Quelques semaines après la présidentielle, les Français sont, à nouveau, appelés à se prononcer. Se relevant difficilement de la percée de l'extrême droite personnifiée par la qualification de Jean-Marie le Pen, à la finale présidentielle du 21 avril dernier, avec pour conséquence la débâcle de la gauche plurielle et la chute de Lionel Jospin, les Français, la gauche plus singulièrement, appréhendent des élections législatives d'aujourd'hui qui risquent de sonner le glas. C'est particulièrement vrai pour la gauche plurielle, mais également, dans une certaine mesure, pour la droite tiraillée par des questions de prérogatives. Ce qui peut, chaque camp en étant conscient, faire à nouveau le jeu de Le Pen et de ses amis crédités d'au moins 15% des suffrages. Même si le scrutin actuellement en vigueur - uninominal à deux tours - fait barrage efficacement à l'entrée de l'extrême droite dans l'hémicycle du Palais , (un seul député, dans l'Assemblée sortante, J-M le Chevalier, maire de Toulon, dont la mandat avait d'ailleurs été annulé) il n'en demeure pas moins que dans un paysage politique caractérisé par la dispersion tout est possible. Les sondages donnent, certes, une victoire relative de la droite au premier tour (une moyenne de 40% pour la droite classique regroupée autour de l'UMP, l'UDF et divers droites) face à la gauche plurielle (créditée d'une moyenne de 36%), mais une fois encore tout se jouera, sans doute, autour du taux d'abstention qui a largement défavorisé le candidat de gauche à la présidentielle. La droite veut ainsi mettre à profit la dynamique de la victoire de Jacques Chirac à la présidentielle du 21 avril pour retrouver la suprématie à l'Assemblée nationale. De fait, il s'agit singulièrement de donner une majorité de gouvernement au président Chirac contraint, lors de son premier mandat, de cohabiter avec la gauche plurielle. Cohabitation qui, selon d'aucuns, n'a pas donné tous les résultats escomptés, notamment par le fait que le leader de la droite conservatrice a vu son rôle réduit au minimum dans les affaires de l'Etat. C'est dans cette optique que la droite s'est regroupée autour d'un nouveau rassemblement, l'Union pour la majorité présidentielle, UMP, incluant le parti de Jacques Chirac, le RPR, et les «chiraquiens» de l'UDF et de Démocratie libérale. Cependant les leaders de ces deux partis n'entendent pas faire les frais de ce regroupement et présentent leur propres candidats aux législatives. Ainsi, François Bayrou, président de l'UDF, qui a recueilli 7% des suffrages à la dernière présidentielle, ne veut pas se laisser phagocyter, en affirmant que «la majorité sera plurielle et équilibrée ou ne sera pas». Traumatisée par son échec à la présidentielle, la gauche tente de rester unie pour, à tout le moins, conserver la majorité qu'elle détenait dans l'Assemblée nationale sortante. Cependant le retrait de son leader naturel, Lionel Jospin, a induit une sorte de vide qui l'a déstabilisée, l'incitant ainsi à rechercher une stratégie de remplacement. Ce qui sera difficile, d'autant que la gauche enregistre la défection définitive de Jean-Pierre Chevènement qui a décidé de tenter sa chance avec son pôle républicain en présentant sa propre liste dans près de 400 circonscriptions sur les 577 que compte le pays. Restent néanmoins l'inconnue du Front national et sa capacité à rééditer l'exploit de son leader qui arriva à la finale présidentielle. Plusieurs dizaines de triangulaires sont ainsi prévues, avec notamment le parti de J-M Le Pen. Dans ce cas d'espèce, les deux premiers, plus le parti classé troisième, si celui-ci dépasse la barre des 12,5%, prennent part au second tour des législatives. L'incertitude domine donc des législatives où Jacques Chirac veut sa majorité de gouvernement, la gauche conserver sa pré-imminence au Palais , alors que l'extrême droite veut confirmer sur la lancée de son leader.