Le feuilleton a commencé en novembre 2006, quand le magistrat Abdallah Haboul a été privé de son droit à la promotion. L'affaire Abdallah Haboul, magistrat à Constantine et ancien président de la section syndicale des magistrats, revient au devant de la scène judiciaire. Une première dans les annales judiciaires. Un magistrat compte déposer plainte contre le président du Conseil d'Etat, la plus haute juridiction administrative du pays. Une plainte qui fera couler beaucoup d'encre et dont le fond demeure un mystère même pour les plus avertis des hommes de loi. Les faits de cette affaire remontent au mois de novembre 2006 quand le magistrat en question saisit le Conseil d'Etat contre le ministre de la Justice, garde des Sceaux, visant à annuler une décision du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) en sa formation ordinaire, présidée par le président de la République, privant le magistrat de son droit à la promotion. Mais bien avant cette date, le plaignant avait mené un long combat en 2003 contre le président de la cour et le procureur général de Constantine pour des dépassements et abus de pouvoir. A la suite de quoi, les deux responsables ont été relevés de leurs fonctions après une enquête des instances compétentes. Les conséquences viendront plus tard. Abdallah Haboul sera ainsi privé d'une promotion. Se sentant lésé dans son droit légitime, il décide de déposer plainte en bonne et due forme contre le ministre de la Justice en saisissant, comme le permet la loi, le Conseil d'Etat pour l'annulation de cette décision. En réaction, le ministre réplique. Dans sa plaidoirie, le ministre exigea du Conseil d'Etat de déclarer la plainte irrecevable dans la forme en soulignant que les décisions du Conseil supérieur de la magistrature ne sont pas susceptibles d'un recours en annulation, mais d'un pourvoi en cassation et d'invoquer une jurisprudence du Conseil d'Etat consistant en un arrêt rendu par les chambres réunies sous le numéro 16886. Cependant, le ministre n'indiquera pas la date de cette jurisprudence et ne versera pas une copie conforme comme l'exige la loi dans ce genre d'affaires et par conséquent elle est nulle aux yeux de la loi. Se basant sur ces faits, le magistrat entame sa plaidoirie. En mars 2008, il sera débouté par la deuxième chambre du Conseil d'Etat en déclarant l'action irrecevable en la forme. Loin de s'avouer vaincu, Abdallah Haboul saisira, par demande écrite en juin 2008, le greffier en chef du Conseil d'Etat pour qu'une copie de la jurisprudence lui soit remise, devant lui permettre de l'utiliser dans le cadre de la loi. Sans suite. Ne baissant pas les bras, le magistrat décide de saisir la présidente du Conseil d'Etat, Fella Henni. En vain. Devant cette situation de plus en plus complexe, Abdallah Haboul saisit la chambre administrative de la cour d'Alger en introduisant une action en référé contre le président du Conseil d'Etat dans l'espoir d'obtenir une copie de la fameuse jurisprudence. Le juge déclare l'incompétence de la cour. Loin s'en faut. Le magistrat introduit un appel devant le Conseil d'Etat. En date du 31 mars 2009 la cinquième chambre programme l'affaire en audience publique. Mais surprise! Les journalistes seront interdits d'accès au siége du Conseil d'Etat. Pourtant la loi stipule: «Les audiences sont publiques, à moins que la cour ne décide un huis clos.» Plaidant la cause de son mandant, Me Abdelhamid Rihioui se basera sur l'article 152 qui stipule: «Le Conseil d'Etat est un organe régulateur de l'activité des juridictions administratifs; il assure l'unification de la jurisprudence à travers le pays et veille au respect de la loi» et sur l'article 8 de la loi organique du Conseil d'Etat qui stipule: «Le Conseil d'Etat publie ses décisions et oeuvres à la publication de tout commentaire et étude juridique.» Or, ces décisions ne figurent, selon l'avocat de la défense, sur aucun des huit numéros édités de la revue de l'organisme, où la jurisprudence invoquée à l'égard de Abdallah Haboul n'y figure pas. A la fin, l'avocat de la défense déclare: «Si un magistrat est traité de cette manière, quel traitement est réservé à un pauvre citoyen.» Après délibération, le verdict rendu le 21 avril dernier a désarçonné le plaignant. L'appel a été accepté en sa forme en annulant la non-compétence de la cour d'Alger mais en maintenant l'irrecevabilité de la plainte. Retour au point de départ.