De 10 ans à la perpétuité, les réfractaires auront le temps de méditer sur les conséquences de leurs actes. L'été approche. La saison des intoxications est à nos portes. Sauf que depuis le 9 mars dernier, les commerçants de produits alimentaires ne sont plus à l'abri de poursuites judiciaires. Le texte de loi publié dans le Journal Officiel prévoit de lourdes peines à l'encontre de tout fraudeur. Ainsi, l'article 83 de ladite loi prévoit «la peine de réclusion à perpétuité» à tout intervenant dans la commercialisation frauduleuse de produit alimentaire ayant causé «le décès d'une ou de plusieurs personnes». Cet article ne se limite pas au cas de figure précité. En cas de maladie incurable ou d'infirmité permanente causée par le produit mis en cause, «les intervenants concernés sont punis de la réclusion à temps de dix à vingt ans et d'une amende d'un à deux millions de dinars». Ce texte de loi est venu remettre de l'ordre dans une activité gangrenée par le gain facile de l'argent. Ainsi, la santé des citoyens, voire leur vie, est monnayée pour quelques sous de plus. Au mépris de la vie, la mort est banalisée. Le tout se passe dans l'ignorance, feinte ou réelle, des règles élémentaires de la sécurité des produits alimentaires. Et cela peut avoir des conséquences dévastatrices. En tout cas, la réalité l'a assez démontré. Durant ces dernières années, plusieurs régions du pays en été secouées par des scandales inhérents à l'intoxication alimentaire. L'évolution de la situation durant le premier trimestre de l'année en cours n'a fait que confirmer les craintes du développement du fléau. Dans la ville de Constantine, pas moins de 407 étudiantes résidant à la cité universitaire Nahas-Nabil ont été évacuées, en urgence, au Centre hospitalo-universitaire de la ville des Ponts. Ces étudiantes ont été intoxiquées suite à la consommation de poulet, ce qui a nécessité leur prise en charge en toute urgence. D'un autre côté, pas moins de 40 lycéens ont été intoxiqués dans la wilaya de Béjaïa. Ainsi, les élèves du Technicum de la ville d'El Kseur ont été victimes de «l'ingestion de yaourt périmé». Cela s'est passé le 21 avril dernier. Décidément, le Printemps berbère de cette année sera gravé dans les mémoires de ces pauvres lycéens. Pour leur part, les étudiants pensionnaires de la cité U «la Pépinière» de la ville de yemma Gouraya ont vécu le 16 avril, Journée du savoir quand tu nous tiens, dans la peur d'une maladie causée par le menu servi. Et pour cause, une dizaine de leurs camarades ont montré des signes de détérioration sanitaire inquiétante. Ainsi, la psychose s'était installée. Surtout que quelques jours avant, les services d'hygiène de la commune de Béjaïa ont saisi près de 900 kg de poulet jugé «impropre à la consommation» au niveau d'une autre résidence universitaire. A 60 km de Béjaïa, précisément dans la daïra d'Akbou, des citoyens avaient été atteints de diarrhée qui s'est répandue d'une manière effrayante. A l'ouest du pays, la situation n'est guère meilleure. L'avènement du printemps a été certes annoncé par l'éclosion des fleurs. Seulement, celles-ci ont failli perdre leurs couleurs et senteurs dans la wilaya d'Oran. La cause? Aussitôt ouverts pour la première fois à la vie, les yeux de 10 bébés se sont refermés à jamais. L'horreur! L'intoxication alimentaire a eu raison de l'espoir qu'ils représentaient pour leurs parents. Si cela peut consoler, une cinquantaine de poupons ont été sauvés «d'une mort certaine après qu'il aient consommé du lait préparé à base d'une eau impropre». Durant les deux premiers mois de cette année, la wilaya d'Oran a enregistré 150 cas d'intoxication. Deux ans auparavant, cette région a été endeuillée par le décès de 40 enfants. A l'époque, l'empoisonnement a touché 113 personnes. Telle une traînée de poudre macabre, l'intoxication s'est propagée à l'Ouest, comme dans toutes les régions du pays. Dans la wilaya de Chlef, le village de Traïche de la commune Bouzghaïa a vibré au rythme d'une grosse frayeur qui s'est emparé de ses enfants. Pas moins de 32 de ses habitants ont été victimes d'une intoxication alimentaire. Cela s'est passé le 3 mars. Trop c'est trop! La machine à sous n'a guère de considération pour la vie humaine. D'aucuns diront que la précarité de la condition sociale ne peut justifier l'absence de normalisation d'une activité pouvant provoquer des pertes humaines. C'est dire que le texte de loi adopté le 25 février dernier est tombé à point nommé. Pourvu que les dispositifs qu'il contient soient appliqués.