Rassurer le citoyen reste le souci majeur des services de sécurité. Alors que la lutte antisubversive induit «un climat de guerre». Les milliers d'éléments des forces de sécurité injectés dans la capitale, sa périphérie et les villes côtières, répondent au souci majeur de sécuriser ces endroits stratégiques pour les GIA. Le plan «Delphine», la «police de quartier» et les autres dispositifs sécuritaires mis en place dans les agglomérations urbaines sont un maillage à la fois «rigoureux et mouvant», dit un responsable de la Dgsn, en ajoutant que «les dispositifs statiques dans un tissu urbain dense, fluctuant et rapidement changeant ont été une erreur». En fait, ce qui reste à faire est beaucoup plus profond que le simple souci de répondre à une situation de crise. A force de réagir par à-coups à des conjonctures données, en plaçant à chaque fois plus d'agents, en raffermissant les systèmes de contrôle et en donnant l'impression de maîtriser la situation, on arrive à une image de «société supersurveillée, superinfiltrée et quasiment épiée». Loin d'avoir atteint les objectifs de départ, cette situation s'apparente alors à une antidermatique dangereuse et surtout à une généralisation du «droit de regard», où beaucoup, beaucoup trop d'hommes seront au courant de tout ce qui doit être du seul ressort du palier supérieur des services de renseignements. Hormis ce risque majeur qui pourrait dévier de leur trajectoire les plans de sécurisation, il y a aussi le fait de disparités importantes en matière d'affectation d'hommes. Prenons au hasard une ville comme Bou Ismaïl, qui reste un passage obligé de divers GIA et donc, une «région à risques». Jusqu'à une date récente (2001), il n'y avait qu'un petit commissariat de police pour assurer la sécurité des personnes et des biens. Prenons maintenant, une autre ville: Cherchell, qui est, elle, hyperprotégée, sans souffrir, pour autant, des mêmes risques que la ville de Bou Ismaïl, beaucoup plus importante sur tous les plans. Plusieurs casernes militaires (outre l'Académie militaire inter-armes), deux postes de police, une brigade de gendarmerie et deux camps de gardes communaux surveillent la petite station balnéaire située à 100 km d'Alger. Il y a aussi le problème que posent les régions à risques. Y a-t-il un plan de sécurité pour chaque ville qui s'appuie sur les dangers que présentent les GIA de la région ? Voir... Les mêmes zones-crise continuent à produire les mêmes dangers, les mêmes périls et les mêmes risques. Le «croissant fertile», qui boucle l'Algérois (Cherarba, Meftah, les Eucalyptus, Larbaâ, Bougara, Ouled Slama, Bouinan, Boufarik, Attatba, Tipasa, Chenoua, etc) continue à produire les mêmes risques étant donné que les sources de tension n'ont pas changé. C'est en fait tout ce patchwork sécuritaire, où le politique, le social, le culturel et le religieux se mêlent et se démêlent au gré des conjonctures, qui reste à décrypter. En face, les GIA vont d'une atomisation à une autre et chaque scission crée de nouveaux groupes qui chevauchent la criminalité, le grand banditisme et le théologique. La récente mort de Abdelkader Saouane, par exemple, va fractionner le Gspd en quatre ou cinq sous-groupes tout aussi dangereux et autonomes les uns que les autres.