L'amalgame sciemment entretenu par Nezzar entre le journaliste Fattani et Souaïdia transcende dans cet article. Dans un article qu'il a adressé ce week-end à des quotidiens nationaux de son choix, le général à la retraite, Khaled Nezzar, qui vient à peine de se remettre de son Waterloo parisien, croit toujours en sa bonne étoile. Son coup de génie, s'il en a un, c'est de penser qu'il est capable d'effacer sa déconfiture en rendant publique, tambour battant, l'assignation en justice, pour diffamation, engagée à l'encontre d'Ahmed Fattani, directeur de L'Expression. Selon le vieil adage, «un train peut en cacher un autre», Nezzar, qui vient à peine de clore son procès avec l'ex-sous-lieutenant Souaïdia, engage déjà un bras de fer avec Fattani, l'une des figures emblématiques de la presse algérienne, avec l'espoir de se refaire une virginité politique pour baliser la voie devant, selon lui, le mener, un jour ou l'autre, à ce Panthéon qui reste à construire en Algérie pour lui faire mériter sa place de héros national. Ce qui explique clairement pourquoi ce général, aujourd'hui, demande à la justice algérienne - qui sera rendue au nom du peuple - de juger l'HISTOIRE. Ni plus ni moins. Pourrions-nous, à ce stade de déraisonnement, l'empêcher de prendre ses désirs pour des réalités? L'amalgame sciemment entretenu par Nezzar entre le journaliste Fattani et Souaïdia, transcende dans cet article. Les Algériens connaissent aussi bien le journaliste et l'amour qu'il a toujours porté pour son pays que l'acharnement mis à défendre l'honneur de l'ANP à la télé, à la radio ou dans son journal L'Expression. Dès lors, pourquoi Nezzar cherche-t-il à faire l'amalgame entre ces deux personnages en soutenant que «le complot contre l'armée a commencé en Algérie depuis trois ans». Qui vise-t-il? Et pourquoi maintenant? Général à la retraite, ministre de la Défense nationale à la retraite et, à l'heure actuelle, sans fonction officielle, au nom de quoi Nezzar s'arroge-t-il le droit de parler? L'ANP n'a-t-elle pas récemment, par la voix de son chef d'état-major le général de corps d'armée, Mohamed Lamari, rappelé à l'opinion nationale qu'elle était sous les ordres du Président de la République? Si Nezzar persistait encore à parler au nom de cette armée, dont il ne fait plus partie aujourd'hui, il ne s'en prendrait alors qu'à lui-même si des Algériens l'accusaient d'imposteur. Mais le général n'est pas à une bourde près. N'affirme-t-il pas poursuivre Fattani en justice parce que ce dernier l'accuse d'être un «bourreau du peuple»? Jamais cette expression n'a été utilisée par notre directeur dans l'éditorial mis en cause, paru le 23 août 2001, et dont nous reproduisons ci-dessous l'intégralité (voir «Taisez-vous général!»). Pourquoi avoir attendu tout ce temps avant d'assigner en justice Ahmed Fattani? Quel dessein poursuit donc Nezzar qui, apparemment mal renseigné sur la personnalité de notre directeur, va jusqu'à inventer des remontrances qu'il aurait essuyées, à ce sujet, de la part d'un haut responsable? Lubie! L'esprit d'indépendance de Fattani est connu de tous ses confrères. Etant à la fois le directeur et le propriétaire de L'Expression, réputé homme d'honneur, il ne s'est jamais plié ni aux injonctions, ni aux menaces, ni aux remontrances de qui que ce soit. Excepté celles de sa propre conscience. Il est sûr, aujourd'hui, que ce n'est pas ce général qui a inventé la poudre. En s'attaquant à Fattani, Nezzar cherche délibérément à atteindre une autre cible quitte à s'illustrer dans le mélange des genres. Une chose est sûre, le général est contre les journalistes et la liberté d'expression. L'édito de Fattani, mis en cause aujourd'hui, est un point de vue développé par un journaliste par rapport à un événement, celui de la conférence de presse organisée alors par Nezzar à la Maison de la presse. Il peut être favorable ou défavorable, mais il reste l'appréciation d'une situation. Ce qui relève des missions d'une presse libre et indépendante. Entre Fattani et Nezzar, il n'y a pas un «fleuve», mais un océan de différence. Ils n'ont pas les mêmes amis (ceux de Nezzar s'appellent Leïla Aslaoui et Sid-Ahmed Ghozali), ni encore moins les mêmes valeurs! Rendez-vous au procès!L'Expression