«Si la pensée salafiste était une pensée positive, on aurait constaté depuis au moins un siècle les résultats d'un vrai projet politique, économique et culturel.» Le président de la Tariqa alawiya, Khaled Bentounès s'est attaqué avec une rare virulence aux thèses du courant salafiste dominant en Algérie lors de l'ouverture hier du Congrès international sur le soufisme qui se déroule à Mostaganen et ce, jusqu'au 31 juillet. Il a estimé que le port du hidjab pour la femme ne constitue pas «une obligation religieuse». Aussi, considère-t-il que «la femme ne doit pas céder à la force pour se voiler le visage». Il est bien vrai que de nos jours le foulard est devenu un symbole chargé de connotations religieuses, politiques et sociales. Mais les raisons qui poussent les femmes à le porter ou non sont souvent diverses. Bien qu'il n'y ait pas, en Algérie, de loi interdisant le port du foulard, l'image d'une femme qui, parce qu'elle porte le foulard, serait opprimée et dominée par la société patriarcale dans laquelle elle vit, ne tient plus, car la plupart des jeunes femmes sont directement impliquées dans leur décision de porter ou non un foulard. Le fils spirituel du fondateur de la Tariqa alawiya part même en guerre contre ce courant et met en doute une quelconque contribution de ce courant à l'Islam depuis 1886, date de la création à Paris par Mohamed Abdou et Djamel Eddine el Afgahni du courant salafiste: «Si la pensée salafiste était une pensée positive on aurait constaté depuis au moins un siècle les résultats d'un vrai projet politique, économique et culturel.» Le président de l'association qui s'est, mercredi dernier, exprimé sur les ondes de la Chaîne III a, sans l'ombre d'un doute désigné le courant salafiste de «danger pour elle d'abord et pour l'Islam ensuite». Ce denier estime en effet que la salafia a «donné une mauvaise image de l'Islam» car, à son avis celle-ci a également donné «une mauvaise impression de la religion musulmane auprès des autres». Sur un autre registre, le descendant spirituel du fondateur de la Tariqa alawiya appelle les autorités publiques à «barrer la route aux thèses des salafistes» qui tentent de s'incruster dans les campus universitaires. L'héritier de la Tariqa alawiya depuis 1975, s'est attaqué ensuite aux responsables de l'Association des uléma musulmans qui ont dénigré le contenu de son dernier livre. Il a qualifié les attaques proférées contre lui «d'absurdités». Dans un fascicule édité à l'occasion du centenaire du soufisme en Algérie, le président de cette tariqa, Khaled Bentounès, écrivain, conférencier et pédagogue, a même soutenu que les versets du Coran «ont aussi fait l'objet d'interprétations erronées car décontextualisées et parfois manipulées». Sans vouloir relancer la polémique, cette attaque frontale du président du courant soufi ne devrait pas laisser sans réaction l'Association des uléma. Les salafistes enseignent une version des plus rigoristes, de l'Islam et son livre. Ce courant prône un enseignement remarquablement «suprématiste, machiste et misogyne». Pour ce courant, les compatriotes non musulmans sont des «kouffars» (mécréants), les femmes sont de vraies perverses, et le peuple est «bête et ignorant». Outre la démocratie, la modernité, la laïcité et la liberté (surtout celle des femmes), il pourfend les «innovations» (bidah), la mixité, le théâtre, la musique et à peu près toutes les autres écoles de pensée musulmanes. Il prenait Abou Qatadah Al-Filistini comme référence. Ce «fanatique» qui résidait en Angleterre avait même prononcé des fatwas demandant de tuer les femmes et les enfants en Algérie. C'était le mufti du GIA et des autres groupes de cette mouvance. Selon plusieurs spécialistes de la question, le salafisme est une lecture de l'Islam née dans un contexte de «perdition de la pratique religieuse». Le salafisme est selon d'autres l'Islam originel: monothéisme pur, dogme unique et pur, avec toutes les interdictions et les permissions. Une centaine de conférenciers originaires de différents pays, dont le Japon et l'Indonésie, ont confirmé leur participation au congrès international sur le soufisme de Mostaganem, avec des thématiques variées tels les défis environnementaux, l'agriculture familiale, l'éducation, le développement durable. Des ateliers thématiques et des expositions sont également prévus qui permettront, respectivement, de concrétiser certaines réflexions et d'inviter au voyage à travers histoires, cultures et traditions de différentes régions du monde. Les sept journées de travaux seront consacrées, chacune, à une des thématiques retenues, à savoir la Terre, l'éducation d'éveil, la communication et les médias, la mondialisation, la révélation, la spiritualité et le soufisme et l'avenir.