Encore une fois, Salim Aggar a gagné le pari de nous faire sortir de la maison pour aller apprécier de bons documentaires. L'association «A nous les écrans» en partenariat avec l'APC d'Alger-Centre, nous a conviés, jeudi dernier à la salle ABC, pour assister au making of d'Er Rissala (Le Message), le premier film international de Mustapha El Akkad. Une occasion de réécouter la fameuse musique du film, écrite et composée par le génial Maurice Jarre, décédé récemment à l'âge de 84 ans. Le making of d'Er Rissala est réalisé par Christopher Penfold et commenté par Damien Thomas (45 mn). Le making fait montre des deux versions, une anglaise et l'autre arabe, du célèbre film campé par différents acteurs, arabes et internationaux, que ce soit Irène Papas ou la Syrienne Mouna Wassef pour le même rôle de Hind. Le film lève le voile sur la perspicacité du réalisateur Mustapha El Akkad à mener à bon port son film quand d'autres avant lui, ont échoué du fait de la non-appartenance aux mêmes culture et religion. Le débat autour du film était bien instructif. Il nous a permis de connaître les dessous de fabrication du film Er Rissala. Si le début du tournage a pu se faire au Maroc, nous apprenons que c'est le roi Hassan II, sous influence des Saoudiens qui refusaient de financer le film l'estimant subservif, qui poussa l'équipe - composée d'une trentaine de nationalités - à aller tourner en Libye. El Gueddafi, à l'époque, ayant eu vent du refus des Saoudiens, décida de donner carte blanche à El Akkad. Ainsi, les scènes intérieures ont été tournées en Lybie et les batailles dans le Sahara libyen. Aussi, après son départ du Maroc, El Akkad avait sollicité l'Algérie via Lakhdar Hamina et Ahmed Rachedi qui avaient proposé un partenariat sur le film en tant que coprodcteurs, chose que Mustapha El Akkad rejetait préférant demeurer le producteur exclusif d' Er Rissala. Par ailleurs, un documentaire intitulé Les films épiques: du Dix commandements à Gladiator, tout aussi intéressant que le making of a été projeté au public. Ce dernier fait office de la concurrence qui a régné entre les péplums italiens et les films historiques américains qui seraient bien les «descendants» des premiers. Le documentaire prend comme exemple les film Ben Hur, Les Dix commandement pour ne citer que ceux-là, en passant par des films plus contemporains comme Gladiator qui a nécessité des moyens technologiques de pointe, autrement dit l'introduction des images de synthèse. Ce documentaire explique le choix des péplums au début du siècle par la nécessité d'attirer le spectateur prude vers les salles de cinéma via des superproductions hollywoodiennes traitant du thème de la religion. C'est-à-dire amener cette société conservatrice à aller se divertir sans pour autant porter atteinte à ses valeurs morales. Plus tard, les films historiques auront une signification encore plus sous-jacente car il est dit que la plupart de ces films témoignent de la décadence de la société après la Seconde Guerre mondiale et le refus de l'ancien système. Gladiator dénonce notamment le système moderne et sa politique corrompue. Le débat a permis aussi de souligner l'importance d'un bon scénario qui permet de combiner entre fiction et réalité sans pour autant dénaturer la seconde. Il a été question également de censure dans notre pays et de manque flagrant de films historiques sur nos figures de proue, a fortiori quand on sait que 130 films et non des moindres ont été réalisés sur la seule personnalité de Napoléon alors que le film sur l'Emir Abdelkader reste encore dans les tiroirs, faute de décision politique ou de consensus probablement sur la véracité des données. Bref, le makinf of d'Er Rissala a contribué grandement a démystifier ce film tout en marquant un point sur l'importance de la formation dans les métiers du cinéma, car rares étaient les techniciens sur le plateau qui pouvaient se prévaloir d'être de nationalité arabe. Ceux qui l'étaient, on les trouvait souvent relégués dans les rôles d'artisans ou de figurants. Jusqu'à quand?