Deuxième jour du Ramadhan, la température flirte avec les 35°, le taux d'humidité rend l'air lourd et irrespirable. La ville est désertique à 8 heures du matin. Situation inhabituelle pour une journée de reprise du travail après un week-end semi-universel. Devant le siège de l'APC, il y a foule. On distribue les bons de l'opération «Couffin du Ramadhan». Le désir d'être servi le premier, le grand nombre de présents, l'exiguïté des locaux du service social de l'APC, créaient une situation de blocage. Les employés de la mairie n'arrivent pas à rejoindre leurs postes. Le secrétaire général invite et supplie pendant une bonne heure les occupants: «Sortez dehors dans la cour pour que les employés puissent faire leur travail...» Certains s'appliquent, alors que d'autres sont réticents, ils veulent passer les premiers. On fait appel aux agents de l'ordre. Arrivé sur place, l'officier constate et analyse la situation au moment où un agent tente de pousser les gens loin de la fenêtre d'où sont distribués les bons. Il se dirige vers son véhicule, dépose son FMK et opte pour un gros gourdin, mais devant l'anarchie et les bousculades, l'officier décide de repartir avec ses éléments. Une chaîne se forme, composée en grande majorité, de femmes. Les commentaires fusent de partout. «Quand on nous donne une aide, on nous ridiculise d'abord. Eux, ils se servent dans la discrétion totale», se plaindra un bénéficiaire à la barbe garnie. Nous rentrons chez le secrétaire général qui déplore cette situation, l'attribuant à ceux qui ont investi les locaux tôt le matin. «On pouvait leur remettre leurs bons dans d'excellentes conditions, mais ils ne nous ont pas laissé le choix...» Par une fenêtre barreaudée, les citoyens remettent la pièce d'identité à l'agent qui vérifie le nom sur une liste. Si le nom figure, l'intéressé reçoit un bon signé par le vice-président et se dirige ensuite vers la salle omnisport pour prendre un sac de semoule, 1 bidon d'huile de 5 litres, 2 boîtes de lait en poudre, 1 boîte de concentré de tomate (1 kg) 2 kilogrammes de pois chiche, 5 kg de vermicelle, 4 kg de sucre et 1 kg de café. Sur le lieu d'enlèvement les choses sont beaucoup mieux organisées. Trois agents du service social s'attellent à servir les bénéficiaires dans de meilleures conditions. Lors de notre passage, nous avons remarqué la présence d'une femme portant des bracelets en or valant plus de 140.000DA et aussi la présence d'un fonctionnaire qui, récemment, a aménagé son logement à coup de millions! Dans le bureau du président de l'APC, de nombreuses femmes sont venues exprimer leur colère: «Depuis toujours on a bénéficié des aides de la commune, cette fois on nous a rayés de la liste...» Pour le responsable, c'est peut-être une omission: «Revenez dans quelques jours et on réglera votre cas.» Pour l'autre action de solidarité, nous apprenons que la commune a réquisitionné l'ex- Munatec où chaque soir seront servis 250 repas aux nécessiteux et jeûneurs de passage.