Le procès du colonel Mohamed Chabani a duré plus de 15 heures. Il a été exécuté à 4 heures du matin, soit une heure après la prononciation du verdict. Au moment où les débats sur l'abolition de la peine de mort enflent, l'affaire de la première exécution de l'Algérie indépendante refait surface, ces deniers jours. Ignorée jusque-là, l'affaire de l'exécution du colonel Mohamed Chabani revient avec plus de consistance. Depuis la sortie de l'ancien président Chadli Bendjedid qui a imputé ce crime au premier président de l'Algérie indépendante, Ahmed Ben Bella, beaucoup a été dit sur la question. Et cette fois, ce sont les moudjahidine et les fils de chahid qui veulent intenter une action en justice contre Ahmed Ben Bella. Cela étant, on croit savoir qu'un groupe de moudjahidine et de fils de chahid, issus des six Wilayas historiques, ont décidé de lancer une pétition pour collecte de signatures en vue de poursuivre en justice Ben Bella pour avoir commandité l'assassinat du colonel Chabani. Les instigateurs de cette action sont l'ex-sécretaire général de la Coordination nationale des enfants de chouhada, Ahmed Ben Saïd, et Amar Mellah, fils du colonel chahid Ali Mellah. Selon Ben Saïd, cette action intervient après le témoignage de Chadli sur l'affaire. Ce qui représente pour lui une preuve immatérielle de l'implication directe de Ben Bella dans l'exécution du «combattant». Le 27 novembre dernier à El Tarf, Chadli Bendjedid a, rappelons-le, mis le feu aux poudres en accusant ouvertement Ahmed Ben Bella d'être le commanditaire de «l'assassinat» du colonel Chabani. «Ben Bella a exigé du tribunal en charge du dossier, la condamnation à mort de Chabani», a déclaré l'ancien président de la République. Chadli a expliqué également que lui et les autres membres du jury n'étaient pas convaincus de la justesse du verdict et ils comptaient intercéder auprès de Ben Bella pour commuer la peine de mort en un emprisonnement. Et à Chadli d'ajouter: «Nous avons tout fait pour que le président (Ben Bella) revienne sur sa décision de l'exécuter et nous n'avons pas compris l'acharnement et l'empressement pour le mettre à mort.» Et le colonel était mis à mort. L'action de Ben Saïd et Amar Mellah sera suivie, selon toute vraisemblance, de l'action des «copains de cellule» encore en vie, de M.Chabani. Il s'agit notamment de Saïd Abadou, sécretaire général de l'Organisation nationale des moudjahidine et les moudjahidine Hocine Sassi et Omar Sakhri. Aussi, les initiateurs de cette action comptent sur les témoignages de ceux qui ont condamné à la peine capitale le colonel, qui sont encore en vie et à leur tête Chadli Bendjedid, qui était alors membre du tribunal. De par sa complexité, il serait aujourd'hui, faut t-il le souligner, vain d'aborder le sujet de la peine de mort sans évoquer cette scabreuse affaire et d'autres encore qui ont marqué l'histoire récente du pays. Les juristes ne ratent aucune occasion de la citer en exemple pour défendre leur thèse sur la nécessité d'abolir ce châtiment. Ceux qui étaient présents dans la salle de conférences de l'APN, il y a quelques jours pour débattre de la question, l'ont évoquée plus de dix fois. Pour l'histoire, il convient de dire que le colonel Mohamed Chabani, originaire de Biskra, a été exécuté le 04 septembre 1964 vers 4h00 du matin dans la prison de Sidi El Houari à Oran (Canastel) après que la cour martiale eut rendu son verdict. Son procès étant commencé vers midi du 3 septembre et le verdict était prononcé à 3 heures du matin du 4 septembre. Il était accusé alors de tentative de sécession par Ahmed Ben Bella, d'entreprendre des relations suspectes avec la France et de vouloir s'emparer du pétrole du Sud, des accusations réfutées en bloc par ses anciens compagnons d'armes.