La rue semble être le dernier recours du citoyen pour faire entendre ses doléances. «La balle est dans le camp des autorités», avertissait un habitant des lieux. Hier, les représentants de la cité Diar Echems, à El Madania, attendaient la réponse officielle du wali d'Alger. Celle-ci devait intervenir dans la soirée. La veille, ils étaient 26 citoyens à s'être rendus chez le wali délégué de Sidi M'hamed. «Ce dernier nous a promis de nous rendre la réponse ce soir (hier)», affirmait l'un des représentants des habitants du quartier. Quels sont les points sur lesquels vous vous êtes entendus? Le représentant ne veut pas donner de réponse hasardeuse. «Pour le moment, rien n'est officiel» se contente-t-il de dire. La cité compte 13 bâtiments. Les délégués ont été désignés à raison de deux personnes par immeuble. Hier, sur les lieux, au moment de notre passage, régnait un calme précaire. Portant sa fillette dans ses bras, un autre résident explique la démarche des citoyens. «Nous voulons montrer aux autorités que nous ne sommes pas des personnes incultes». Un jeune homme, la vingtaine, lui emboîte le pas: «Notre revendication est légitime et notre démarche pacifique.» Pourtant, il y a eu des échauffourées avec les forces de l'ordre. Le jeune homme fulmine: «Ce sont eux qui nous ont provoqués. A leur arrivée, ils ont commencé à proférer des obscénités. Je vous assure qu'ils n'ont même pas eu le souci de respecter les familles des résidents.» Sur ces propos, un commerçant montre une bombe lacrymogène. «C'est avec ces projectiles qu'ils ont tiré en direction des maisons», dénonce l'homme proche de la quarantaine. Dans la cité Diar-Echems, des pièces de 16 mètres carrés peuvent abriter jusqu'à 13 personnes. Alors, l'espace vital et l'intimité, «cela relève d'un voeu pieux», regrette un vieil homme. La crise du logement se pose avec acuité dans le pays. Et ce qui ce passe un peu partout dans le pays en montre suffisamment la gravité. Cependant, tout cela est symptomatique d'un mal encore plus profond. Voir les représentants de l'administration «négocier directement» avec les citoyens ouvre la voie à beaucoup de questions: où sont les élus locaux et nationaux censés représenter le peuple? Ces derniers se murent dans un silence inquiétant. Cela dit, les prérogatives des représentants du peuple sont-elles à ce point réduites, que l'administration doit traiter avec les délégués de quartiers? Ces dites «négociations» se déroulent-elles dans le respect de la légalité? D'autre part, comment en est-on venu à engager un processus de «négociations» avec les citoyens pour un problème de logements? A ce rythme, il ne manquerait plus que de faire appel aux bons offices internationaux pour l'exécution des différents programmes de développement. Et dire que le logement fait partie des préoccupations nationales majeures. Sur un autre plan, comment se fait-il qu'un simple fait divers de quartier, qui se produit un peu partout dans le monde, soit aussi médiatisé par les télévisions du monde? A ce jeu, la chaîne française France 24 et la chaîne qatarie Al Jazeera n'ont pas manqué l'occasion pour amplifier les événements. En effet, derrière une couverture supposée être «objective» se cache un dessein pas du tout dénué de mauvaises intentions: la diabolisation de l'Algérie. Cet état de fait est encouragé par le silence qu'observent les autorités publiques. Lequel silence est parfaitement illustré par le mutisme où s'est confinée la Télévision algérienne. Comme d'habitude, laissant le soin aux médias étrangers de prendre en charge une information dont l'intérêt ne concerne, en tout état de cause, que les Algériens.