A la grève du Cnes s'est greffé le conflit récurrent entre le rectorat et le Forum des étudiants. Contrairement aux universités du pays, celle de Béjaïa vit une crise multidimensionnelle, qui, à en croire le recteur, M.Merabet, n'a rien à voir avec la science et la pédagogie. Mais elle n'a pas manqué de porter un coup dur au moral des étudiants et à l'ensemble de la famille universitaire. A la grève du Cnes, s'est greffé le conflit récurrent entre le rectorat et le Forum des étudiants dont la représentativité ne fait guère le consensus entre les étudiants. Cette situation conflictuelle a eu comme première conséquence la non-tenue des examens de fin d'année malgré toutes les dispositions prises par le Conseil scientifique et pédagogique. Les étudiants de cet établissement universitaire partiront, donc, pour la deuxième année consécutive en vacances sans passer leurs examens. En l'absence d'une réelle volonté de dénouer la crise, tout porte à croire que la rentrée prochaine sera, elle aussi, difficile. Depuis quelques semaines, le campus a commencé à se vider. Seuls quelques étudiants, gagnés par l'oisiveté, attendaient d'éventuelles informations sur les cours de rattrapage et la date des examens, dans un climat chargé d'interrogations sur les lendemains incertains. Notons, toutefois que les petits effectifs ont passé leurs examens normalement. Dans un point de presse, le recteur est revenu longuement sur la situation au sein de l'université de Béjaïa. Dans sa déclaration liminaire, le conférencier n'a pas hésité à annoncer que «l'université a fait un pas vers la modernité» et comme pour faire l'état des lieux, il dira: «L'université avance et se développe avec ses contradictions internes et les facteurs externes qui influent sur son évolution». Un bilan, positif, rendu public par la même occasion. La crise dans cette institution a réellement pris de l'ampleur au lendemain du 19 mars dernier, coïncidant avec la Journée nationale de l'étudiant. Conduits par le Forum, structure non reconnue par les responsables de l'université, les étudiants ont entamé la contestation ouverte par une marche de soutien aux étudiants de l'Université de Bouzaréah. Son interdiction par les autorités et les troubles, qui s'en sont suivis, ont fait que la situation s'est davantage aggravée. La condamnation de l'étudiant Cherfaoui, candamné quelques jours auparavant, à six mois de prison ferme, a provoqué la radicalisation de la contestation. Le Forum des étudiants avait exigé, alors, l'intervention du recteur pour sa libération. La réponse donnée par le recteur, soutenu à l'unanimité par le conseil scientifique et pédagogique élargi aux chefs de département, a fait monter la tension. Onze autres étudiants seront, par la suite, accusés de sabotage dans une plainte déposée par les services du rectorat. Depuis, les étudiants refusent de rejoindre les amphis exigeant «la libération de leurs camarades et le retrait de la plainte». Ce marasme persistant a fini par diviser même les étudiants qui se voient partagés entre le souci de se solidariser avec leurs camarades et celui de terminer l'année universitaire normalement en passant les examens. De leur côté, les enseignants ont, dans leur majorité, refusé de suivre le mot d'ordre de grève du Cnes. Seuls treize enseignants, sur les 404 que compte cette université, ont débrayé. Les autres ont, tout en soutenant les revendications salariales et statutaires, refusé celle liée à la perturbation des examens. Face à «l'insistance de certains militants politiques du Cnes à pousser ouvertement vers l'année blanche», le recteur a eu recours à la suspension de leurs salaires en application de la loi. En tout état de cause, l'université de Béjaïa, gagnée comme elle est par les luttes politiques, est loin d'être un exemple en matière de pédagogie et de science. Pour la deuxième année consécutive, l'année universitaire est rythmée par des conflits politisés.