«L'égalité ne signifie plus la même éducation pour tous , mais la meilleure éducation pour chacun.» Plaidoyer pour une école créatrice de renaissance est le titre du nouvel ouvrage de M.Khaled Chaïb, édité aux Editions Musk. M.Chaïb qui est l'auteur de cinq autres ouvrages, dont trois traitant spécialement de la problématique du système éducatif, revient sur le sujet en s'appuyant sur le message qu'a adressé le Président de la République à la Commission de réforme du système éducatif. L'ouvrage commence avec un diagnostic sans complaisance de l'état et de l'esprit qui ont présidé à l'école au lendemain de l'Indépendance. Le recouvrement de la souveraineté nationale a mis l'Algérie face à des défis nouveaux, et confrontée aux multiples conséquences du sous-développement. Les premières réformes, partielles, «n'ont pu aboutir à la rentabilisation escompté du système», juge l'auteur s'appuyant sur des chiffres relatifs au départ de près de 18.000 instituteurs français et le recrutement hâtif de cadres souvent sous-qualifiés pour renflouer les aspirations du nouvel Etat. L'auteur mentionne aussi les germes des conflits idéologiques qui sont apparus lors de cette période critique. Les mutations qui ont touché les cycles du secteur dans le cadre des plan triennaux et quadriennaux ont consacré «une diffusion massive de l'enseignement...L'aspect qualitatif, s'il était non moins important que l'aspect qualitatif, apparaissait, hélas, aux dirigeants comme secondaire», relève le Dr M.Bennoun, dans son livre Education - Culture et développement, cité par l'auteur. La période Chadli est, elle aussi, passée au crible. L'auteur n'y voit pas moins qu'une entreprise de «castration de l'intelligence et partant la médiocratisation de l'esprit». Il prend à témoin le décret exécutif du 18 février 1986 nantissant les walis du pouvoir de désigner les directeurs de l'éducation. «Un véritable saccage du secteur, donné en pâture aux caprices des uns et des autres.» Une bureaucratie tentaculaire prit forme et élimina alors les quelques cadres de valeur. La valse des ministres, un conseil national de l'éducation dont les membres s'étaient mués en représentants de factions rivales, l'instabilité politique...ont scellé la dégradation de l'Ecole algérienne. Cela pour ce qui est du volet historique. L'auteur passe ensuite à un état des lieux où il fait ressortir les distorsions à l'origine de l'échec. «Dans son orientation et ses contenus, cette politique éducative a subi les contraintes de l'idéologie. Cela s'est traduit par un décalage notable entre le projet de société et la réalité sociale en évolution. Le décalage peu manifeste au départ s'est progressivement aggravé, pour aboutir à une véritable crise d'adaptation de l'école»Les effets? «une société mutilée intellectuellement et socialement marginale» Pour l'auteur, cette douloureuse évocation, souvent tragique, est nécessaire pour la définition de la forme du système éducatif. M.Chaïb projette après cela les théories en vigueur dans les pays où les systèmes en vigueur ont fait leurs preuves, non sans signaler au passage que le chantier en cours devra se garder d'en dépendre sous peine d'une cessation d'existence. «L'heure est venue, dit-il, pour une politique éducative qui, au moment propice, saura s'arrêter, relire la conjoncture, discerner les urgences et proposer les virages qui s'imposent.» Les axes qui devraient présider à cette renaissance sont développés par l'auteur sur 250 pages. Le livre s'inspire de l'expérience vécue par les autres: comment ont-ils formulé leurs politiques, défini leurs priorités, conçu leurs stratégies, mis en oeuvre des programmes et veillé à leur réalisation. M.Chaïb, professeur et membre de l'Institut national de recherche en éducation, fait là une contribution dont nous ne saurions transmettre la valeur. Plaidoyer pour une école créatrice de renaissance est une lecture éclairée, un livre qui nous concerne tous.