Exsangue, laminée, meurtrie par une protesta longue et sanglante, cette région a renoué ces jours-ci avec la violence. La violence et l'émeute sont de retour dans la wilaya de Tizi Ouzou. A J-4 du rendez-vous électoral, la situation déjà délétère s'est sensiblement détériorée, notamment dans les daïras de Makouda, de Tizi Rached et de Maâtkas. Quant à Irdjen et à Ouacif, qui ont connu d'importantes échauffourées, un calme précaire est observé. C'est donc, à la suite du déploiement d'importants renforts d'URS, dont apparemment la tâche principale assignée est de «sécuriser» les sièges de daïra, qui sont ciblés par des sit-in populaires, pour empêcher, du moins gêner les élections, que ces renforts ont été dépêchés. Ainsi, à Makouda, c'est au petit matin d'hier et à la vue de ces renforts, considérés comme «une provocation» que la population, aussitôt alertée, s'est rendue en masse vers la daïra. Les échanges d'«amabilités» ont commencé. Durant toute la nuit de samedi et hier, les bombes lacrymogènes, les pierres et les cocktails Molotov se sont «généreusement» échangés. Rendus pratiquement furieux, les manifestants ont bloqué la RN 72, menant vers Tigzirt et traversant Makouda. Le relief a également été à l'avantage des émeutiers qui ont pratiquement «bombardé» les URS à coups de pierres et de cocktails Molotov. Hier à la mi-journée, on signalait deux blessés parmi les URS, l'un touché par un cocktail Molotov, l'autre par une pierre. Au moment où nous mettons sous presse, l'émeute bat son plein. Le même spectacle de fureur est visible aussi bien à Tizi Rached qu'à Maâtkas. Comme à Makouda où la population se sentant «excédée» par ces renforts a entrepris de harceler la daïra. Dans ces trois endroits, l'émeute éclate. Et fait remarquable, c'est toute la population qui s'y est mise ! A Maâtkas, l'on s'attend à ce que la journée d'aujourd'hui soit encore plus chaude! Par ailleurs, on apprend qu'à Mizrana, ce sont les femmes qui ont décidé de fermer l'APC. Alors qu'au niveau du chef-lieu de daïra, Tigzirt, la coordination de la daïra appelle pour aujourd'hui à une grève que ponctuera un sit-in, devant le siège de la daïra. On s'attend, là aussi, à des dérapages. Du côté de Ouacif, un calme précaire règne depuis deux jours, mais la peur est toujours là. Dans la région, les écoles, les collèges et les lycées sont fermés depuis le début de la semaine. Jusqu'à hier, la ville était encore sous une chape d'angoisse. Les jeunes guettant anxieusement les rues de la ville. Pour eux, «les CNS sont à la recherche de jeunes pour les passer à tabac!». Un autre jeune, Ramdane, raconte que les 6 personnes interpellées et relâchées, ont «subi des sévices!». Malgré cela, tous affirment: «Si le chef de daïra ne quitte pas Ouacif avec les URS, les choses se gâteront...». En début d'après-midi d'hier les daïras de Boghni et de Bouzeguène ainsi que la commune d'Irdjen, ont connu, elles aussi, de violentes échauffourées. A Boghni, la ville avait, dès le matin, respecté une grève générale et la tension ne cessait de monter. Pour aujourd'hui, le FFS a appelé aussi bien à Tizi Ouzou qu'à Béjaïa à une grève générale et, le même parti organise, toujours aujourd'hui, une marche à Tizi Ouzou. Ainsi, la semaine s'annonce, pour le moins, chaude en Kabylie. Les élections, dans cette atmosphère, apparaissent comme une vue de l'esprit.