Le deuxième tour a confirmé son déclin. Les Français ont tranché, dimanche, en donnant au président Jacques Chirac la majorité parlementaire qu'il réclamait pour gouverner, mais aussi, sans doute, de mettre en oeuvre les réformes que la cohabitation avec la gauche plurielle ne lui a point permis de susciter et d'initier. Comme le laissait entrevoir le premier tour, cette seconde étape des législatives a confirmé le raz de marée de la droite qui a balayé la gauche plurielle qui espérait encore limiter les dégâts. Grand triomphateur, Jacques Chirac retrouve la totalité de sa fonction présidentielle phagocytée, durant son premier mandat, par le gouvernement socialiste de Lionel Jospin. Ainsi, le nouveau parti «chiraquien», l'Union pour la majorité présidentielle (UMP) - qui regroupe le parti gaulliste le RPR et une partie de la droite libérale (UDF et DL) -, a remporté la majorité absolue de 375 sièges, sur les quelque 400 acquis par la droite, (dans une Assemblée nationale qui compte 577 députés). Déjà plébiscité lors de la présidentielle d'avril dernier, Jacques Chirac entame ainsi un second mandat dans les meilleures conditions, susceptibles de lui permettre de mettre en branle ses chantiers des réformes, notamment en matière sécuritaire et de l'immigration. Cependant, si la droite peut s'estimer grande victorieuse de cette consultation électorale, la gauche plurielle, ou ce qu'il en reste, n'a pu que constater sa déroute et son renvoi par l'électorat français. De nombreuses personnalités du Parti socialiste, à l'instar de la très médiatique Martine Aubry, (fille de l'ancien président de la Commission européenne Jacques Delors) maire de Lille et ancien ministre, auteur du projet de loi sur la réduction du temps hebdomadaire de travail à 35 heures, du président sortant de la Chambre basse du Parlement, Raymond Forni, ont été laissées sur le carreau. Il n'y a pas que le PS qui a été ainsi mortifié, le président du PC français, Robert Hue, s'est, lui aussi, ramassé dans ce second tour en perdant son siège du Val-d'Oise en région parisienne. Cas de l'ancienne ministre, et leader des Verts, Dominique Voynet, également battue. Mais le grand perdant de cette consultation législative est sans aucun doute l'ancien ministre de l'Intérieur, en rupture de ban avec sa famille politique, Jean-Pierre Chevènement battu dans son fief, réputé inexpugnable, du Territoire de Belfort, où il avait été régulièrement reconduit depuis 1953. Cette déroute de la gauche plurielle, qui confine à la catastrophe, sonne le glas d'une politique aujourd'hui clairement rejetée par la population française, notamment par les couches défavorisées parmi les jeunes et les plus démunis. Comprendre ce rejet semble aujourd'hui l'urgence des responsables de la gauche qui n'arrivent pas à concevoir ce retrait de confiance des Français lesquels ne croient plus à la politique d'une gauche plurielle qui a failli. L'autre grand perdant est l'extrême droite qui n'a réussi à avoir aucun élu à la nouvelle Assemblée, issue du scrutin de dimanche. L'extrême droite en est sortie tétanisée à l'image d'un Jean-Marie Le Pen qui crie au scandale et accuse les pouvoirs publics de manipulation pour barrer la route à son parti. Au total, les législatives de 2002 ont reconfiguré la répartition parlementaire, maintenant l'extrême droite à l'écart, mais aussi en amenuisant la représentation de la gauche plurielle, renvoyant cette dernière à une vaste introspection, elle qui n'a pas su ni pu, fructifier les atouts dont elle disposait pour le mieux être de la population. La grande victoire de la droite peut aussi se révéler à double tranchant, car disposant aujourd'hui de la chance d'avoir en main cette majorité qui lui permettra de mettre en oeuvre ses projets de réforme, comme de reconstruire la confiance des Français dans l'Etat. C'est ce difficile challenge que Jacques Chirac et ses amis auront à tenir demain.