Prévue pour aujourd'hui, elle tient des millions d'Algériens en haleine: c'est la nuit du doute. La nuit du doute. Encore une fois, la polémique enfle sur la détermination du premier jour du Ramadhan. Alors, allons-nous jeûner demain ou après-demain? Attendons cette nuit pour voir et savoir. Cela nous rappelle les querelles byzantines autour d'une question qui remonte à quinze siècles. Et pour cause! Chaque année, les Algériens, à l'instar des musulmans du monde entier, subissent, à leur grand dam, les divergences des différentes instances religieuses et centres de recherches en astronomie. Point nodal: suivre les calculs astronomiques ou les observations empiriques de la lune? En effet, les membres de la commission de l'observation du croissant se conforment strictement à la tradition du Prophète Mohammed, (Qsssl), qui a décrété: «Jeûnez après l'observation (du croissant), et célébrez la fin (du Ramadhan) après l'observation». Une méthode qu'il a léguée aux fidèles musulmans pour pouvoir distinguer le premier et le dernier jour du mois sacré. Elle consiste en l'observation du ciel après le coucher du soleil. Si on signale l'apparition du nouveau croissant, alors le Ramadhan débute le lendemain. Dans le cas contraire, le jeûne est reporté au jour suivant. Pour leur part, les académiques mettent en exergue l'avancée des méthodes de prévisions astronomiques. «La science s'appuie sur une règle astronomique soutenue par des hadiths et des versets coraniques», a avancé Loth Bounatiro, docteur d'Etat en astronomie et technologie spatiale. Selon lui, la science ne peut pas se dissocier de la religion. Outre le hadith évoqué, il a rappelé un autre, selon lequel le Prophète a dit: «Le jour de votre jeûne correspond au jour de votre sacrifice.» Ce qui implique que le premier jour du mois de Ramadhan correspond au même jour de la semaine que celui du sacrifice religieux du mouton. Une autre règle, mathématique celle-ci. Le Ramadhan, neuvième mois de l'année lunaire, glisse chaque année sur le calendrier solaire de 11 jours. Exception faite pour les années bissextiles qui reviennent chaque quatre ans, où le mois de février comprend 29 jours. Là, le calendrier glisse uniquement de deux jours. Dans ce cas, et selon les calculs de M.Bounatiro, le premier jour du mois de Ramadhan sera le vendredi 21 août. Par ailleurs, M.Bounatiro a proposé une solution future pour unifier les peuples musulmans autour d'une même date de Ramadhan. D'après lui, «il faut appliquer la décision des deux conférences islamiques tenues, pour la première, à Istanbul en 1973, et pour la deuxième en 2001 à Djeddah». Pour rappel, ces conférences ont réuni des hommes de religion et des astronomes. Ces derniers se sont mis d'accord pour que l'observation du croissant se fasse à partir de la Mecque. «Ce qui équivaut à une observation à l'échelle mondiale et non à l'échelle locale», a précisé Loth Bounatiro en déplorant, toutefois, le manque de volonté politique des gouvernements musulmans (l'Algérie entre autres) à appliquer une décision approuvée à l'unanimité. Malgré toutes ces vérités scientifiques, les religieux persistent à soutenir la «rokia». D'ailleurs, les pays du Maghreb appellent cette nuit «la nuit du doute». Par contre, les pays du Golfe, plus avancés en matière de science et de religion, préfèrent l'appeler «la nuit de la surveillance du croissant lunaire». Par ailleurs, M.Bounatiro a parlé d'une découverte à lui qui «faciliterait beaucoup la fixation des dates religieuses et du temps dans le calendrier lunaire». Une découverte qu'il a annoncée en 2003, et selon laquelle le calendrier lunaire, au demeurant un calendrier spatial, doit avoir son repère sur la Terre, tout comme le calendrier solaire avec son méridien Greenwich. Ce repère, M.Bounatiro l'a défini comme étant le méridien qui passe par la Mecque-Médine.