Le populaire mais controversé Jacob Zuma, 67 ans, devrait être élu président de la République par les députés issus du scrutin. Les élections générales en Afrique du Sud, mercredi, devraient propulser à la présidence de la première économie du continent le tribun Jacob Zuma, après plus d'un an de turbulences politiques couronnées par l'abandon de poursuites à son encontre pour corruption. Plus de 23 millions d'électeurs sont appelés à renouveler l'Assemblée nationale et les Parlements provinciaux, lors de ce 4ème scrutin national depuis l'avènement de la démocratie multiraciale et l'élection de Nelson Mandela en 1994. Fort d'une légitimité tirée de la lutte contre l'apartheid, l'ultramajoritaire Congrès national africain (ANC) fait à nouveau figure de favori, avec 64% des intentions de vote. Son candidat à la présidence, le populaire mais controversé Jacob Zuma, 67 ans, devrait donc être élu président de la République par les députés issus du scrutin. Pendant la campagne, les déboires judiciaires du tribun zoulou ont relégué au second plan les enjeux sociaux et économiques - pauvreté, criminalité et chômage - auxquels le pays reste confronté 15 ans après la chute du régime raciste. Le 7 avril, après plus de huit ans d'enquête, le parquet a abandonné des poursuites pour fraude et corruption à son encontre. Le procureur général a estimé que des «abus de pouvoir» commis par le chef de l'enquête discréditaient la procédure. Cette décision a laissé un goût d'inachevé dans le pays, déjà secoué par des mois de dissensions ouvertes au sein du parti au pouvoir qui ont débouché en septembre sur l'éviction du président Thabo Mbeki, renvoyé par son propre parti après neuf années à la tête de l'Etat. Jacob Zuma a eu beau se décrire comme victime d'un complot politique, il n'a pas convaincu tous les Sud-Africains. Moins de la moitié des électeurs le considèrent innocent. Le Congrès du peuple (Cope), formé par des dissidents de l'ANC après la démission de Thabo Mbeki, compte sur ce malaise pour effectuer une percée dans les urnes. «Depuis 1994, on considère qu'une alternative crédible à l'ANC ne peut venir que d'une scission au sein du parti», relève l'analyste politique Aubrey Matshiqi. «Avec l'apparition du Cope, on peut considérer que ces élections seront les plus concurrentielles depuis 1994» Mais ce parti est trop jeune pour espérer une révolution, ajoute l'analyste, estimant qu'«un score de 7 à 10% serait un bon début.» Quant à l'Alliance démocratique, issue de la très modérée opposition parlementaire à l'apartheid, elle devrait plafonner autour de son score de 2004 (12,4%), parce que toujours considérée comme «un parti de Blancs». Dans ce contexte, «si l'ANC obtient moins de 60% des suffrages, les élections seront perçues comme un référendum anti-Zuma (...) et ce sera un désastre pour le parti», selon M.Matshiqi. L'ANC insiste sur ses réalisations en 15 ans de pouvoir: stabilisation de l'économie, croissance soutenue, émergence d'une classe moyenne noire, meilleur accès à l'eau et à l'électricité. Le parti a toutefois dû concéder qu'il restait beaucoup à faire. 43% de la population vit toujours en dessous du seuil de pauvreté. Le taux de chômage frôle les 40% et la crise mondiale menace plus de 250.000 emplois, notamment dans les secteurs miniers et automobiles. Dans les townships et les zones rurales, écoles et hôpitaux publics souffrent d'un manque criant de moyens et de personnels qualifiés, alors que le pays compte 5,5 millions de séropositifs et que la tuberculose tue. Autre fléau: la criminalité. Avec une cinquantaine d'homicides par jour, police et justice sont débordées et les dossiers en déshérence se multiplient. L'ANC appelle les électeurs à lui donner plus temps. «En travaillant ensemble, nous pouvons battre la pauvreté», assure son slogan.