Le coup de semonce est parti de Béjaïa, suite à la suspension de quatre syndicalistes. Deux secrétaires nationaux se sont déplacés, ce week-end, d'Alger à la capitale des Hammadites pour faire, en toute apparence, d'une pierre deux coups: tenir la réunion de commission exécutive de wilaya et régler le problème des syndicalistes suspendus. Ils ont fait chou blanc sur toute la ligne. Le mouvement de protestation, qui est né depuis l'union locale d'Amizour, n'a non seulement pu être circonscrit, mais il a aussi été révélateur d'un certain malaise qui ne semble pas s'être apaisé depuis la tenue du XIe congrès. Des rumeurs persistantes laissent entendre que le nouveau numéro deux de la Centrale syndicale, le secrétaire national à l'organique, Maïza Hocine, et son collègue chargé de la formation, Benmouhoub El Hachemi, se seraient déplacés à Béjaïa sans l'aval du secrétaire général de l'Union générale des travailleurs algériens. Difficile d'y croire à première vue, tant que Abdelmadjid Sidi Saïd donnait l'impression de tenir solidement les rênes de la Centrale syndicale. Il reste qu'un élément pour le moins assez troublant est venu renforcer les détenteurs de cette information. Que s'est-il passé, en effet, pour que les deux responsables syndicaux aient quitté la Conférence internationale du BIT (Bureau international du travail) sur le travail décent, qui se tenait à Alger (les 7 et 8 octobre), conformément aux instructions de la déclaration de l'OIT (Organisation internationale du travail) de 1998, pour donner la priorité à ce qui se passait dans la capitale des Hammadites? Un questionnement entouré de la plus grande opacité qui aurait plutôt tendance à faire ressurgir les couacs, mais surtout les tractations qui ont suivi la clôture d'un XIe congrès qui aura pourtant vu le plébiscite de Abdelmadjid Sidi Saïd, qui a été triomphalement reconduit à la tête de la Centrale syndicale. Ce jour-là, on avait, cependant, pu constater combien l'union sacrée autour de l'inamovible secrétaire général était loin d'être acquise. Il devient même de plus en plus clair que le poste de secrétaire général adjoint a failli lui être imposé. Convoité par un jeune loup aux dents longues en la personne de Salah Djenouhat qui, pour de nombreux observateurs, était le dauphin tout désigné de l'actuel patron de l'Ugta, l'ex-numéro deux de la Centrale syndicale a fini par tout céder, le poste de secrétaire national à l'organique ainsi que celui de secrétaire général adjoint de l'Ugta, auquel il a certainement dû renoncer, la mort dans l'âme. Cet épisode, certainement le plus difficile à gérer du XIe congrès, a fait reculer l'élection du secrétaire national de plus de trois mois. Salah Djenouhat a été brillamment réélu au sein de la nouvelle équipe dirigeante, le 19 juillet, mais il est cependant beaucoup moins sous les feux de la rampe. Et c'est au moment où tout semble rentrer dans l'ordre que le groupuscule de «contestataires» du XIe congrès fait reparler de lui. Qualifié, à l'époque, de marginal, voire de négligeable, il ressemble, aujourd'hui, à un grain de sable qui peut gripper la redoutable machine Ugta qui s'apprête à apporter son soutien à un troisième mandat de Abdelaziz Bouteflika. Un événement de taille pour reconstruire une union sacrée autour de Sidi Saïd et permettre à l'Ugta de résoudre ses crises cycliques internes.