Le cheikh égyptien s'est exprimé quant au rejet de tout fanatisme ou intolérance au nom de l'Islam, évitant soigneusement une confrontation directe avec les «djihadistes» Evénement d'importance, s'il en est, la présence du cheikh Sayed Tantaoui, doyen d'El-Azhar, et «représentant officiel» de l'Islam sunnite, n'a pas manqué de faire déborder la rencontre de la semaine nationale du Coran de son cadre pour la faire s'articuler autour du djihad et de l'ijtihad, deux thèmes centraux dans la réflexion islamiste moderne. Dans son discours d'introduction aux travaux des ouléma, le Président n'a pas manqué de fustiger ceux qui, au nom de l'Islam, ont adopté des conceptions étriquées et réductrices de la vision universelle de la religion, et ceux qui ont fait de l'Islam une sorte de terrorisme global. Reçu par le Président Bouteflika, par le Chef du gouvernement puis par le ministre des Affaires étrangères, Belkhadem, Sayed Tantaoui était la grande caution intellectuelle et théologique conte l'islamisme, le terrorisme et les groupes armés réunis. Le cheikh égyptien s'est exprimé quant au rejet de tout fanatisme ou intolérance au nom de l'Islam, mais a toujours trouvé des raccourcis pour éviter de parler d'un sujet qui endeuille l'Algérie depuis dix ans, et que l'Egypte vit, à un autre stade, depuis plus d'un demi-siècle. Pour Tantaoui, il s'agit de promouvoir le fiqh et les fouqaha, afin de faire échec aux manoeuvres des radicaux. L'ijtihad, dans le texte coranique et son exégèse, peut, de par le message universel et pacifique qu'ils dégagent, faire se désagréger les fausses interprétations qui ont conduit à la violence islamiste. Abdelkader Aoudah, Sayed Qotb, Saïd Hawah, Abdelsalem Farag (auteur de la Faridha Ghaïba, l'obligation absente c'est-à-dire le djihad) Abderahmane Shukry, etc, sont les principaux référents doctrinaux des groupes islamistes radicaux modernes et ont, depuis très longtemps en Egypte même, jeté les bases de la confrontation armée islamistes-pouvoir. Très diplomate, Tantaoui a évité les diatribes et les longues harangues à l'endroit des radicaux, et s'est contenté de dire que «l'émergence des partis islamistes dans le cadre des lois est une chose qui va dans l'intérêt de la nation musulmane», à condition qu'ils oeuvrent «pour la liberté et la justice», faisant savoir, au passage, le rejet par l'Islam de «toute agression contre des innocents, quelle qu'en soit l'origine». Tantaoui, tout comme El-Ghazali, El-Uthaymine, Ben Baz (tous décédés, il y a quelques années), El-Bouti, etc. ne sont pas «pris en ligne de compte» par les mouvements islamistes extrémistes dans le monde arabo-musulman, qui pensent que ceux-là représentent un «Islam officiel dont se servent les régimes arabes». Bien au contraire, les groupes radicaux et violents continuent de «pomper» dans des livres underground, et de faire une exégèse littérale des textes coraniques. Des opuscules de Hawah, Aoudah, Farag, Shukry, Qotb ou Azzem ont plus d'audience chez eux que les volumes dorés de Tantatoui et les autres érudits qui ont cherché une ligne de partage avec le monde moderne. S'il n'y a pas d'ijtihad, il y aura djihad. Le fait est là. Et ce manichéisme risque encore de prendre des propositions tout à fait incontrôlables. L'indigence du monde musulman a poussé les mouvements radicaux à rejeter en bloc toute la modernité du monde actuel et de proposer un retour aux sources de l'Islam. Ce retour est proposé par la lame de l'épée et la rédemption du feu. Et aucune exégèse officielle n'a proposé mieux aux jeunes radicaux d'aujourd'hui. Et de demain.