A Téhéran, de hauts responsables iraniens multiplient depuis samedi les déclarations contre le «projet d'accord» présenté mercredi à Vienne par l'Aiea. Les experts de l'Agence internationale de l'énergie atomique devaient visiter hier le nouveau site d'enrichissement d'uranium de Qom, alors que Téhéran affiche une méfiance grandissante sur le «projet d'accord» d'enrichissement de ce minerai à l'étranger. Selon les médias iraniens, les quatre inspecteurs, arrivés dans la nuit, doivent rester trois jours en Iran. L'existence du site en construction à Qom, qui selon Téhéran pourra accueillir 3000 centrifugeuses d'enrichissement d'uranium, n'avait été révélée par l'Iran à l'Aiea que le 21 septembre. L'Iran refuse de geler ses activités d'enrichissement d'uranium malgré cinq résolutions du Conseil de sécurité, dont trois assorties de sanctions, demandant leur suspension. A Téhéran, de hauts responsables iraniens multiplient depuis samedi les déclarations contre le «projet d'accord» présenté mercredi à Vienne par l'Aiea, et qui prévoit, pour apaiser la crise sur le nucléaire, que l'Iran fasse enrichir en Russie son uranium faiblement enrichi, qui serait ensuite retraité par la France et rendu à l'Iran sous forme de combustible nucléaire pour son réacteur de recherche de Téhéran. Un expert nucléaire iranien, Abolfazl Zohrevand, a déclaré hier que les Occidentaux cherchaient à obtenir la suspension des activités de l'enrichissement d'uranium à travers le «projet d'accord», selon l'agence Irna. «Ils (Occidentaux) ont transformé leur proposition comme une sorte de suspension. Ils veulent faire sortir du pays d'un seul coup 70% de notre uranium enrichi» à 3,5%, a déclaré M.Zohrevand. «Il nous faudra 18 mois pour produire de nouveau cette quantité d'uranium enrichi et durant cette période ils auront l'opportunité de faire pression sur nous pour obtenir ce qu'ils cherchent», c'est-à-dire la suspension du programme d'enrichissement iranien, a-t-il ajouté. Un député iranien, Heshmatollah Falahatpishe a déclaré que l'Iran ne «devait pas entrer dans ce jeu dangereux», selon Irna. Les Occidentaux accusent l'Iran de chercher à se doter de l'arme nucléaire sous couvert d'activités civiles, ce que Téhéran dément. La question de l'enrichissement d'uranium est à cet égard centrale, car si l'uranium faiblement enrichi est employé dans les centrales nucléaires, le minerai fortement enrichi peut permettre l'élaboration d'armes. Selon des diplomates occidentaux, le «projet d'accord» prévoit que l'Iran livre d'ici la fin 2009 1200 kg d'uranium enrichi à moins de 5% pour le faire enrichir à 19,75% en Russie avant que la France n'en fasse des «coeurs nucléaires» pour le réacteur de Téhéran. Ali Bagheri, un des négociateurs iraniens, a déclaré samedi que l'Iran recevrait en retour 110 kg d'uranium enrichi à environ 20%, suffisants pour alimenter le réacteur de Téhéran pendant 10 à 15 ans. «Les Occidentaux cherchent à (nous) tromper et nous imposer des choses», a accusé samedi, selon l'agence Isna, M.Larijani, en affirmant que selon les règles de l'Aiea, les Occidentaux devaient fournir le combustible nucléaire sans contrepartie. «Ils affirment qu'ils nous donneront le combustible avec un niveau d'enrichissement à 20% à condition que nous leur donnions notre uranium enrichi (à 3,5%), nous ne voyons aucun lien entre ces deux choses», a ajouté cet ancien négociateur en chef pour les questions nucléaires. L'idée d'un tel accord avait pourtant été présentée le 30 septembre par Ahmadinejad lui-même. «Nous avons besoin d'uranium enrichi à 19,75%. Nous l'avons dit, et nous proposons de l'acheter à quiconque est prêt à nous le vendre. Nous sommes prêts à fournir de l'uranium enrichi à 3,5% et ils pourront l'enrichir davantage et nous le livrer à 19,75%», avait-il dit à la veille d'une réunion à Genève entre l'Iran et le groupe 5+1 (Etats-Unis, Russie, Chine, Grande-Bretagne, France et Allemagne), au cours de laquelle un accord s'était dessiné sur la question.