Il n'a laissé aucune chance à ses concurrents. Avec sa fusée Usain Bolt, aussi performante qu'aux JO de Pékin, la Jamaïque, et plus largement les Caraïbes, ont confirmé leur domination sur le sprint, lors des 12e Championnats du monde d'athlétisme, disputés à Berlin du 15 au 23 août. Avec Bolt, la répétition est de circonstance. Mais ce n'est pas la faute de «L'Eclair» si l'extraordinaire qu'il offre au monde est finalement son ordinaire. Après son festival à Pékin, le Jamaïquain a de nouveau enflammé la compétition, s'est offert trois titres (100 m, 200 m, relais 4X100 m) avec un incroyable record du monde de 9 sec 58 sur 100 m (et 19 sec 19 sur 200), et a volé la vedette à l'applaudimètre à tous les autres athlètes. Et dans son sillage, c'est tout le sprint jamaïcain qui a brillé en dominant outrageusement les débats. La Jamaïque termine ainsi deuxième du tableau des médailles, avec sept titres (et un total de 13 médailles), contre un seulement en 2007 à Osaka (12 médailles). Seuls les Etats-Unis ont réussi à faire mieux. Maîtres du tour de piste et des relais du 4X400 m, les Américains restent premiers au tableau des médailles (10 en or, 22 au total). Mais ils ont tout juste sauvé l'honneur en sprint court grâce à leur gazelle Allyson Felix, reine du 200 m (3e titre mondial de suite). Américaine il y a encore quelques années, la vitesse est de nouveau de marque jamaïcaine. Un rappel s'impose là aussi: l'île avait déjà affiché sa supériorité au sortir de la Seconde Guerre mondiale, avant que la diaspora n'enrichisse d'autres pays, les Etats-Unis en premier lieu. Cette suprématie est désormais un phénomène régional. Le Barbadien Ryan Brathwaite a ainsi donné une existence athlétique à son pays en remportant, à la surprise générale, le 110 m haies, alors que le Panaméen Alonso Edward, physique de pur-sang rappelant son compatriote Irving Saladino, champion olympique 2008 et du monde 2007 du saut en longueur, a été le meilleur sur 200 mètres derrière Bolt, intouchable pour le moment. C'est d'autant plus intéressant que Brathwaite a 21 ans et Edward pas encore 20. Trinité-et-Tobago, un million d'habitants, avait déjà pris place dans le gotha du sprint avec Ato Boldon et Darrel Brown. Lequel a emmené le relais 4X100 m de son minuscule pays sur la 2e place du podium, à la droite de la Jamaïque. Cuba, même région mais système politique différent, est resté sur son standard habituel (6 médailles), malgré l'échec de Dayron Robles. Le champion olympique du 110 haies, diminué physiquement, n'a pu défendre son statut. En dehors du sprint, le Kenya (4 titres, total de 11 médailles) a confirmé son leadership sur le demi-fond. L'absence de Tirunesh Dibaba, blessée, a été un trop lourd handicap pour l'Ethiopie. Consolation néanmoins pour la délégation d'Addis Abeba: Kenenisa Bekele a été l'autre héros des joutes berlinoises avec le doublé inédit 5000/10.000 m. La Russie a rétrogradé au 4e rang (4 titres aussi, mais moins de médailles d'argent que le Kenya). Et la défaillance de la tsarine de la perche Yelena Isinbayeva n'est qu'un épiphénomène de cette chute. Encore heureux pour les Russes qu'ils aient dominé les trois épreuves de la marche avec leur école de Saransk (République de Mordovie). A domicile, outre une organisation sans faille, l'Allemagne s'est offert une belle collection de médailles (9, dont deux en or) essentiellement grâce aux concours. A noter aussi la performance de la Pologne (8 podiums) qui, comme sa voisine, privilégie les lancers, le dernier domaine dans lequel la vieille Europe, quasiment inexistante en sprint et en demi-fond, domine encore. La polémique des Mondiaux est venue, bien malgré elle, de la jeune Sud-Africaine Caster Semenya, championne du monde du 800 m mercredi mais soupçonnée d'être un hermaphrodite.