«Nous demandons, par exemple, l'ouverture du champ politique et médiatique, l'instauration du multipartisme (...)» La secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), Mme Louisa Hanoune, occupe depuis quelques jours, à elle seule, la scène politico-médiatique que tous les autres acteurs politiques réunis. Elle met toute son énergie et son temps pour parvenir à collecter les «millions de signatures» qu'elle compte envoyer au Président Bouteflika sous forme de pétition accompagnée d'une lettre - où il est fait uniquement mention de questions nationales et non partisanes- pour l'amener à accorder quelques «concessions politiques et économiques». Si son cheval de bataille est aujourd'hui l'organisation d'élections législatives anticipées, la leader du Parti des travailleurs n'en appelle pas néanmoins à «une réforme politique globale à même de démocratiser les institutions de l'Etat», l'une des propositions figurant dans la lettre que compte adresser le PT au président de la République. Selon Ramdane Taâzibt, un membre influent du parti et chef du groupe parlementaire, cette reforme politique ne signifie nullement une rupture avec l'ancien système: «La réforme politique globale à laquelle nous appelons est un tout. Elle signifie d'abord une rupture par rapport au système du parti unique qui prévaut actuellement en haut de la pyramide de l'Etat. C'est aussi la rupture avec les pratiques en rapport avec les questions démocratiques. Nous demandons par exemple, l'ouverture du champ politique et médiatique, l'instauration du multipartisme, l'officialisation de la langue amazighe comme langue nationale et officielle à côté de l'arabe, la protection des droits sociaux et économiques des citoyens tels que l'emploi, la question des salaires et enfin l'égalité entre l'homme et la femme» dit-il. Notre interlocuteur ne nie pas que des «avancées considérables» et à tous les niveaux ont été enregistrés ces dernières années: «Nous avons constaté des avancées sur le terrain politique, économique et social, mais tout ça reste tout de même insuffisant!» Aussi, le PT appelle encore une fois à l'élaboration d'une Constituante, «une démocratie véritable» selon la dame du PT et «à la dissolution de la chambre basse (APN) car cette question a un aspect d'urgence», fait-il remarquer. Cette réforme politique ne signifie-t-elle pas un démantèlement du système politique actuel? Le chef du groupe parlementaire estime qui son parti «est contre cette idée parce que ce n'est pas dans l'intérêt de la Nation», mais demande en revanche une «plus grande implication de l'Etat» dans les domaines de l'éducation, l'économie et la santé. Sur le plan économique, le responsable du PT affirme que son parti a observé des «corrections», mais estime «nécessaire» que l'Etat fasse un plus grand effort pour «reprendre toutes les prérogatives» afin de «sauvegarder» les entreprises stratégiques comme «Sonatrach, Air Algérie, Sonelgaz et la Sntf» et enfin pour «initier» de grandes réformes économiques dans le but de renforcer le secteur public «en épongeant les dettes des entreprises en difficulté et en recapitalisant celles qui sont au seuil de la faillite». La secrétaire générale du PT a, par ailleurs, indiqué que le dernier amendement de la Constitution était «partiel», ajoutant qu'il est nécessaire de «demander un nouvel amendement où le peuple devra avoir son mot à dire». En somme, Louisa Hanoune demande un référendum sur une éventuelle révision de la Constitution. Après celle de 1996 et celle de 2007, la Constitution actuelle connaîtra-t-elle une nouvelle réforme? Et ce n'est pas un, mais deux appels en faveur d'une révision constitutionnelle qui ont vu le jour au cours des semaines passées. Pourquoi alors proposer une réforme 2 ans après? Une telle décision est-elle appropriée à seulement 36 mois des élections législatives? Les propositions du PT restent mesurées, comparées à celles du FLN, même si tous les deux prônent le respect des droits de l'Homme, avec une inscription de la primauté du droit national sur les lois internationales. Tout cela ne l'empêche pas d'exprimer sa position concernant les pouvoirs du Premier ministre et du Parlement que le PT voudrait voir bénéficier d'une série de prérogatives relevant actuellement de la Présidence. Un tel discours est certes peu surprenant de la part du PT, mais toutes ses propositions sont-elles applicables dans le contexte d'aujourd'hui? La réforme est présentée comme une nécessité absolue. Si consensus il y a sur le sujet, reste la question corollaire du timing. Y a-t-il urgence à réformer la Constitution aujourd'hui? Ou la démarche relève-t-elle plutôt de calculs électoraux? Le débat reste ouvert et deux acteurs constitutionnels peuvent lancer la machine: le président de la République et le Parlement.