Ils risquent même d'être privés très bientôt d'images du championnat de football de leur pays. Les Algériens n'ont pas eu droit, samedi soir, à la retransmission, par la Télévision, du match de football Libéria-Algérie. Un match, pourtant, d'une importance capitale, puisque décisif pour le passage à l'ultime tour des qualifications au Mondial et à la CAN de 2010. Ceux qui voulaient voir ce match en direct devaient se brancher sur la chaîne arabe ART, détentrice des droits de retransmission des matches éliminatoires sur le continent africain. En 2008, à l'heure de la fibre optique et au moment où des matchs sont reçus en direct sur téléphone portable, les Algériens en sont, toujours, réduits à suivre les péripéties de leur équipe nationale de football sur les ondes de la Radio. Il est trop facile de s'en prendre aux organisateurs des tournois de football, pour leur reprocher de vendre leurs produits au plus offrant. Aujourd'hui, le sport est une très grosse affaire de business dans laquelle sont brassés des centaines de milliards de centimes et la Fifa, tout comme la CAF, y trouvent leur compte. Elles ont deux produits, la Coupe du monde et la CAN, dont elles mettent les droits de retransmission télévisuelle sur le marché. L'argent qui en est récolté est réparti entre toutes les Fédérations affiliées à ces deux institutions. Pour ce qui est du match de samedi entre le Libéria et l'Algérie, il était assuré qu'il aurait battu des records d'audience s'il était passé sur le petit écran algérien. L'Entv en aurait tiré d'énormes dividendes, grâce au jeu des plages publicitaires dont les 30 secondes auraient pu être monnayées au prix fort. Chacun voit, cependant, les choses à sa manière et nous n'avons pas la prétention de donner des leçons de marketing aux gens de la télévision algérienne. On ne regrettera qu'une seule chose, c'est que le match Libéria-Algérie n'ait pas pu être diffusé par notre télévision. Personne n'osera nous contester une telle réaction. Elle devrait, d'ailleurs, être la même pour tous les sportifs algériens qui se comptent par millions. Il faut savoir que ART détient les droits de retransmission TV, pour le continent africain, de la Coupe du monde de football de 2010 et de 2014, ceux de la CAN-2010, ceux de la Ligue des champions africaine, ceux de la Coupe de la CAF et ceux de la Ligue des champions arabe. C'est une chaîne qui joue le jeu de la concurrence. Il ne sert, donc, à rien de la critiquer. Celui qui veut les droits n'a qu'à en faire autant. La chaîne française France 2 avait obtenu les droits pour la retransmission des derniers Jeux olympiques de Pékin en sachant qu'elle prenait un risque puisque la plupart des événements se déroulaient au milieu de la nuit en France. C'est dire que l'audimat, à ce moment là, était à son plus bas niveau. Mais France 2 a un cahier des charges qui en fait un service public et sur ce plan, cette chaîne se devait de mettre de côté le problème de l'audimat. C'est la notion de service public que l'Entv a, peut-être, oublié en ne diffusant pas Libéria-Algérie. On se rappelle qu'en 2006, pour la Coupe du monde qui s'était déroulée en Allemagne, il avait fallu l'intervention, au dernier moment, de l'Etat, pour que le téléspectateur algérien puisse suivre, en direct sur son petit écran, ce grand spectacle planétaire. A cette occasion, l'Etat avait acheté des milliers de cartes, d'une périodicité d'un mois chacune, auprès de ART qu'il avait revendu, à travers tous les bureaux de poste du pays, au prix de 1000 dinars pièce. Si rien n'est fait entre-temps, ce scénario a de fortes chances d'être réédité pour le Mondial de 2010. Imaginez, un peu, dans quelle situation se retrouveraient les Algériens s'ils venaient à apprendre qu'ils ne pourront pas suivre en direct cette Coupe du monde dans laquelle participerait leur équipe nationale ou même la CAN de 2010 en Angola pour laquelle, maintenant, les Verts ont de fortes chances de se qualifier. Ces mêmes Algériens ne peuvent même pas se permettre de suivre leur unique représentant en Coupe de la CAF, la JS Kabylie. Cette dernière va jouer un match capital, samedi prochain, à Sousse qui ne sera pas retransmis en direct par l'Entv. Celle-ci a des droits partiels pour la retransmission des matches de la JSK, à savoir seulement pour les matchs à domicile qui doivent passer sur la chaîne terrestre. Les autres matches du club algérien, ceux qu'il joue hors du territoire national, ne peuvent être vus que sur ART. Et si la JSK passe en finale, le même scénario nous sera proposé. Pour ce qui est de la Coupe arabe des clubs, un différend avait opposé l'Entv à ART puisque la Télévision nationale avait montré, en direct, la dernière finale retour de cette compétition, entre l'ES Sétif et le WA Casablanca, qui s'était déroulée à Blida, sans accord du groupe de télévisions arabe. ART avait déposé une réclamation auprès de l'Union arabe de football, organisatrice de la compétition, et retenu la somme de 500.000 dollars sur la prime que devait recevoir le club sétifien. Ce dernier avait, bien entendu, défendu sa cause auprès de l'Entv et celle-ci avait bien été obligée de lui restituer les 500.000 dollars retenus par ART. Il reste, maintenant, à l'Union arabe de football de réunir sa commission de discipline pour qu'elle se prononce sur la plainte de ART et selon des informations dignes de foi, l'Algérie pourrait être privée, pour les deux ou trois années à venir, d'une finale retour de Coupe arabe. Il faut savoir que ART a même des droits sur les matches du championnat algérien. Que de fois, cette chaîne a passé, en direct, des matches de cette compétition, qui ne passaient qu'en différé sur l'Entv? Depuis le début de cette saison, ART ne passe plus de matches du championnat algérien en direct. Nos investigations nous ont révélé que la FAF, propriétaire des droits de retransmission de ce championnat, recevait la somme de 40 millions de dinars par an de la part de l'Entv et autant de la part de ART. Cette dernière sous-traitait, par la suite avec la télévision algérienne, pour la production. On apprend, ainsi, que ART versait 7000 dollars par match à l'Entv. Cette saison, l'information nouvelle est que les clubs de football veulent plus que les 8 millions de dinars qu'ils recevaient chacun comme droits de télévision. Ils souhaitent voir ce chiffre s'élever à un plus de 20 millions de dinars par club. La FAF a, quant à elle, fait une estimation, selon laquelle le championnat d'Algérie ne peut pas être cédé en deçà d'une somme de 240 millions de dinars. Il semblerait que ART aurait versé quelque chose comme 160 millions de dinars mais se heurterait au refus de l'Entv qui reprocherait à la FAF, selon une source proche de celle-ci, de ne pas lui avoir vendu le droit exclusif de retransmission des rencontres du championnat d'Algérie de football. Une Entv qui aurait revu à la hausse sa participation financière, la portant à 80 millions de dinars. Ce qui n'a pas été du goût des présidents de clubs qui ne cachent pas leur intention de refuser l'accès des caméras dans leurs stades respectifs lors des prochaines journées de championnat et cela, avec l'accord de la Fédération. Après leur équipe nationale, les Algériens pourraient bien être privés des images de leur championnat, très bientôt. Une perspective qui pourrait faire parler d'elle.