Le procès Clearstream entre dans sa dernière semaine, qui sera marquée par le réquisitoire du parquet contre l'ex-Premier ministre Dominique de Villepin, soupçonné d'avoir trempé dans une machination visant à déstabiliser Nicolas Sarkozy dans sa course à la présidence. Avant l'intervention demain du procureur de Paris, M. de Villepin devra faire face aux attaques de l'avocat du chef de l'Etat, partie civile dans ce procès, Me Thierry Herzog, qui plaidera aujourd'hui. L'ancien Premier ministre est l'un des cinq co-accusés dans ce procès hors normes. Il est soupçonné d'avoir participé à une manipulation en 2004, dans laquelle des noms de personnalités, dont celui de M.Sarkozy, ont été ajoutés sur des listings bancaires, ensuite transmis à la justice, afin de les discréditer en faisant croire qu'elles détenaient des comptes occultes. Pour le parquet de Paris, M. de Villepin, alors ministre de l'Intérieur, s'est rendu complice de la dénonciation «au moins par son inaction» en n'avisant pas la justice que les listings étaient faux, à l'été 2004, alors qu'il était au courant. «Les juges disent que (M. de Villepin) est l'instigateur premier de l'ensemble du système. Moi, je dis qu'il est un des bénéficiaires collatéraux, mais parfaitement conscient», avait déclaré fin août le procureur de Paris, Jean-Claude Marin. Dominique de Villepin, qui à l'époque de l'affaire siégeait dans le même gouvernement que Nicolas Sarkozy, est soupçonné d'avoir ainsi voulu déstabiliser son grand rival dans la course à la présidentielle de 2007, pour succéder à Jacques Chirac. Le procureur de Paris, qui soutient l'accusation au procès Clearstream depuis un mois, n'a pas hésité à se montrer offensif, voire agressif à l'encontre de M. de Villepin dans ses interventions. Demain c'est lui qui sera chargé de requérir contre l'ancien Premier ministre. La défense de M. de Villepin répondra dès mercredi, au cours d'une longue journée de plaidoiries. Maîtres Olivier Metzner, Henri Leclerc, Olivier D'Antin et Luc Brossolet, se succéderont jusqu'au soir pour convaincre le tribunal que leur client, poursuivi notamment pour «complicité de dénonciation calomnieuse», n'a rien à se reprocher. Dominique de Villepin, qui ne cesse de clamer son innocence, a été mis en difficulté à mi-parcours du procès par le témoignage-clé d'un ancien maître espion, le général Philippe Rondot, qui enquêtait sur ces listings Clearstream, et dont les notes ont contredit la version de l'ex-Premier ministre sur plusieurs points. M. de Villepin, 55 ans, risque dans cette affaire jusqu'à 5 ans de prison et joue son avenir politique. Lundi dernier, à la clôture des débats, il avait déclamé une longue plaidoirie. Conscient que le parquet s'apprête à demander sa condamnation, car «il faut un bouc émissaire», il s'était adressé au procureur: «Je lui souhaiterais de requérir le coeur aussi léger qu'est le mien ce soir, car mon honneur n'est pas ici en cause», avait-il dit. «La haine envers Nicolas Sarkozy ne m'a jamais habité», «ma vie est devant moi», avait-il conclu. Les journées de jeudi et vendredi seront consacrées aux plaidoiries des avocats des quatre autres personnes poursuivies, l'ancien vice-président du groupe Eads, Jean-Louis Gergorin, le mathématicien Imad Lahoud, faussaire présumé des listings, enfin le journaliste Denis Robert et l'auditeur Florian Bourges. La décision du tribunal correctionnel de Paris devrait être mise en délibéré début 2010.