Le MSP admet volontiers qu'il est victime d'une authentique sanction populaire. Il aura, donc, fallu plus d'une semaine au patron du MSP pour, enfin, reprendre contenance, reprendre langue avec les médias et tenter d'expliquer publiquement le terrible échec essuyé par son parti à l'issu des législatives du 30 mai dernier. Cela s'est fait, hier, dans deux interviews accordées à nos confrères «El-Watan» e t«El-Youm». Dans cette première sortie médiatique, Mahfoud Nahnah a tenté de jouer à fond la carte de la sérénité, même si le coeur ne semblait pas franchement y être. Le président du MSP, qui, dit-il, «escomptait entre 100 et 120 sièges», et qui a au contraire perdu une bonne trentaine de sièges par rapport à son score de 97, n'en démord pas pour autant. Aux yeux du MSP, en effet, «il faut mettre dans le même sac les tendances islamiste et nationaliste». En clair, et contrairement aux apparences, ces législatives ont constitué «une belle victoire pour ce mouvement qui totalise 328 sièges sur les 389 prévus, c'est-à-dire 84,23 % de la Chambre basse du Parlement». Nahnah n'en refuse pas moins d'aborder, plus ou moins sans tabous, l'échec personnel de son parti, même si le courant dans lequel il s'inscrit est le grand gagnant de ce scrutin. Pour lui, «trois facteurs au moins ont joué en défaveur du Mouvement de la société pour la paix». La fraude, quoique citée en bonne place, ne représenterait qu'un facteur secondaire. Cela, même si le MSP espère «sauver les meubles» en présentant «un nombre important de dossiers ficelés pouvant lui permettre de remonter un peu dans les scores». Le MSP déplore surtout «la fraude flagrante qui a touché les bureaux itinérants et les bureaux spéciaux dont les voix pourvoient la bagatelle d'une soixantaine de sièges au niveau de l'APN». Les deux autres raisons, en grande partie liées entre elles, concernent, d'un côté, «la perte de confiance des citoyens en la classe politique», et, d'un autre côté, «le très mauvais bilan des députés du MSP». Pour le premier point, Nahnah en veut pour preuve le très faible taux de participation, mais aussi les quelque 800.000 bulletins nuls exprimés. A ce sujet, Nahnah aborde la question de la Kabylie pour demander «l'annulation de ce scrutin». Dans le cas contraire, Nahnah conseille au FLN de «distribuer les sièges à l'ensemble des partis présents à l'APN puisque (à ses yeux) il est inconcevable qu'il soit le seul à en profiter, d'autant que les soulèvements en Kabylie le concernent en premier chef». Pour ce qui est du second point, et il s'agit là d'une première, le président du MSP admet que ses députés, mais aussi les dirigeants nationaux du parti «se sont détachés du peuple». Nahnah, dès lors, promet des changements de taille lors d'une réunion, prévue incessamment, de son «madjliss echoura». Des têtes risquent de tomber. Un changement de politique est aussi à attendre. Le MSP, qui félicite au passage la montée en puissance de Saâd Abdallah Djaballah et de son parti, pourrait fort adopter un ton plus dur, plus islamisant, plus critique en direction du pouvoir dans le but manifeste de rattraper le coup lors des élections locales prévues l'automne prochain. Ce n'est donc pas un hasard si Mahfoud Nahnah n'écarte pas, et voit même d'un bon oeil, sa non-participation au futur gouvernement, rejoignant par cette position le très turbulent Abderrezak Mokri. Le MSP, qui nous a habitués à des retournements de veste et de situations de dernière minute, n'en demeure donc pas moins au stade des spéculations et des tractations même si c'est son président qui annonce la couleur.