Le plus étonnant, c'est l'indifférence des citoyens qui préfèrent acheter ce pain vendu de manière informelle dans la rue plutôt que dans une boulangerie. «Visiblement, il est devenu impossible de mettre fin à l'informel. Cependant nous demandons à l'Etat d'imposer un registre du commerce aux vendeurs ambulants de pain», clame l'ensemble des boulangers venus de plusieurs wilayas, pour prendre part au 1er congrès de la Fédération nationale des boulangers, affiliée à l'Union générale des commerçants et artisans algériens (Ugcaa). Cette rencontre a eu lieu, hier, à l'hôtel Essafir à Alger sous la houlette du secrétaire général de l'Ugcaa, M.Salah Souilah. En dépit des mesures arrêtées par le gouvernement pour le contrôle, la régulation et le respect des règles d'hygiène et de protection du consommateur, les marchands informels continuent d'imposer leur diktat. Des marchands ambulants continuent à vendre du pain dans des corbeilles, à même la chaussée, exposé à la poussière, à la pollution et aux gaz d'échappement des voitures, faisant fi des règles les plus élémentaires d'hygiène. Le plus étonnant dans tout cela, c'est la complicité des citoyens qui s'approvisionnent dans l'informel. D'ailleurs, certains vendeurs à la sauvette n'hésitent pas à vendre leur pain sous le nez de ces boulangers qui possèdent un registre du commerce et paient leurs impôts. Au chapitre du prix du pain, celui-ci demeure fixe malgré l'augmentation des coûts des ingrédients. «Il faut savoir que depuis 1996, date de fixation des prix administrés du pain et de la farine destinée à la panification, la facture des charges nécessaires à la fabrication du pain, n'a pas cessé d'augmenter», souligne un participant. Pour faire du pain, il ne suffit pas d'avoir de la farine. Il faut de la levure, de l'eau, du sel, il faut payer l'ouvrier, l'électricité, le gaz, les charges fiscales et parafiscales, il faut entretenir le matériel, trouver la petite pièce, etc. Selon les boulangers, toutes ces matières et services ont subi d'énormes et successives augmentations. Certains ont vu leur prix multiplié par six. La dernière augmentation a touché le mazout, alors que 80% des fours des boulangers, là où le gaz de ville n'est pas encore arrivé, fonctionnent au mazout. «Notre grande crainte est de voir la profession noble de boulanger disparaître. Beaucoup d'entre eux tiennent jusque-là le coup d'abord parce qu'ils aiment leur métier, car ce sont pour la plupart des boulangers, de père en fils», s'inquiète un professionnel. «Ceux qui continuent à travailler arrivent à compenser les pertes par la vente de gâteaux parallèlement à celle du pain amélioré et autres pains spéciaux. Il y a ceux aussi qui travaillent carrément au noir. C'est le cas de nombreuses boulangeries nouvellement ouvertes qui ne disposent ni de registre du commerce ni, évidemment, de matricule fiscal. Elles ne paient donc pas d'impôts, ne déclarent pas leurs employés à la Sécurité sociale, sans parler des dangers sur la santé publique dans le cas de non-respect des normes de fabrication», renchérit son collègue. Devant toutes ces plaintes, le ministère du Commerce insi-ste sur la subvention de certains produits de base, entre autres la farine, la se-moule et le lait pasteurisé. Ainsi, le directeur général de la régulation et de l'organisation des activités commerciales, M.Ouali Yahiaoui affirme que «le ministère de tutelle ne subventionne que les produits cités ci-dessus. Quant aux ingrédients du pain ainsi que les autres facteurs qui servent à la fabrication de cet aliment de base, leur subvention ne figure pas encore à l'ordre du jour». M.Yahiaoui a indiqué que pour l'année 2008, «l'Etat a importé l'équivalent de 60 milliards DA de farine de panification, 80 milliards DA de semoule et 24 milliards DA de lait pasteurisé». Et de poursuivre: «Il y a 20.000 boulangeries à l'échelle nationale dont 12.000 activent dans la fabrication du pain. L'année 2008 a enregistré l'inscription de 1100 boulangeries. En revanche, 250 boulangeries ont été radiées du registre du commerce pour diverses infractions.» Le congrès s'est conclu par l'élection du Bureau national des boulangers présidé par M.Youcef Falkat, et dont la principale mission consiste à défendre les droits de cette catégorie professionnelle.