A l'instar des autres régions du pays, la capitale des Zianides n'est pas épargnée par les maux sociaux. La population de Tlemcen attend, avec un grand espoir, l'arrivée ce matin du président de la République. Cette visite de deux jours est perçue comme une bouffée d'oxygène pour la région. Le Président Bouteflika viendra avec de nombreux projets de développement local dans les mains. «Nous sommes très contents de la venue d'Erraïs (président) chez nous. Il nous attribuera des logements et du travail pour les jeunes», nous a déclaré un sexagénaire rencontré, hier, au centre-ville. Natif d'El-Mansoura, ce vieux commerçant de tissu nous fait part de sa crainte sur les jeunes. «Il n'y a plus de jeunes. Nos enfants sont tous partis ailleurs. Beaucoup d'entre eux sont morts en mer», a-t-il confié d'un air angoissé. Cet ancien maquisard affirme qu'il n'a jamais imaginé un jour voir les jeunes, à la fleur de l'âge, se lancer dans des aventures suicidaires pour fuir le pays. Observant un instant de silence, ce commerçant reprend son souffle et affirme: «Ce qui se passe est terrible.» Une autre mère de quatre enfants ne dissimule pas son angoisse quant à l'avenir de sa progéniture. «Je vis avec une terrible souffrance à cause de mon enfant aîné qui veut à tout prix partir», a-t-elle témoigné avec un regard perdu. Cette mère espère que le Président convaincra, par son discours, les jeunes à oublier la «harga» d'autant que la ville est connue pour être un centre de transit pour harraga. Des dizaines de personnes partent quotidiennement dans des embarcations de fortune à la recherche d'une vie décente. Dans les quartiers populaires à l'exemple du Mechouar, Kiffane de Sidi Boudghen, les jeunes ne rêvent que de départ à l'étranger. «Là-bas, c'est la belle vie!», nous dit un jeune âgé de 26 ans, rencontré au marché de Sidi Hamed, situé à quelques mètres de la wilaya. «Nous n'avons rien à faire ici, sans boulot, sans prise en charge, notre seul espoir c'est elharba», intervient de son côté, son ami. Rongé par le chômage, la malvie et le désarroi, les jeunes de Tlemcen ne songent qu'à tenter l'aventure. Malgré les opérations lancées contre les harraga, rien ne fait reculer les jeunes de Tlemcen. «C'est vrai que beaucoup de personnes ont été arrêtées, mais elles sont reparties et ont même réussi à s'installer en Espagne et en France», avouent les deux jeunes. Pour eux, c'est simple: récolter un peu d'argent pour partir rejoindre leurs amis. «Si vous avez 10 millions pour payer les gardes-côtes qui s'occupent du transfert, vous pouvez prendre la barque dès demain», ont avoué les deux jeunes. Interrogé sur la visite du Président dans la région, ces deux jeunes restent perplexes. «C'est une bonne chose, mais pour nous, ça ne changera rien», ont-ils dit. Et de renchérir: «On ne nous laissera même pas l'approcher pour lui parler de nos problèmes.» Ces derniers ne sont pas les seuls. D'autres jeunes, croisés sur le chemin, partagent le même avis. «Le Président va venir pour inaugurer des chantiers et inspecter les lieux et repartir après», nous a affirmé ce groupe de jeunes. «De toutes les façons, le problème du travail ne sera pas réglé. On chômera toujours», ont-ils ajouté. Ces jeunes, eux-aussi, sont captivés par l'étranger. «Ici, c'est devenu un projet-phare, la plupart des jeunes ne pensent qu'a prendre la tangente», a déclaré un vendeur de cigarettes. A peine 20 ans, ce jeune, chétif, n'a pas dissimulé son intention: «Je tente de gagner un peu d'argent à droite et à gauche pour atteindre la somme qu'il faut pour la traversée», a-t-il confié le sourire en coin. Ce petit vendeur fait quotidiennement le parcours du combattant pour ramasser quelques sous de plus. Lui et des dizaines de vendeurs à la sauvette sont guettés par les agents de l'ordre. A l'instar des autres régions du pays, la capitale des Zianides n'est pas épargnée par les maux sociaux. Chômage, pauvreté, harga sont les principaux problèmes auxquels sont confrontés les citoyens. Même si l'entrée de la ville donne l'image d'une ville développée, il n'en demeure pas moins que ceci n'est qu'une illusion. Les quartiers populaires dévoilent la face cachée de la ville des Zianides. La visite du Président Bouteflika va certainement lui donner un nouveau souffle. Le programme de visite s'annonce très chargé vu le nombre de projets socio-économiques et culturels qu'il aura à inaugurer ou à lancer. Parmi ces projets, on citera entre autres le plateau de Lalla Setti, le téléphérique, le pôle 2 de l'Uabt de Mansourah, les cités Eplf/LSP/sociaux, la nouvelle ville de Boudjmil, le CET de Saf-Saf, les lycées et collèges (Hennaya, Chetouane, Sebdou...), le Méchouar, le complexe culturel de Mansourah, l'aéroport Messali-Hadj de Zenata, les stations de dessalement d'eau de mer de Ghazaouet et Honaïne. Enfin, il y a lieu de souligner que le beau temps n'est pas au rendez-vous. La visite du Président Bouteflika s'annonce sous des auspices... pluvieux accompagnés de vent.