Le mode d'organisation du marché de l'emploi en Algérie pose aux multinationales le problème du recrutement. Pour les besoins de fonctionnement du métro d'Alger, il ne faut pas s'attendre à mettre la main sur des managers très qualifiés. La raison en est toute simple. C'est la première expérience menée par l'Algérie dans le domaine. Cette rareté des compétences est l'une des difficultés auxquelles se heurtent les multinationales dans la gestion de leurs ressources humaines en Algérie, même si certaines solutions existent. C'est la conclusion à laquelle est arrivé un panel de spécialistes intervenant hier en marge de la Foire internationale d'Alger. La Chambre de commerce et d'industrie de Paris a effectivement organisé une série de conférences sur les ressources humaines en présence de Joëlle Le Vourc'h, directrice générale de l'Ecole supérieure des affaires. Elle a indiqué que les entreprises ont la latitude de parrainer les étudiants afin d'établir un lien de fidélité entre les deux parties. Elle a aussi décliné d'autres formules pour faciliter la formation des managers. Selon cette responsable, il est constaté en Algérie que les managers intermédiaires se font rares. Un avis partagé par Jérôme le Hec, spécialiste des relations de travail au cabinet d'études Kpmg, et Mme Thamila Robert, directrice exécutive d'Arch Consilum. Jérôme Le Hec a axé son intervention sur la législation algérienne. Connaître la loi et les règlements n'est pas négligeable pour les multinationales qui comptent éviter les mauvaises surprises dans leurs relations avec leurs employés. L'accent a été mis sur des explications à propos des contrats de travail à durée déterminée qu'il faut, selon lui utiliser avec beaucoup de précautions. Quelques faux pas de l'employeur suffisent pour que ce contrat soit réputé comme indéterminé avec les conséquences que cela puisse avoir sur d'autres aspects du déroulement de la relation de travail comme le licenciement. A travers son activité auprès de nombreuses entreprises algériennes, deux constats ont été élaborés par Jérôme le Hec. Selon lui, les entreprises et administrations publiques sont celles qui abusent le plus du recours aux emplois à durée indéterminée. Dans le privé, il déplore la quasi-absence des conventions collectives. Les relations avec l'Agence nationale de l'emploi ont aussi été évoquées pour constater que cette structure n'est pas encore en mesure d'assurer une lisibilité du marché de l'emploi. Il ne s'agit pas seulement de disposer de statistiques. D'ailleurs, il est considéré qu'on ne peut pas demander des niveaux de performances équivalents à ceux existant dans des pays développés. Dans ces derniers, les responsables des ressources humaines se font assister par des cabinets de conseil en ressources humaines pour les aider à gérer la carrière des employés. Cette tendance commence à voir le jour en Algérie même si elle n'est pas généralisée. En effet, il n'est pas toujours évident de pouvoir gérer des centaines de CV. Mme Thamila Robert apporte d'ailleurs un témoignage sur cet aspect. Elle a indiqué qu'une multinationale installée en Algérie a reçu, suite à une annonce, 600 CV. 100 ont pu être traités alors que 30 seulement ont été retenus. Au final, il n'y a eu que 10 personnes employées. Cet exemple illustre à la fois la complexité de cette gestion et le degré de notoriété dont jouissent les entreprises ainsi que l'aptitude des demandeurs d'emploi à jouer le jeu de la fidélité. L'une des multinationales citées en exemple pour avoir pu gérer convenablement ses ressources humaines est Michelin Algérie, même si elle vit actuellement quelques difficultés liées à la conjoncture internationale. C'est une entreprise qui n'a pas cédé à la surenchère sur la hausse des salaires car elle est consciente qu'il faut d'abord évaluer et stabiliser ses compétences. Et c'est là l'une des autres difficultés auxquelles se heurtent les multinationales.