisibilité. «On va droit dans le mur», avait déclaré Abdelaziz Bouteflika pour mettre en garde, quelques jours plus tard, le gouvernement contre le gaspillage des deniers publics. Les prix de l'or noir sont menacés et le Trésor public peut se tarir. Le message sera-t-il entendu?