Kurdes, Turcomans et Arabes se disputent la riche province pétrolière de Kirkouk. Les Arabes et les Turcomans de Kirkouk comptent sur le Parlement irakien pour supprimer un article de la Constitution prévoyant l'organisation d'un référendum sur l'avenir de cette province riche en pétrole du nord de l'Irak que le Kurdistan espère annexer. «Cette affaire n'est ni entre les mains du gouvernement irakien, ni dans celles du gouvernement régional kurde mais elle est du ressort du Parlement fédéral. C'est lui qui doit valider ou non cet article», assure le vice-président du parti turcoman al-Aadala, Hassan Torman. Le quotidien officiel As-Sabah a annoncé jeudi que la commission parlementaire chargée de réviser la Constitution suggérait d'amender ou d'ajouter une centaine d'articles. L'un d'eux propose de supprimer toute mention au référendum sur un éventuel rattachement de la province au Kurdistan, et de se borner à maintenir en place une commission chargée d'indemniser les personnes chassées ou ayant perdu leurs propriétés à la suite de la politique d'arabisation forcée sous Saddam Hussein. Pour entrer en vigueur, il faut que ces révisions soient adoptées par le Parlement puis par une majorité absolue d'Irakiens par référendum et à condition que trois gouvernorats ne les rejettent pas. Plus spécifiquement, l'article 140 prévoyait trois étapes avant le 31 décembre 2007: «La normalisation, le recensement et le référendum à Kirkouk et dans les régions disputées» entre Arabes et Kurdes. «Les décisions qui doivent suivre la normalisation sont caduques car la date limite fixée par la Constitution pour les mettre en vigueur a expiré», affirme Mohammed Khalil al-Joubouri, chef de la liste arabe au Conseil provincial. «Il faut seulement continuer à indemniser les gens qui ont été lésés», assure-t-il. La «normalisation», étape qui est encore en cours, consiste à retourner à la situation d'avant Saddam Hussein en faisant revenir les Kurdes qui ont été chassés de la province et en indemnisant les Arabes pour qu'ils regagnent leurs régions d'origine. A sa suite, les Kurdes, qui sont convaincus d'être majoritaires, tiennent à la tenue du référendum. «L'article 140 est constitutionnel et le gouvernement irakien doit le mettre en application même si la date indiquée est dépassée», insiste Shirzad Adel, un conseiller provincial de liste kurde Al-Taaki. «Le retard dans sa mise en application est dû à la lenteur des gouvernements successifs irakiens et nous espérons que les problèmes seront résolus avant les prochaines élections générales prévues en janvier», dit-il. Les trois provinces formant le Kurdistan représentent 40.000 km2 mais les forces kurdes, dans le sillage de l'invasion conduite par les Etats-Unis en 2003, ont étendu leur présence sur 75.000 km2 en prenant le contrôle d'une partie des provinces de Kirkouk, Ninive et Diyala. En visite au Kurdistan, le 2 août, le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki, avait affirmé prudemment que «l'article 140 était constitutionnel (mais) que le but ultime est de trouver une solution pour préserver les intérêts des différentes composantes du peuple (...) dans le cadre de l'Etat irakien». Riche en pétrole, cette province de quelque 900.000 habitants compte plusieurs communautés se disputant le pouvoir: les Kurdes, qui souhaitent son rattachement au Kurdistan irakien, les Turcomans, qui se considèrent comme ses habitants historiques, les Assyro-chaldéens (chrétiens) ou des Arabes, souvent arrivés à l'occasion de la politique d'arabisation forcée de Saddam Hussein.