La tendance lourde qui se profile plaide en faveur de la participation de la Kabylie aux futures échéances électorales. Des sources partisanes proches du FFS et du RCD indiquent que ces deux partis devraient prendre part aux futures élections locales, prévues pour le 10 octobre prochain. Pas mal d'éléments plaident, en effet, en faveur de ce choix. Le rejet de l'un et le boycott de l'autre, lors des législatives du 30 mai, ont été une mauvaise expérience pour les deux formations politiques. Même si personne ne le reconnaît explicitement, tous espéraient secrètement que le chef de l'Etat finirait par reporter les élections à cause du boycott de la Kabylie et des graves conséquences qui pouvaient en découler. Sans doute était-ce compter sans la détermination du chef de l'Etat et son refus catégorique de prendre la moindre décision irréfléchie sous la contrainte. Le vote a fini par se faire. Le taux de participation, particulièrement bas, était une preuve que la fraude n'a pas joué (ou si peu) cette fois-ci. La validation du scrutin dans la région, quoique diversement appréciée par les observateurs et la classe politique, n'en a pas moins fini par être «digérée», scellant de la sorte, une éclipse officielle de ces deux partis, d'une tribune aussi importante que l'APN, trois longues années. Il est devenu clair, partant de ce constat, que les principes du rejet et du boycott n'ont que très peu de chance de jouer cette fois-ci. Le président, en convoquant officiellement le corps électoral, ne pouvait être plus clair. Les élections locales auront lieu, avec ou sans les partis qui avaient déjà boudé les législatives. Persister dans la ligne suivie jusque-là serait donc suicidaire aussi bien pour le RCD que pour le FFS, même si les raisons divergent quelque peu. La vague de démissions et d'exclusions, certes, touche beaucoup plus le parti de Sadi que celui d'Aït Ahmed. Mais le risque n'en est pas moins le même de voir ces deux formations, en bout de course, réduites à leur plus simple expression si elles sont également absents des collectivités locales durant les cinq années à venir. Cet état de fait, en outre, aurait pour effet de «ghettoïser» ces partis qui, pourtant, ont beaucoup fait pour quitter le carcan régional et s'imposer comme de puissants partis nationaux. La chose est autrement plus valable pour le FFS. Un parti qui a su conquérir des militants dans toutes les wilayas du pays et qui aurait pu, s'il avait pris part aux législatives passées, confirmer cette très notable progression en décrochant des sièges dans différentes wilayas du pays. Il ne fait aucun doute, cette fois-ci, que ces deux partis y réfléchiront à deux fois avant de se prononcer par rapport au prochain scrutin. L'on dit même que la décision du second parti, quel qu'il soit, sera prise en fonction de celle du premier beaucoup plus qu'en fonction de la situation qui prévaut tant dans le pays qu'en Kabylie. En clair, si le RCD est le premier à dire non à ce vote, le FFS dira forcément oui dans le but manifeste de rafler la mise et de s'imposer comme interlocuteur incontournable dans la région. L'inverse est également vrai. Nos sources expliquent ces tendances par le fait que même le mouvement citoyen est en train de s'essouffler dans la région une fois épuisées toutes les formes de militantisme et accordées la plupart des revendications soulevées par les délégués sans que cela ait eu raison de leur radicalisme. Plus que le RCD, le nationalisme du FFS, croit-on savoir, l'empêchera de pousser la région vers un second rejet qui pousserait de facto la Kabylie vers la voie de l'autonomie que l'écrasante majorité de la population rejette pourtant. La Kabylie, qui a besoin de gestionnaires locaux démocratiquement élus, ne se satisfera sans doute pas de représentants semblables à ceux qu'elle a au niveau de l'APN. Le bon sens, plus que tout autre considération, devrait l'emporter cette fois-ci pour le bien de la région. Les partis représentatifs de la région, de même que le mouvement citoyen, disposent d'un peu plus de deux mois pour réfléchir, prendre les contacts nécessaires et poser les conditions qu'il faut afin que la Kabylie ne rate pas cet autre rendez-vous avec son histoire, et peut-être même avec l'Histoire.