«On doit écrire ensemble pour créer une civilisation qui n'est pas le cas aujourd'hui», a souligné Mustapha Chérif. En marge du Salon international du livre qui s'est ouvert mardi dernier, une rencontre des écrivains euro-méditerranéens, sous le thème: «Le dialogue interculturel et le rôle des écrivains dans la promotion de la diversité», a été organisée par la délégation de la Commission européenne en Algérie à la filmothèque Mohamed-Zinet. La ministre de la Culture, Mme Khalida Toumi, a indiqué dans une allocution, lue en son nom par son chef de cabinet, Mme Zehira Yahi que «les écrivains, qui sont des créateurs individuels, peuvent paradoxalement être un vecteur collectif puissant de dialogue interculturel et l'accès réciproque aux littératures étrangères qui rend les peuples et les sociétés de moins en moins étrangères les uns envers les autres». La ministre a relevé que «l'Europe accueille, de plus en plus, les littératures du Sud et, s'agissant de l'Algérie», a-t-elle fait savoir, «nous pouvons voir que de plus en plus d'auteurs ont désormais des lectorats européens importants, présence amplifiée par le mouvement des traductions». «La rencontre d'aujourd'hui s'inscrit pleinement dans la continuité de la politique européenne de promotion de l'échange interculturel, et nous sommes heureux qu'il s'organise sous le patronage de Mme la ministre de la Culture, signe de la qualité de notre coopération», a souligné, pour sa part, Mme l'ambassadrice Laura Baeza, et chef de délégation de la Commission européenne à Alger. «Cette approche est une première, et cela représente un défi à relever, mais aussi un symbole très important de rapprochement entre les politiques et les hommes de culture de toute la région», a-t-elle précisé. Et d'enchaîner, en ajoutant qu'«a contrario du supposé choc des civilisations, le message européen a, en effet, toujours été celui du dialogue. «L'Histoire européenne est parsemée de moments difficiles, sombres. L'Union européenne est l'exemple de la reconnaissance de la nécessité vitale de surmonter les divergences entre les peuples pour coexister, pour construire un avenir qui ne peut qu'être commun. Ces valeurs de respect et d'entente mutuels définissent nos ambitions, notre action extérieure.» Ce rendez-vous va également «poser les bases d'une stratégie commune en faveur de la culture, embrassant la coopération tant dans le dialogue entre les cultures que dans les politiques culturelles Aussi, les recommandations des écrivains ont pleinement guidé la réflexion des ministres, pour définir leurs stratégies de coopération, leurs priorités d'actions pour la troisième réunion des ministres euro-méditerranéens de la Culture, prévue quelques jours plus tard à Athènes», a-t-elle préconisé. Pour les travaux de cette matinée, le Dr Mustapha Chérif d'Algérie intervient sur le thème «L'universel et le spécifique», en expliquant que «nous n'imaginons pas un seul instant que l'universel puisse n'être que la pensée particulière de l'Occident, son produit spécifique, original certes, mais finalement aussi peu exportable que n'importe quel produit d'origine, comme un trait spécifique occidental et loin de se rallier à ce concept abstrait, ce sont eux qui, par un retour étrange, relativisent notre universel et l'intègrent à leur singularité». Au terme de ce processus, «il n'y a plus de différence entre le mondial et l'universel. L'universel lui-même est mondialisé: la démocratie, les droits de l'homme circulent exactement comme n'importe quel produit mondial, comme le pétrole ou les capitaux», a-t-il ajouté. Et pour qu'il y ait un dialogue interculturel, «on doit écrire ensemble pour créer une civilisation qui n'est pas le cas aujourd'hui», a-t-il souligné. Les interventions de cette matinée se sont succédé avec Andrew Hussey de la Grande-Bretagne, Fadhéla M'rabet sur les thèmes «Toute écriture est mixte, comme tout mariage», Rui Cardoso du Portugal dans «J'écris depuis la Frontière». L'après-midi, c'était au tour de Persa Koumoutis de la Grèce, avec «Littérature: a universal language that crosses all frontries», Amine Zaoui dans «L'écrivain, l'autre et la peur intellectuelle», Jean Castilla Brazales d'Espagne, quant à lui présente «Al Andalus: un espacio de acercamiento entre Espana y el mundo arabe». Les lettres françaises seront représentées par Azouz Begag avec son ouvrage Dites-moi bonjour. L'écrivain et ambassadeur de la Diversité, Azouz Begag, présentera son livre lors de ce colloque et parlera de comment «Ecrire pour passer», tandis que le Belge Jean-François Dauven, abordera la façon de «Remettre l'imagination au pouvoir». Pour la journée d'aujourd'hui, la rencontre reprendra avec l'écrivain algérien, responsable des éditions Barzakh, Sofiane Hadjadj, et l'Allemande Ann Cotten. Cette journée tendra à démontrer comment l'Europe est devenue une terre de métissage culturel. Puis dans l'après-midi, ce sera au tour de Hamid Grine dans une intervention intitulée «L'écriture comme repère identitaire», la Portugaise Dulce Maria Cardoso, quant à elle, fera une communiquera sur «Une fiction qui s'appelle Europe», le Belge Jean-François Dauven, parlera de la Communauté européenne des écrivains et Union pour une Méditerranée littéraire et l'Italien Guiseppe Geoffredo qui évoquera dans «Poussières mères migrantes», les terres en tant que mémoire et liens entre la Méditerranée et l'Europe. La mise en oeuvre de véritables échanges littéraires et, de manière générale, d'échanges éditoriaux, passe par un effort simultané de relecture critique des corpus produits dans le passé et de recherche de complémentarités et synergies pour investir l'avenir.