L'erreur qu'il ne fallait pas commettre: l'usage des armes à feu contre des citoyens, de jeunes adolescents pour la plupart. En s'abattant sur cette région, ce malheur eut pour conséquence de rompre une forme d'harmonie traditionnelle qui mettait toujours en avant l'homme, l'adolescent et bien avant cet âge l'enfant-roi. Certes, le geste incriminé fut, par la suite, déploré par les plus hautes autorités du pays, mais le fait est là, têtu, rappelant inexorablement que des «Algériens ont osé tirer sur d'autres Algériens». Depuis ce drame, quelque chose de profond a changé en Kabylie. Cela fait un an que ce malaise perdure, un an durant lequel une partie de la jeunesse kabyle n'a cessé d'exorciser la hideuse image des morts qui ont jalonné son parcours même si, pour la majorité des habitants, le mauvais traitement infligé aux gendarmes par la même occasion ne se justifiait pas non plus. Quand on parle de la Kabylie aux vieux combattants de la Guerre de Libération, venus renforcer les rangs de la Wilaya III de leurs provinces d'Oran, de l'Ouarsenis ou d'ailleurs, c'est avec les larmes aux yeux qu'ils déplorent ce qui s'est passé après la mort du jeune Massinissa. Et comme piqués au vif dans leur disponibilité à rapprocher les contraires, ils se déclarent prêts à rendre service si l'Etat leur faisait appel pour réconcilier toutes les parties intéressées, de près ou de loin, par les turbulences qui n'ont cessé de secouer la Kabylie depuis un an. Un an plus tard, il semble pourtant que la jeunesse en Kabylie ait épuisé tout son argumentaire. Alors que faire? Pour le moins il faudra bien sortir de ce bourbier un jour. Mais comment? Par le dialogue pardi! Et seulement le dialogue, le vrai! L'Etat et la représentation légitime de Kabylie devraient rechercher le compromis indispensable au retour à la vie normale dans cette région. Mais pour ce faire, des conditions s'imposent. Primo: l'intelligence, secundo la volonté politique. Sans autre considération que des différences d'interprétation de l'histoire en vigueur dans notre pays pourraient assombrir et rendre, par conséquent, encore plus incertaine l'approche vers une solution définitive. Volonté politique et intelligence sans plus! En attendant de quelle nature est le vent qui souffle aujourd'hui en Kabylie? S'agit-il d'un reliquat de vent de fronde qui s'amorce? Bien au contraire, car selon de tout récents témoignages rapportés des deux côtés du Djurdjura, la population est dans l'expectative, mais elle n'a pas perdu espoir de voir, à court terme, se profiler le temps irrévocable des accolades et de la réconciliation. Car, après tout le problème kabyle n'est rien moins qu'une mésentente familiale dont la solution ne peut se trouver qu'à l'intérieur de la grande famille algérienne. Un point de vue qui se confirme chaque jour un peu plus à en croire les propos qui émanent des prisons où les représentants des ârchs incarcérés sont prêts à s'engager solennellement à aider à oeuvrer pour le retour au calme en s'engageant à ne formuler aucune récrimination envers le pouvoir. Outre cette démarche dont le pouvoir a sûrement enregistré l'écho, des correspondances ont été diligentées par certains représentants des ârchs emprisonnés en direction de certaines institutions de l'Etat pour plaider en faveur du retour au calme, sans oublier le rôle joué par certains députés de la région qui, courageusement, encouragent au rapprochement entre la société civile de Kabylie et les pouvoirs publics à reprendre le dialogue pour en finir, une fois pour toutes, avec l'irresponsabilité.