En Algérie, le ministère de la Santé a recommandé d'éviter de voyager dans des pays à forte endémicité de grippe AH1N1. Faut-il ou non accomplir la Omra (le petit pèlerinage) cette année? Serait-il préférable de la reporter? Deux questions épineuses qui divisent les hommes de religion. Les avis divergent sur cette question. La dernière fetwa en date remonte à jeudi. Un mufti saoudien a qualifié de «pêché» le fait d'aller à La Mecque quand on est porteur du virus AH1N1. Ce mufti a vraisemblablement évité d'aller au fond du problème. Celui de savoir qui assumera la responsabilité du décès du pèlerin en terre sainte. D'autres ont bien voulu s'aventurer dans ce débat. Les avis émis par les religieux sont diamétralement opposés. Certains affirment que celui qui meurt de la grippe porcine en allant accomplir un pèlerinage sera compté parmi les martyrs. D'autres, en revanche, soutiennent que ceux qui vont à La Mecque en sachant qu'il y a un fléau sont plus proches du suicidé que du martyr. Qui croire dans ce cas? Peut-on effectuer la Omra? Qui est habilité à émettre une interdiction de se rendre aux Lieux Saints en pareil cas. Evidemment, quand il s'agit d'un problème de santé publique, c'est le pouvoir politique qui prend le relais. C'est le cas d'ailleurs de l'Egypte qui n'a pas osé actionner son ministère de la Santé pour faire taire toutes les voix discordantes des fatawi. L'institution politique a donc pris le relais dans ce pays où, pourtant, la tradition islamiste est très forte. Le ministre de la Santé égyptien a annoncé qu'aucun visa de Omra ne sera délivré. La décision a été prise suite au décès d'une femme qui venait de rentrer d'Arabie Saoudite. La grippe porcine pour ce pays est un problème de santé publique de prime abord. Les risques encourus par deux millions et demi de personnes rassemblées dans un espace réduit et parfois clos, ne relèvent pas seulement d'une appréciation, pensent certains. Le risque doit être mesuré par les spécialistes les plus indiqués. C'est aux médecins, aux virologues de dire si le pèlerinage 2009 comporte un risque «modéré», «gérable» ou grave. Et si un avis religieux doit être édicté, il doit l'être sur la base de ces évaluations scientifiques. Une thèse qui a tendance à se confirmer petit à petit en Algérie. Cela se lit à travers le communiqué publié hier, par le ministère de la Santé après la détection de quatre nouveaux cas de grippe porcine. Le département de Saïd Barkat rappelle que «sauf cas de force majeure, il est recommandé d'éviter de voyager dans des pays à forte endémicité de grippe AH1N1 et que, dans tous les cas, les voyageurs sont tenus de se conformer aux consignes données par l'autorité sanitaire du pays d'accueil», parmi les pays classés à forte endémicité de grippe A/H1N1 il y a l'Arabie Saoudite. Quelques jours auparavant, le ministère des Affaires religieuses et des Wakfs a renvoyé la balle à la Santé affirmant qu'il ne peut prononcer aucune décision d'annulation du Hadj tant que le ministère de la Santé n'a pas donné le feu vert. Tout en dégageant sa responsabilité, le ministre des Affaires religieuses et des Waqfs multiplie les déclarations affirmant que le Hadj ne sera pas annulé cette année. Pourquoi alors rassurer les hadji alors que la décision finale revient au ministère de la Santé? Le virus de la grippe H1N1 a mis à nu tous les dysfonctionnements qui existent au sein de nos différents départements ministériels. Le président de l'Office du Hadj, M.Barbara, s'en remet, lui, à la décision de l'Organisation de la conférence islamique (OCI). En l'absence de statut du mufti de la République, c'est le Haut conseil islamique qui est censé se pencher sur ce dossier. Mais ce dernier ne peut le faire sans être préalablement saisi par une institution officielle. Avant l'Egypte, les autorités tunisiennes ont décidé, au titre de mesures préventives adoptées face aux risques de contraction du virus A(H1N1), de suspendre les voyages de la Omra (le petit pèlerinage), mais les craintes que les Lieux Saint soient la plate-forme de la propagation de la terrible épidémie se font plus persistantes.