En leur troisième jour de débrayage, les protestataires crient à la trahison. Le recours à la cessation de travail à Béjaïa est devenu la seule arme pour faire valoir les droits des salariés ou obliger les parties concernées à appliquer des décisions négociées et prises en leur faveur. C'est le cas de l'unité de grues dépendant de l'Entreprise nationale des matériels de travaux publics. Le motif: la non-application de la résolution de cession établie le 4 mai 2008 qui n'a pas pris effet comme convenu le 31 mars 2009. Pour rappel, les travailleurs de l'unité de grues de Béjaïa s'étaient vivement opposés à la reprise de leur entreprise par un de ses sous-traitants depuis 2004. Une Sarl à capitaux privés, spécialisée dans la fabrication des cabines sahariennes. L'opération de privatisation, selon les représentants des travailleurs, a été menée de façon unilatérale par la SGP Equipage et en faveur d'un seul repreneur, qui de surcroît, selon les informations qui nous ont été fournies par le syndicat de l'entreprise, croule sous des créances et qu'il serait dans l'incapacité d'honorer ses engagements. Leur montant s'élèverait à près de 15.000.000 dinars. «Seule l'assiette financière qui s'étale sur une superficie de près de 80.000 mètres carrés intéresse les nouveaux acquéreurs. C'est la seule motivation de leur convoitise», nous avait confié les responsables syndicaux au mois d'août dernier lorsqu'ils avaient déclenché un mouvement de grève de trois jours. Tout semblait être rentré dans l'ordre lorsqu'au mois de janvier 2009, le comité de participation à travers M.Mouhoubi avait déclaré que la procédure d'annulation a été prise en considération et était notamment motivée par «l'incapacité d'Agcm à honorer les engagements auxquels elle a souscrit dans sa soumission et le non-respect des échéances qui lui ont été fixées dans ce cadre». Les craintes des salariés venaient enfin d'être levées, leur entreprise ne courait plus de risque d'être bradée, en plus d'être mise dans de sérieuses difficultés financières. Ils pouvaient crier victoire. L'attente fût certes longue et le combat âpre. Le 31 mars 2009 devait être un jour de fête pour eux. Hélas, ils ont dû déchanter. Le patron d'Agcm est toujours présent avec armes et bagages. «Je ne partirai pas avant l'année 2010», a-t-il lancé à la face des travailleurs. Mme Ouagueni Zina, porte-parole et secrétaire générale du syndicat de l'unité de grues ne cache pas sa colère: «C'est une trahison», lâche-t-elle, apparemment désemparée par ce subit retournement de situation. Elle interpelle le directeur général de la SGP: «Il faut mettre en oeuvre la décision d'annulation de la privatisation de l'entreprise et respecter la date butoir du 31 mars 2009», souligne la syndicaliste. L'enveloppe financière de 265 milliards de dinars annoncée par Abdelaziz Bouteflika en faveur de la wilaya devrait aussi profiter à toutes ces entreprises mises en difficulté, soit à cause de la mauvaise gestion soit convoitées par intérêt purement personnel. Elles représentent le fer de lance du développement économique de la région.