Taourirt Moussa, à Beni Douala, a rendu hommage au chantre de l'amazighité. La Kabylie vidée, martyrisée, exsangue se souvient de l'un de ses porte-drapeaux, le chantre de l'amazighité: Matoub Lounès. Il y a de cela quatre années jour pour jour, la haine, l'inculture et l'intolérance ont assassiné sur la route de Beni Douala, à Tala Bounane, le héraut de la culture amazighe. 25 juin 1998-25 juin 2002, le sang a séché, les larmes ont tari, les coups guéris, mais l'écharde reçue en plein coeur par la Kabylie reste une plaie béante. Matoub a chanté, il a mis sa vie en équation, il a hurlé ses idées. L'homme se faisait petit, alors qu'il était un géant. Ses fréquentations, généralement choisies parmi les humbles, savent ce qu'elles ont perdu. Le rossignol s'est tu, les balles assassines ont eu raison de l'amour. Lounès a vécu par et pour le chant. Il a chanté: l'amour, la vie, le combat pour tamazight et la liberté d'expression. Il a vécu intensément la Kabylie, il a vécu ses joies et ses peines. Matoub était pluriel, il a été de tous les combats, jamais il n'a renié ses amitiés, encore moins ses racines. Djaout, le journaliste écrivain assassiné, Boudiaf le martyr ont été honorés par Lounès. Le chantre a également porté haut Nna Aldjia, sa mère, à laquelle il a rendu un hommage mérité et à travers sa chanson Yemma à toutes les mères au sein tari et aux mains gercées. La femme, dans toute sa féminité, sa grâce et son charme a reçu, elle aussi, à travers Djamila, du nom de sa première épouse, un bouquet de roses. Matoub s'est également levé contre l'intégrisme et l'intolérance et le chantre a également volé dans les plumes des gouvernants avec Lettre aux...et dans son dernier Aghourou, il met les pieds dans le plat, en disant brutalement et sans fioritures leur fait à ceux par qui les espoirs se sont éteints. En ce quatrième anniversaire de sa mort, la Kabylie se souvient. La foule dense et attristée se pressait autour du mausolée, à Taourirt Moussa, devenue, l'espace d'une journée, la mecque de la revendication identitaire. Bus, fourgons, voitures légères ont afflué de partout. Ils étaient nombreux, hommes, , jeunes ou vieux à se recueillir devant le tombeau. Tous ont tenu à dire un mot gentil, un mot de soutien...Nna Aldjia, la mère de Lounès, prend la parole. La gorge nouée, elle s'adresse à l'assistance pour la remercier d'être venue à la commémoration. Comme Nna Aldjia a rappelé «l'attachement à la revendication de vérité sur l'assassinat du Rebelle», avant d'expliquer l'absence de sa fille Malika en disant: «Malika aurait tant voulu être aujourd'hui, parmi nous, mais il se trouve qu'elle est sérieusement menacée dans sa vie...», Nna Aldjia, n'a pas donné des détails quant à ces menaces. Et de conclure: «Lounès n'est plus là. Mais vous êtes des Lounès!». Après cette petite harangue la foule reprend en coeur: «Assa, azeka Lounès yella, yella! Et encore l'enquête tella, tella!». Les comités locaux de la fondation Matoub et les coordinations locales du mouvement citoyen prennent, à tour de rôle, la parole pour réaffirmer «(leur) détermination à demeurer fidèles au combat pour lequel Matoub a donné sa vie!». Enfin, l'assemblée observe une minute de silence et des gerbes de fleurs ont recouvert la tombe du Rebelle.