C'est la Belgique qui a eu le dernier mot, jeudi soir, avec deux films touchants qui mettent l'accent avec humour et légèreté sur la vie des gens. La cérémonie de clôture des Journées du film francophone a eu lieu jeudi dernier en présence du consul du Canada et de la représentante de la Wallonie-Bruxelles et d'autres diplomates accrédités en Algérie. En effet, cette ultime soirée a vu la projection de deux films belges des plus hilarants. La Belgique a eu ainsi le dernier mot pour cette nouvelle édition des Journées du film francophone bien parties pour durer, vu l'engouement et l'affluence enregistrés durant une semaine. Un signe fort de réussite dont s'est félicité Salim Aggar, le directeur des relations publiques à l'ambassade du Canada, initiateur de cet événement, de par son statut de président de l'Union de la francophonie dont les membres célèbrent cette journée avec faste chaque 20 mars. «Nous sommes contents de la forte présence du public. Nous avons pu enregistrer par exemple, lors de la projection du film marocain, deux femmes sur la route de Frida Borquia, environ 150 personnes. Cela augure de bonnes perspectives pour le cinéma en Algérie et souligne la nécessité du grand retour des familles vers les salles obscures, ceci pour la bonne santé du 7e en Algérie» a-t-il fait remarquer. Aussi, le public a renoué avec la Belgique (après la projection du film d'animation à l'adresse des enfants, lundi, Cédric Dupont de Cauvin et Laudec) avec un court métrage de 8 minutes pour le moins très sympathique! Intitulé Merci, l'histoire se déroule à l'intérieur d'un wagon de métro des plus ordinaires. Un drôle de personnage prend le tram et à sa façon le transport en commun. Là où il passe il contamine les gens...par le rire. Ça rend heureux du belge Joachim Lafosse, le second film, met en scène l'histoire de Fabrzio, un cinéaste sans emploi, assailli par les déboires et menacé de radiation par le chômage. Egaré dans son couple, il est confronté à l'échec commercial de son premier film. Avec l'énergie du désespoir, il décide de tourner un nouveau film, inspiré de son quotidien et de l'expérience de ses proches. Autour de l'enthousiasme de Fabrizio naît une solidarité créatrice, bénévole. Toutefois, son désir de mêler réalité et fiction et le plaisir qu'il prend à brouiller les pistes ne laisseront pas ses partenaires indemnes. Mise en abyme, ce film original met en scène par ses séquences très intimistes, le bonheur de la vie, avec ses hauts et ses bas, à travers un cinéaste assez nombriliste, comme il y en a tant à travers le monde. Un sujet universel comme dirait ce personnage, laissant découvrir la corde sensible de tout un chacun avec légèreté et malice. Un film témoin, qui a dû être difficile à monter ou à tourner a fortiori en raison de la pertinence des cadres choisis. Car jouer son propre «jeu» est se risquer à la mise à nu même si le réalisateur se défend dans le film de ne faire après tout que de la fiction. Beau film en tout cas, qui mérite d'être encore vu par un plus grand nombre de spectateurs et pourquoi pas nos cinéastes en herbe dont certains prétendent déjà faire du grand cinéma...La veille, deux films aux antipodes ont été projetés. D'abord Le Destin de Youssef Chahine. Nous sommes au XIIe siècle, alors que les chrétiens ont entrepris de reconquérir la Péninsule ibérique tombée sous domination arabe, le climat de tolérance qui régnait alors à Cordoue est sérieusement menacé. Fondateur d'une pensée moderne qui ose proclamer que la raison est l'amie et la soeur de la loi divine, Averroes est proche du calife au pouvoir qui l'a nommé «qadi» (grand sage) pour sa sagesse. Désirant amadouer les intégristes, le calife el-Mansour ordonne l'autodafé de toutes les oeuvres du philosophe andalou Averroes dont les concepts influenceront non seulement l'âge des Lumières en Occident, mais toute la pensée humaine. Il sera la première victime des extrémistes et des fanatiques aux pouvoirs grandissants. Les disciples d'Averroes et ses proches décident d'en faire des copies et de les passer à travers les frontières.. Toujours d'actualité, ce film n'est pas sans rappeler un autre long métrage, adapté du célèbre livre Le nom de la rose de Umberto Ecco. Le feu du boucher qui brûle les livres est le fil récurrent de l'histoire. Aussi, ce film nous met en garde contre la croisade menée par la politique du pouvoir contre le savoir et la philosophie et ses corollaires la morale et la conscience, comme le dit si bien Nour Chérif (Averroes) dans le film. Un film qui date pourtant de 12 ans mais qui nous fait penser que les feux du fanatisme ne sont pas encore éteints...Dans un registre complètement différent est Wesh Wesh de Rabah-Ameur Zaimèche (2002). Cette coproduction algéro- française est le premier film de la trilogie Zaimèche mettant en cène un jeune Franco-Algérien algérien oisif ayant grandi en France et qui jongle entre débrouille et mal-vie. Dans Wesh wesh il revient clandestinement dans la cité de Montfermeuil pour y retrouver sa famille dont il avait été séparé pour purger la «double-peine» Son frère cadet est devenu un «caïd» revendeur de drogue. Kamel assiste aux manigances de son frère sans broncher. Sans papiers, il tente de chercher du travail. En vain. La police fait une descente à la maison et blesse la mère. Kamel se venge en agressant violemment un policier. S'ensuit une course poursuite dans la forêt et deux coups de feu qui éclatent dans le bosquet. Une fin ouverte. On ne sait qui est blessé. La suite est peut-être dans le second film, Bled number one. Film d'auteur, Wesh Wesh jette les jalons d'un style de cinéma pas encore maîtrisé, d'où le côté amateur qui rejaillit mais qui lui donne à quelques égards près cette touche d'authenticité grâce à cette proximité filmée, propre aux banlieues et ce côté réaliste finalement qui a fait le succès d'estime du film. On y retrouve aussi toujours les mêmes atmosphères glauques et vaporeuses, chères à Zaimèche. Un film stressant pourtant qui nous a permis de découvrir une certaine façon de faire un film. Même si elle dénote des traits du débutant. C'est à cela que sert finalement ce genre d'initiative, notamment ces journées du film francophone. A saluer!