Les manifestants antigouvernementaux en Thaïlande s´organisaient hier pour tenir le siège des deux aéroports de Bangkok où les tensions se sont brusquement accrues avec la police dont ils ont bravé les sommations. Les Etats-Unis et l´Union européenne ont demandé aux opposants d´évacuer pacifiquement et sans tarder les aéroports, dont l´occupation a sérieusement perturbé le trafic aérien international et bloqué plus de 100.000 passagers en Thaïlande. La tension est montée tôt hier près de l´aéroport international Suvarnabhumi où des manifestants ultra-royalistes de «l´Alliance du peuple pour la démocratie» (PAD) ont érigé des barricades à l´aide de barbelés et de pneus. Dans la matinée, des centaines d´opposants, qui cherchaient à rejoindre leurs camarades dans l´aéroport, ont réussi à forcer un barrage et, dans la confusion, un officier de police a été pris en otage, selon la PAD, avant d´être libéré, selon des témoins. La télévision a diffusé des images de clubs de golf et de machettes saisis, semble-t-il, dans des véhicules. Une infirmerie de fortune a également été dressée alors que munitions de bouche et boissons étaient stockées pour tenir le siège, auquel participent des enfants. Les opposants ont rejeté toute négociation et exigent comme préalable, à la fin de leur action, la démission du Premier ministre Somchai Wongsawat. Le fondateur de la PAD, Sondhi Limthongkul, a demandé à ses partisans, très organisés et pour certains, armés, de ne pas bouger. «Je suis prêt à mourir au nom de ce combat pour la dignité», a-t-il affirmé sur la chaîne de télévision par satellite ASTV, qu´il possède. Selon une estimation policière, tôt hier matin, 3000 protestataires se trouvaient à Suvarnabhumi, environ un millier à Don Mueang (vols intérieurs) et 700 au siège du gouvernement à Bangkok, occupé depuis le 26 août. Les opposants ont, jusqu´ici, ignoré les sommations policières qui leur ont été signifiées formellement et à l´issue desquelles les forces de sécurité peuvent recourir à la force. Les manifestants de la PAD ont juré de faire tomber le Premier ministre élu qu´ils qualifient de «tyran corrompu». Ils l´accusent surtout d´être «l´homme de paille» de l´ex-Premier ministre en exil Thaksin Shinawatra qui n´est autre que son beau-frère. C´est justement depuis l´exil que M.Thaskin, encore très populaire auprès des masses rurales du nord, a mis en garde contre une explosion de violences dans le cas d´un nouveau putsch militaire comme celui qui l´avait renversé en 2006. «S´il y avait un coup d´Etat, il y aurait des violences. Ce ne serait pas un putsch facile, comme par le passé, parce que la population en Thaïlande subit maintenant des épreuves», a-t-il dit dans un entretien avec le blogueur et journaliste américain Thomas Crampton. M.Thaksin, qui se trouvait à Hong Kong, a accusé «certains» responsables de l´armée de ne pas respecter les résultats des législatives de décembre 2007, largement remportées par ses lieutenants et qui avaient mis fin à quinze mois d´administration militaire. Un dirigeant pro-gouvernemental a appelé à une vaste contre-manifestation aujourd'hui à proximité du siège du gouvernement, faisant craindre des heurts majeurs. Le chef de l´armée, le général Anupong Paojinda, a fait savoir cette semaine qu´il était opposé au recours à la force contre la PAD et de vives tensions ont été signalées entre lui et M.Somchai, actuellement à Chiang Mai (800km au nord de Bangkok). La PAD mène depuis des mois des actions de harcèlement contre le pouvoir mais la plus spectaculaire a été l´occupation, cette semaine, des deux aéroports de Bangkok, piégeant des dizaines de milliers de touristes en Thaïlande et entraînant des pertes financières astronomiques.